Archivo mensual: junio 2016

Semaine 3: Les sources des droits de l’homme

Le cours de cette semaine exposera les sources des droits de l’homme dans une perspective juridique. Il précisera et approfondira, dans le sillage des cours précédents, le siège normatif des droits de l’homme, l’articulation entre ces derniers et les droits fondamentaux d’origine nationale, ainsi que certains des problèmes que pose la coexistence de ces garanties. Le cours poursuivra trois objectifs : (1) familiariser les étudiants avec les sources juridiques des droits de l’homme ; (2) identifier et apprendre à résoudre les problèmes générés par la coexistence des droits fondamentaux et des droits de l’homme ; (3) exposer, puis souligner l’importance qui revient au contrôle international du respect des droits de l’homme.

Lectures préalables :

Pour en savoir plus :

  • BEITZ Charles R., The Idea of Human Rights, Oxford 2009
  • HOTTELIER Michel, Le principe de faveur, arbitre des droits fondamentaux et des Droits de l’Homme, in Les Droits de l’Homme et la Constitution, Etudes en l’honneur du Professeur MALINVERNI Giorgio, AUER A. / FLUECKIGER A. / HOTTELIER M. (éds.), Zurich 2007, pp. 171-196
  • MERTEN Detlef / PAPIER Hans-Jürgen (éds.), Handbuch der Grundrechte in Deutschland und Europa, vol. VI/2, Europäische Grundrechte II, Universelle Menschenrechte, Heidelberg 2009

 

INTRODUCTION

Bonjour. Durant les deux premières semaines de ce cours, nous avons abordé ensemble, l’étude des fondements historiques, des fondements philosophiques, et aussi des fondements juridiques des Droits de l’Homme. À présent, nous allons nous intéresser à la question des sources des Droits de l’Homme, c’est-à-dire l’étude des supports normatifs sur lesquels reposent les Droits de l’Homme, et sur lesquels se fonde la pratique misant à assurer leur respect. Nous allons étudier dans ce cadre, en particulier une question extrêmement importante en pratique, qui est celle des problèmes que pose l’articulation et la mise en œuvre des Droits de l’Homme sur le plan national d’abord, sur le plan international ensuite en lien avec les droits fondamentaux.

Ce qui m’amène déjà à faire une distinction qui sera importante pour la suite de notre propos, c’est celle des droits fondamentaux d’une part, et des Droits de l’Homme de l’autre. Nous allons voir en détail ce qui distingue juridiquement ces deux catégories de droit individuel. Alors pour ce faire, le plan que nous vous proposons de suivre, nous amènera dans un premier temps à procéder à un bref rappel des sources nationales des droits fondamentaux pour mieux comprendre ensuite la question des sources alors spécifiquement internationales propres aux Droits de l’Homme. Nous aborderons ensuite la question des rapports juridiques entre les droits fondamentaux d’origine nationale, et les Droits de l’Homme tels qu’ils sont issus du droit international.

Nous en viendrons ensuite à la question de l’articulation entre les droits fondamentaux et les Droits de l’Homme, et nous terminerons par une brève séquence liée, consacrée à l’importance du contrôle international du respect des Droits de l’Homme pour définir en particulier leur contenu et les limites qui leur sont opposables.

 

LES SOURCES NATIONALES

Alors, revenons brièvement sur la question des sources nationales des droits fondamentaux et des Droits de l’Homme. Pour dire que les Droits de l’Homme se sont, comme nous l’avons vu, d’abord développés au niveau national c’est-à-dire sur le plan étatique. Ce développement très différencié, très hétéroclite en fonction des Etats va de pair avec une grande disparité entre les systèmes nationaux de protection des Droits de l’Homme, aussi bien pour ce qui est des droits qui sont garantis que pour des mécanismes qui visent à assurer leur respect.

Par exemple, on voit que dans la Constitution belge est garanti un droit original, le droit à un environnement sain que l’on ne retrouve pas dans la plupart des autres Constitutions. Un autre exemple, dans la Constitution du Chili, il y est garanti le droit à la santé. Ou encore, un exemple très classique, la Constitution des Etats-Unis d’Amérique garantit le droit de posséder une arme à feu ce qui est un droit qui n’est pas forcément garanti dans, dans d’autres textes. Ces diversités peuvent s’accentuer dans les États qui connaissent une structure fédérale avec deux niveaux de protection des droits fondamentaux. Les droits qui sont protégés au niveau spécifiquement national par la Constitution fédérale et puis les droits qui sont protégés par les textes, les Constitutions des collectivités fédérées lesquelles peuvent s’avérer parfois plus complètes c’est-à-dire offrir une protection plus étendue par rapport aux droits de rang national. À ce niveau, on peut observer par exemple que dans un pays comme la Suisse les Constitutions des 26 cantons qui composent le pays sont souvent dotés de catalogues de droits fondamentaux qui contiennent des garanties qui offrent une protection plus étendue par rapport à celles qui découlent du droit fédéral soit que ces Constitutions énoncent des droits qui ne figurent pas dans le catalogue prévu par la Constitution fédérale soit alors qu’ils contiennent les mêmes droits mais qu’ils en dessinent les contours et les limites d’une façon différente généralement plus favorable à leur titulaire.

On voit donc que cette disparité affecte la nature des droits garantis mais elle peut affecter aussi les mécanismes qui sont voués à la protection des droits fondamentaux. Il existe, en effet, plusieurs types de procédures sur le plan national qui permettent d’assurer le respect des droits protégés par une Constitution de façon générale. C’est un constat assez empirique, on observe que les États qui sont dotés d’un système de juridiction Constitutionnel c’est-à-dire d’un système qui permet d’assurer, généralement par des procédures judiciaires, le respect des normes Constitutionnelles. Eh bien, ces États-là tendent à assurer une protection assez aboutie et généralement la plus performante en matière de droits fondamentaux. Généralement, on observe que les États dotés d’un système de juridiction constitutionnelle tendent à assurer une protection plus performante en matière de droits fondamentaux. En Europe, par exemple, des États comme l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne ou la France connaissent des procédures sophistiquées qui permettent à un organe Étatique indépendant de vérifier que les droits fondamentaux sont respectés.

 

LES SOURCES INTERNATIONALES

Alors, venons-en à présent à la question des sources internationales des Droits de l’Homme. La protection strictement nationale, c’est-à-dire limitée aux territoires, et aux autorités des États des droits fondamentaux n’a pas empêché des dérives majeures et des violations massives de ses droits durant l’histoire. La Seconde Guerre Mondiale a en quelque sorte marqué un point d’orgue dans cette tragédie, et illustré ce phénomène de, de façon abominable et tragique, avec des persécutions infligées et planifiées systématiquement à l’égard de, de millions individus.

À l’issue du second conflit mondial, le, le constat de ces persécutions a généré, au fond, deux idées toutes simples. La première, c’est l’idée de, de limiter la souveraineté et les pouvoirs des États à travers la reconnaissance, à l’échelon supra-étatique, c’est-à-dire à l’échelon international, de certains droits parmi les plus élémentaires. La seconde idée, eh bien, c’est corrélativement de doter cette consécration de procédure visant à assurer un contrôle international quant au respect des droits ainsi consacrés à l’échelon supra-étatique. C’est ainsi que les Droits de l’Homme, dans, dans leur version contemporaine sont, sont nés.

On peut observer ainsi que leur consécration, leur conception et leur mise en œuvre sont indissociables du droit international. C’est donc dans le droit international que les Droits de l’Homme trouvent leurs sources et leurs garanties à la différence des droits fondamentaux, dont nous avons vu, c’était le rappel de tout à l’heure, qu’ils sont limités aux, aux confins, aux territoires des, des états.

La reconnaissance des Droits de l’Homme sur la scène internationale a suivi une trajectoire, au fond, assez proche de celle qui a caractérisé la, la genèse, la naissance et l’évolution des droits fondamentaux sur la scène nationale. On peut, dans les grandes lignes, distinguer et retrouver ici, en quelque sorte, les, les trois étapes qui sont celles que nous avons déjà  identifié à propos des droits fondamentaux.

D’abord, 1) une apparition un peu solennelle des Droits de l’Homme dans des déclarations de principes. 2) Ensuite, leur consécration normative par des instruments juridiquement contraignants sur la scène institutionnelle. 3) Enfin, l’institution de mécanisme de contrôle, comme on l’a vu, visant à assurer leur respect. Par exemple, aux États-Unis, les droits fondamentaux sont largement issus de la Déclaration d’Indépendance du 4 juillet 1776 qui a énoncé quelques-uns des droits parmi les plus basiques nécessaires à l’émancipation des habitants du nouvel État. Ensuite, deuxième étape, c’est, ces droits ont été instrumentalisés ou consacrés et développés, enfin concrétisés juridiquement par le Bill of Rights qui a été adopté comme nous l’avons vu en, en 1791, et qui a complété la déclaration, la Constitution des États-Unis de 1787. Et peu après, troisième étape, la mise en place, dans un processus assez, assez continu, assez complexe d’un système sophistiqué de juridictions Constitutionnelles, c’est-à-dire d’une procédure de contrôle visant à assurer le respect de ces droits à l’échelon du, du territoire des États-Unis. Eh bien, aujourd’hui encore, aux États-Unis, la Cour suprême américaine qui a son siège à Washington, exerce le contrôle du respect de ces droits sur la base de ce Bill of Rights de, de 1791.

Autre exemple, en France, première étape, les Droits de l’Homme et du citoyen ont été proclamés solennellement dans la déclaration du 26 août 1789. Au fond, sur le plan juridique, cette déclaration est un peu au monde des Droits de l’Homme, ce qu’est la prise de la Bastille qui s’est déroulée quelque temps auparavant. Deuxième étape, les droits qui sont intégrés dans la Déclaration de 1789 ont été intégrés au droit Constitutionnel français, et avec le développement du contrôle de la Constitutionnalité qui s’est opérée dans ce pays, eh bien, aujourd’hui encore, c’est un organe original qui assure le contrôle du respect des droits fondamentaux, des Droits de l’Homme et du citoyen. Cet organe, c’est le Conseil Constitutionnel du Palais-Royal à Paris.

Alors sur le plan international, il est intéressant de voir que la première étape qui a marqué en quelque sorte sur le plan juridique, le, le point de départ de la conception contemporaine des Droits de l’Homme, elle intervient, cette première étape, le 10 décembre 1948 avec l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme par l’Assemblée Générale de l’ONU. Nous faisons ici une citation empruntée aux propos de Madame Louise Arbour, Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU à l’époque qui, à l’occasion de la journée des Droits de l’Homme du 10 décembre 2007, s’est exprimée dans ces termes : « On a du mal aujourd’hui à imaginer le changement fondamental que la Déclaration Universelle a représenté lors de son adoption il y a 60 ans. Dans un monde d’après-guerre marqué par l’Holocauste, divisé par le colonialisme et déchiré par les inégalités, une charte énonçant le premier engagement mondial et officiel en faveur de la dignité humaine et de l’égalité inhérentes à tous les êtres humains, indépendamment de leur couleur, de leur croyance ou de leur origine était une initiative pleine d’audace ». (LOUISE ARBOUR, La Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme, Journée des Droits de l’Homme, 10 décembre 2007).

Le texte de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme n’a pas été conçu pour déployer directement des effets juridiques. Historiquement, ce texte ne constitue en effet qu’un engagement moral pour les États. C’est d’ailleurs l’un des éléments qui a contribué à son élaboration et à son adoption formelle. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 n’a pas été conçue pour déployer des effets juridiques et a constitué initialement un engagement moral de la part des États.

La question est discutée aujourd’hui de savoir si certaines dispositions de la Déclaration Universelle ont acquis en quelque sorte une force coutumière pour s’imposer aux États, indépendamment de tout autre engagement international. Mais nous l’aborderons pas dans, dans ce cadre. En revanche, ce que l’on peut dire, c’est que dans une deuxième étape, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme a servi de source directe d’inspiration pour l’adoption, alors cette fois, de traités internationaux, c’est-à-dire de, de lois internationales en quelque sorte, destinées à procurer un effet juridiquement contraignant à l’égard des droits qui sont énoncés. On peut se référer ici bien sûr, aux, aux deux Pactes des Nations Unies adoptés le 16 décembre 1966, donc 18 ans à peu près, après l’élaboration de la Déclaration Universelle. Le, le Pacte International relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels  d’une part, appelé Pacte un[1], parce qu’il a été le premier à être adopté ce jour-là, dans l’ordre du jour de l’Assemblée Générale. Et puis, le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques appelé Pacte deux[2], parce qu’il a été adopté juste à la suite du, du, du précédent.

Ces trois instruments, la Déclaration Universelle d’une part, et les deux Pactes de l’autre entretiennent un, un lien, une sorte de lien ombilical historiquement sacré, au point qu’aujourd’hui encore, on parle à leur propos de Charte Internationale des Droits de l’Homme. Mais il faut noter que la quasi-totalité des autres instruments que l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté, et ouvert à la signature en matière de protection des Droits de l’Homme se réfère aussi à la Déclaration Universelle. Il en va ainsi, par exemple, de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations raciales de 1965[3], ou plus récemment de la Convention contre la torture et les peines aux traitements cruels inhumains ou dégradants adopté en 1984[4].

Le rôle inspirateur, le rôle fondateur qui revient à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, c’est intéressant de le constater, a aussi inspiré l’adoption de traités chargés d’assurer la protection des Droits de l’Homme au niveau régional. C’est par exemple le cas de la Convention Européenne des Droits de l’Homme du 4 novembre 1950, dont le préambule relève, je cite que, « Les Gouvernements signataires membres du Conseil de l’Europe, considérant la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, proclamée par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 10 décembre 1948, considérant que cette Déclaration tend à assurer la reconnaissance et l’application universelle et effective des droits qui y sont énoncés, [sont] résolus à […] prendre les premières mesures propres à assurer la garantie collective de certains droits énoncés dans la Déclaration Universelle […] » (Préambule de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) du 4 novembre 1950), et vient ensuite le texte de la convention proprement dite. La référence à la Déclaration Universelle est aussi présente dans d’autres instruments régionaux, comme la Convention Américaine des Droits de l’Homme, ou bien la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Donc on voit vraiment que c’est un instrument englobant, fondateur, comme je le disais tout à l’heure, qui est et qui reste véritablement la référence, le point de départ de ce processus de ce concrétisation normative.

Plus encore, on observe que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme a également inspiré des Constitutions nationales, lorsque la question s’est posée, par exemple, à la faveur de mouvements de rupture, dans des fractures révolutionnaires qui ont conduits à un changement de régime dans certains Etats, la Déclaration a servi de référence pour instaurer, mettre en place en quelque sorte un nouveau système, un nouveau mécanisme, une nouvelle conception en matière de protection des droits fondamentaux. Je me réfère ici par exemple à la Constitution Espagnole du 28 décembre 1978, qui contient une disposition originale, l’article 10, donc l’alinéa deux, je cite, se réfère explicitement à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, en précisant que les droits fondamentaux qu’énonce cette Constitution s’interprètent « conformément à  la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, et au traité en la matière ratifié par l’Espagne ».

Dans d’autres pays, qui sans avoir nécessairement connu un processus de rupture historique, mais qui ont pu changer de Constitution au cours des âges, on observe un phénomène identique, par exemple en Suisse, l’adoption de la Constitution Fédérale du 18 avril 1979, a conduit à la mise en place, à l’élaboration et à l’adoption d’un catalogue de droits fondamentaux très complet qui s’inspire très directement des sources internationales, notamment le Déclaration Universelle telle que concrétisée par des instruments comme la Convention de 1965 sur l’élimination de toutes les formes de discriminations raciales ou bien le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques. Des dispositions de cette Constitution, comme la lutte contre la discrimination, la consécration de la liberté personnelle, ou de la liberté d’expression, ou encore des garanties plus spécifiques dans le domaine de la procédure pénale se sont très ouvertement inspirées et référées aux instruments internationaux de protection des Droits de l’Homme que la Suisse a ratifiés.

On voit donc, et c’est le but de ces illustrations et de ces citations, qu’il existe des rapports extrêmement étroits, finalement, normativement juridiquement entre les droits fondamentaux et les Droits de l’Homme. Si les droits fondamentaux ont précédés les Droits de l’Homme, et si les Droits de l’Homme les ont en quelque sorte consacré à l’échelon universel, à l’échelon international universel et régional, on voit aussi un phénomène inverse, les Droits de l’Homme investissent beaucoup le terrain national et ne manquent pas d’influencer les sources nationales du droit, qu’elles soient Constitutionnelles, législatives, ou autres.

Donc, à ce stade, nous pouvons observer que la source principale de reconnaissance de consécration des Droits de l’Homme sur la scène internationale, ce sont incontestablement les traités internationaux, c’est-à-dire les conventions que les États acceptent de signer avec des organisations internationales, qui ont élaboré des systèmes de protection des Droits de l’Homme. Il y a une autre source des Droits de l’Homme sur la scène international qui ne laisse pas d’intéresser, qui est tout à fait originale, ce sont ce qu’on appelle les règles impératives du droit international, ou on utilise parfois l’expression latine de ius cogens, de droit contraignant pour en parler, dont certaines font directement référence aux droits de la personne humaine. Alors, toutes les règles internationales contraignantes ne concernent pas les Droits de l’Homme, il y a des règles qui concernent les rapports des acteurs de la société internationale entre eux, qui ne vont pas nous retenir ici mais, certains Droits de l’Homme ont acquis au cours de l’histoire la qualité de règle impérative contraignante du droit international c’est-à-dire qu’elles lient les États indépendamment de toute convention. À l’heure actuelle, on tend à considérer que des garanties comme le droit à la vie, l’interdiction de la torture, le principe du non-refoulement, ou l’interdiction de l’esclavage, ou encore l’interdiction de la discrimination raciale, font partie de ces règles impératives du droit international et qu’elles nourrissent en quelque sorte, déploient en quelque sorte, une envergure, une voilure autonome parallèlement ou en marge des droits consacrés conventionnellement par des traités.

Nous allons voir à présent comment ces diverses sources de garanties des Droits de l’Homme s’articulent sur la scène nationale, puis sur la scène internationale.

 

L’ARTICULATION DES SOURCES

Selon une tendance qui est assez communément répandue, les Droits de l’Homme éclipseraient les droits fondamentaux d’origine nationale, ils auraient ainsi vocation en quelque sorte à les remplacer, à se substituer à la protection qu’octroie le droit national. Cette vision n’est pas exacte. Les rapports entre les droits fondamentaux et les Droits de l’Homme sont effectivement souvent méconnus et incompris, et pour comprendre cette articulation, il faut aborder deux perspectives, la première est une perspective de subsidiarité, et l’autre une perspective de complémentarité.

Pour répondre à cette interrogation s’agissant des rapports entre les Droits de l’Homme et les droits fondamentaux, il faut rappeler que les Droits de l’Homme tendent à assurer le respect de la dignité humaine, à travers la garantie collective de certains droits individuels particulièrement vulnérables, particulièrement menacés, ayant fait l’objet de nombreuses violations au cours de l’histoire. Donc dans cette perspective, la vocation des Droits de l’Homme, ce n’est pas de remplacer les systèmes nationaux de protection des droits fondamentaux, mais peut-être un peu plus subtilement ou un peu plus finement d’assurer simplement un seuil minimal de protection et d’instituer un plus petit dénominateur commun aux États partie aux instruments internationaux qui les garantissent en faveur du respect de la dignité humaine. Autrement dit, les Droits de l’Homme, et le propos est vraiment central pour toute la suite du cours, les Droits de l’Homme sont dotés d’une dimension subsidiaire par rapport aux droits fondamentaux. Alors, cette subsidiarité, elle se décline sur deux plans. Sur un plan quantitatif et puis aussi sur un plan qualitatif.

Sur le plan quantitatif, les Droits de l’Homme existent en nombre limité. Ils n’ont pas vocation à englober l’entier des facultés ou des comportements humains, qui sont appréhendés par les droits fondamentaux. Il existe donc au niveau des États, des droits fondamentaux garantis, protégés par leurs droits Constitutionnels, qui ne trouvent pas nécessairement d’équivalents sur la scène internationale. Pour prendre un exemple, la Constitution Colombienne garantit le droit des enfants à une alimentation équilibrée. Ou bien, outre exemple, la Constitution Fédérale Suisse[5] garantit les droits politiques c’est-à-dire les droits démocratiques qui permettent une large participation de la population à la formation de la volonté générale dans des termes beaucoup plus étendus que ceux qui découlent des traités en matière des Droits de l’Homme. La Constitution suisse garantit également la liberté économique dans les termes suivants: à l’article 27, elle précise que « la liberté économique est garantie », et que cette liberté « comprend notamment le libre choix de la profession, le libre-accès à une activité lucrative privée, et son libre exercice » (Constitution Fédérale de la Confédération Suisse du 18 avril 1999), il s’agit d’un droit qui n’est pas garanti dans les mêmes termes à l’échelon international.

Sur le plan qualitatif à présent, les Droits de l’Homme, protégés par le droit international, ne tendent à assurer qu’un filet minimal de protection, c’est-à-dire que les États restent, demeurent libres d’instituer une protection supérieure plus favorable à l’égard de leurs titulaires. En d’autres termes, et j’allais dire, tout est là, les États peuvent faire plus en matière de protection des Droits de l’Homme, d’ailleurs ils sont invités à le faire, via leur protection nationale en matière de droits fondamentaux mais ils ne peuvent jamais faire moins. Si les standards de protection des droits qu’ils assurent à l’échelon national sont inférieurs à ceux qui découlent du droit international, alors ils violent les Droits de l’Homme et ils engagent leur responsabilité sur la scène internationale.

Vous voyez que cette idée de subsidiarité induit l’autre concept, celui de la complémentarité. Les deux concepts sont en réalité étroitement et même indissociablement liés. La vocation des Droits de l’Homme, en effet, c’est de renforcer, en la complétant, la protection nationale des droits fondamentaux, à travers d’une part, une garantie de standards minimaux, comme nous l’avons vu, et d’autre part, au moyen d’un contrôle supra-étatique, visant à permettre l’exercice d’un droit de regard extérieur au sérail national, quant au respect des droits en cause. La physionomie qui découle de ces principes d’articulation fait que ce sont les États qui veillent prioritairement à la protection des droits fondamentaux et des Droits de l’Homme, et ce sont eux qui garantissent et qui mettent prioritairement aussi en place les mécanismes et les procédures destinés à rendre ces droits effectifs.

Liés juridiquement par les Droits de l’Homme, les États doivent aussi respecter les standards minimaux qui découlent des instruments internationaux qu’ils ont librement ratifiés. Ces instruments, ce sont des traités, des conventions, auxquels les États ont souverainement, librement décidé d’adhérer, et dont ils doivent respecter les termes une fois qu’ils ont souscrit à ces engagements. On voit ainsi, et c’est une phase importante du cours que, au contrôle strictement national du respect de la Constitution s’agissant de la mise en œuvre des droits fondamentaux, eh bien, s’ajoute un autre contrôle, qui porte sur le respect des conventions internationales. Reprenons notre terminologie, et c’est tout simple. Nous voyons que, au contrôle de la Constitutionnalité, qui vise à assurer le respect des droits fondamentaux garantis par les Constitutions nationales, se double un contrôle issu du respect du droit international, c’est le contrôle de la conventionnalité.

Contrôle de la conventionnalité, parce que ce contrôle porte sur le respect de conventions internationales de ces fameux traités visant à assurer le respect des Droits de l’Homme à l’échelon aussi bien universel que régional. Le contrôle de la conformité d’un acte étatique à un traité international de protection des Droits de l’Homme se présente comme un contrôle de conventionnalité. Si le contrôle de la Constitutionnalité trouve nécessairement ses limites et s’épuise au niveau des États, qui sont compétents pour l’instituer, le contrôle de la conventionnalité que les États assurent aussi, lui, a des prolongements sur la scène internationale, et c’est toute la vocation des Droits de l’Homme, c’est, je vous le répète, d’assurer un contrôle portant sur le respect, par les États, des engagements auxquels ils ont librement et souverainement souscrit.

À cela s’ajoute, nous l’avons vu tout à l’heure, l’autre source importante dans le domaine de la protection des Droits de l’Homme, le respect du ius cogens, de ces règles impératives auxquelles nous avons fait référence tout à l’heure.

 

L’IMPLANTATION DANS L’ORDRE JURIDIQUE DES ETATS

Attardons-nous à présent quelques instants sur l’implantation des Droits de l’Homme dans l’ordre juridique des États, pour dire que cette implantation est un phénomène qui varie fortement en fonction des États et de leurs traditions Constitutionnelles respectives. Il faut d’abord rappeler que les États sont et restent fondamentalement libres d’adhérer et de ratifier les traités dans le domaine des Droits de l’Homme. Lorsqu’ils le font, lorsqu’un État décide de s’engager sur le terrain d’un traité international visant à assurer le respect de la dignité humaine, il ne le fait, d’ailleurs, pas toujours exclusivement pour des considérations d’ordre juridique, mais bien souvent, et pour ne pas dire prioritairement, pour des considérations de nature politique, de nature institutionnelle, de nature historique, ou encore de nature économique.

Le processus qui conduit les États à mettre en œuvre les Droits de l’Homme varient considérablement en fonction de ces diverses catégories d’États. On peut, dans les grandes lignes, distinguer deux grandes catégories d’États. Il faut en dire quelques mots. Il y a les États qui ont épousé une structure dualiste et ceux qui ont opté pour une structure moniste, dans le domaine du respect du droit international.

Alors, pour ce qui est des États de tradition dualiste, pour ces États-là, il faut savoir que l’entrée en vigueur d’un traité à leur égard ne va pas nécessairement de pair avec l’intégration automatique de ce traité en droit interne. Selon cette approche, qui distingue très nettement le droit international, d’une part, et le droit national, de l’autre, un traité ne doit pas seulement être ratifié sur la scène internationale pour engager l’État. Il l’engage certes sur la scène internationale, mais pour l’engager au niveau interne, au niveau du droit national, eh bien, ce traité doit encore être reçu en droit interne au moyen d’un acte d’approbation, généralement une loi, avant de pouvoir être appliqué et mis en œuvre. On voit très bien ce que cela peut signifier dans le domaine des Droits de l’Homme. Un exemple, c’est le Royaume-Uni, qui a ratifié la Convention Européenne des Droits de l’Homme très tôt, après l’adoption de cet instrument, au début des années 1950, mais qui, en fonction de la tradition dualiste qui caractérise cet État, eh bien, a vu la convention ne pas pouvoir déployer d’effets directs tant qu’elle n’a pas été formellement intégrée au droit interne. C’est ce qui s’est produit bien plus tard, à la fin du vingtième siècle, avec l’adoption au Royaume-Uni du Human Rights Act de 1998, qui a fait littéralement pénétrer la convention dans l’ordre juridique de ce pays, en la plaçant au niveau d’une loi ou des sources de droit ordinaire, en vigueur dans cet État.

Les États monistes, eux, par contre, ont une approche différente, qui est bien davantage fondée sur l’osmose entre le droit international et le droit interne. Pour ces États-là, au moment où le traité entre en vigueur sur la scène internationale pour l’État en cause, eh bien, simultanément, au même moment, il est appelé à déployer ses effets sur le plan interne, sur le plan national. Dans cette tradition-là, il n’est pas nécessaire de recourir au vote d’une loi d’incorporation pour que le traité puisse déployer ses effets. Reprenons l’exemple de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, avec un autre État, cette fois, la Suisse. La Suisse a ratifié la Convention Européenne des Droits de l’Homme en 1974, donc presque 25 ans après l’adoption de cet instrument par le Conseil de l’Europe, mais depuis cette date-là, depuis le jour de la ratification de la convention par la Suisse, eh bien, ce traité est applicable immédiatement en droit interne. Il déploie des effets qui sont comparables à ceux des droits fondamentaux qui découlent du droit Constitutionnel national. Sous certaines conditions, les traités internationaux des Droits de l’Homme peuvent être invoqués concurremment avec les garanties nationales des droits fondamentaux sans l’adoption d’une loi d’intégration de ces traités dans les États de tradition moniste.

On observe d’ailleurs que le meilleur effet des Droits de l’Homme, leur effet optimal, ou leur effet utile le plus bénéfique, comme on dit, est celui qui se produit lorsque ces droits sont intégrés au droit national et assimilés, ou en tout cas, comparés, susceptibles d’être invoqués de la même manière que les droits fondamentaux d’origine nationale. Les deux sources pouvant alors être invoquées simultanément selon des procédures de contrôle qui sont propres à chacun des États intéressés devant les instances nationales. Cela signifie qu’une même personne peut se prévaloir aussi bien des droits consacrés par le droit Constitutionnel de son État que ceux que garantit le droit international, qu’il est en mesure d’invoquer dans la même mesure. En d’autres termes, nous voyons apparaître, ici, une figure qui est importante dans la théorie et dans la pratique contemporaine des Droits de l’Homme, c’est ce qu’on appelle les cas de coexistence ou de concours de garanties de droits fondamentaux et de Droits de l’Homme, qui finalement visent le même comportement ou la même valeur mais résulte d’instruments normatifs qui sont distincts historiquement mais qui peuvent être appelés à être appliqués simultanément dans la même affaire.

Ces cas de coexistence ou de concours posent des problèmes de qualification, d’interprétation et de résolution sur le plan juridique qui sont d’ailleurs assez complexes, et sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir ultérieurement. Je veux, ici, préciser que la problématique est encore plus complexe de nos jours puisqu’à  la faveur du développement, largement incontrôlé, des instruments internationaux de protection sur la scène universelle, d’une part, et sur la scène régionale, de l’autre, on assiste aujourd’hui même à des cas de concours ou de coexistence de Droits de l’Homme entre eux, la même garantie pouvant être appréhendée par plusieurs instruments internationaux d’origine et de nature différente.

Alors, un mot quand même, pour aborder la question de la résolution de ces cas de concours ou de coexistence de droits fondamentaux et de Droits de l’Homme, deux principes extrêmement importants ont été mis au point et gouvernent juridiquement ces cas de figure : c’est le principe de la subsidiarité, d’une part, et c’est le principe du droit qui offre la protection la plus étendue, d’autre part. Avec la subsidiarité, nous retrouvons la règle que nous avons évoquée, il y a quelques instants : les Droits de l’Homme ont été conçus non pas pour supplanter ou se substituer aux droits fondamentaux, mais véritablement pour assurer une protection complémentaire par rapport à celle qui découle du droit national. Je rappelle, ici, que ces garanties n’ont pas vocation à remplacer la protection qu’offre les droits fondamentaux, mais bien au contraire, à compléter, ou à encadrer, à renforcer, la protection nationale lorsque celle-ci, le cas échéant, peut s’avérer insuffisante ou défaillante. Dans cette perspective, les Droits de l’Homme ne sont pas opposés aux droits fondamentaux, ils ne sont pas les ennemis des droits fondamentaux. Mais leurs mises en œuvre, sur le plan national, doit conduire à une évaluation qui conduit à choisir la garantie qui octroie la protection la plus favorable à son bénéficiaire.

Et c’est là  qu’intervient le second principe que nous venons d’évoquer, le principe de faveur. Selon ce principe, l’application simultanée de deux ou de plusieurs garanties issues du droit Constitutionnel national et du droit international des Droits de l’Homme, eh bien, doit conduire à l’identification de la garantie qui offre la protection la plus étendue, la plus favorable, la plus bénéfique à son titulaire. En d’autres termes, les Droits de l’Homme ayant été conçus pour assurer le respect de la dignité humaine, toute leur philosophie vise à, je le répète, compléter, encadrer, le droit national et en tout État, à opter pour la protection, finalement, la plus favorable à l’égard de leurs titulaires.

Il serait, en d’autres termes, contraire, et résolument contraire, à la philosophie des Droits de l’Homme d’utiliser, en sens inverse, la protection éventuellement moins favorable, qui découle du droit international des Droits de l’Homme, pour abaisser à ce seuil inférieur la protection qui découle, en matière de droits fondamentaux, sur la base du droit Constitutionnel national. Le principe de faveur est inhérent à l’histoire, à la philosophie, à la notion même des Droits de l’Homme. D’ailleurs, c’est tellement vrai que plusieurs instruments internationaux de protection des Droits de l’Homme le consacrent explicitement, précisément dans la perspective d’aider à une meilleure compréhension, et donc à une meilleure mise en œuvre, à une meilleure application des Droits de l’Homme au niveau national. On peut se référer, ici, à l’article cinq, paragraphe deux, des deux Pactes onusiens qui stipulent, je cite: « Il ne peut être admis aucune restriction ou dérogation aux droits fondamentaux en vigueur dans les États parties en application de lois, de conventions, de règlements ou de coutumes, sous prétexte que les deux Pactes ne les reconnaissent pas ou les reconnaissent à un moindre degré » (Art. 5 par. 2 commun au pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte ONU I) et au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (Pacte ONU II) du 16 décembre 1966). Dans cette perspective, les Droits de l’Homme visent à assurer une sorte de garde-fou, un seuil minimal de protection, comme on l’a dit. En d’autres termes, ils sont susceptibles de déployer leurs effets uniquement dans l’hypothèse où l’inapplication, ou la mauvaise application, des droits fondamentaux d’origine interne conduise à la violation de ce seuil minimal de protection.

On voit l’ambigüité. Et c’est là toute l’ambigüité des Droits de l’Homme, eh bien, c’est le fait que les Droits de l’Homme tout en étant dirigés contre les États, qui doivent les respecter, et qu’il doit museler quelque part, eh bien, ces droits doivent prioritairement être mis en œuvre et respectés par les États dans leur sérail national de protection. C’est dire, et je crois qu’on le voit bien apparaître, l’importance et l’ampleur de la responsabilité qui revient aux organes internationaux chargés de veiller sur la scène supra-étatique au respect des droits de la personne humaine. C’est de ce sujet que nous allons parler à présent.

 

L’IMPORTANCE DU CONTROLE INTERNATIONAL

Nous n’allons pas détailler maintenant les mécanismes de protection des Droits de l’Homme, puisque ce sujet sera étudié ultérieurement en, en détail avec notamment l’apport de, de témoignages d’experts et de, de spécialistes. Non, ici l’idée est plus modestement de mettre le concept de protection internationale en lien avec les sources des Droits de l’Homme qui, qui sont l’objet de notre séance de, de cette semaine, afin d’illustrer le rôle et l’importance du rôle qui revient à ces procédures, non seulement certes dans le, le contrôle du respect des Droits de l’Homme, comme on l’a dit à plusieurs reprises, mais, mais aussi, et, et peut-être surtout à ce stade, dans leur concrétisation, dans leur mise en œuvre, et parfois même, vous allez le voir, dans, dans leur reconnaissance. En d’autres termes, l’idée ici, c’est de dire que le processus de contrôle du respect des Droits de l’Homme joue un rôle déterminant dans le concept même de ces droits.

C’est en effet un élément caractéristique des Droits de l’Homme, c’est leur concision. Souvent, le plus souvent, les Droits de l’Homme sont en effet proclamés, consacrés, reconnus par de simples phrases qui révèlent et mettent en exergue les valeurs et les comportements à protéger, mais sans en dire plus. Ils donnent en quelque sorte un point de départ, un input pour une phase ultérieure, celle de leur mise en œuvre qui appelle un processus extrêmement important d’interprétation et de concrétisation.

Un exemple pour illustrer le propos. Le, le droit à la vie est protégé par le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques[6], par la Convention Américaine des Droits de l’Homme[7], par la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples[8], ou par la Convention Européenne des Droits de l’Homme[9] qui, qui tous, tous ces instruments consacrent ainsi une valeur fondamentale, dont je pense personne ne contestera, qu’elle constitue le droit à la vie, le point de départ du respect de tous les autres Droits de l’Homme. Ça, on le comprend bien. Mais au fond, quand la vie commence-t-elle juridiquement? À partir de quel instant un être en, en gestation acquiert-il la qualité d’être humain au sens du droit? Et puis quand la vie finit-elle? Le droit à la vie est-t-il, en d’autres termes, également porteur d’un devoir, le devoir de vivre à tout prix, en toutes conditions? Ou bien, cette garantie comprend-elle aussi le droit de ne pas vivre? C’est-à-dire le droit de mettre fin à ses jours, et au besoin, de bénéficier d’une assistance éventuellement active pour mettre fin à ses jours. Chacun conviendra que ces questions sont, sont littéralement fondamentales, cruciales, puisque le, le statut juridique du droit à la vie permet de déterminer et d’évaluer la conformité de législations nationales, telles que l’interruption volontaire de grossesse, le recours à certaines formes de traitements thérapeutiques en fin de vie, ou même de l’assistance au suicide par rapport au droit à la vie garanti par le droit international des Droits de l’Homme.

Les instruments de protection des Droits de l’Homme n’ont, n’ont pas vocation à répondre eux-mêmes de manière catégorique et définitive à ces problématiques aussi complexes que délicates. Ils marquent, ces instruments à travers les garanties qu’ils consacrent, le point de départ d’une réflexion qui porte sur le respect des valeurs les plus précieuses de la dignité humaine. Ces questions peuvent être abordées à l’occasion de situations pratiques, de cas concrets lors desquels elles suscitent des, des interrogations, et elles peuvent appeler des réponses qui d’ailleurs peuvent évoluer assez fondamentalement dans le temps et, et dans l’espace. Par définition donc, les réponses aux, aux questions de ce genre, portant sur l’envergure du droit à la vie, son point de départ, ses, ses limites éventuelles, et le moment à partir duquel ce droit cesse de déployer ses effets juridiquement, ces réponses reviennent par définition aux organes nationaux, puis aux organes internationaux chargés d’assurer le respect des, des Droits de l’Homme.

Voilà où nous voulons en venir. Le, le processus d’interprétation et de concrétisation des droits de la personne humaine représentent, à notre sens, une tâche au moins aussi considérable, aussi importante que la consécration normative de ces droits. En d’autres termes, le processus d’interprétation et de mise en œuvre de ces garanties via les mécanismes que nous allons étudier ultérieurement, est indissociable des sources mêmes des Droits de l’Homme. Ce qui signifie que la pratique des Droits de l’Homme, en aval de leur consécration par le processus de reconnaissance via des traités internationaux, est au moins aussi importante que leur consécration.

Je prends un autre exemple, pour illustrer le, le propos. Il s’agit de l’interdiction de la torture qui est présente dans, dans tous les instruments internationaux de, de protection des Droits de l’Homme. À teneur de l’Article 7 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, par exemple, je cite : « Nul ne sera soumis à  la torture ni à des peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants » (Art. 7. Du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (Pacte ONU II) du 16 décembre 1966). L’Article trois de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, l’Article cinq de la Convention Américaine des Droits de l’Homme, et l’Article cinq également de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ont, ont une teneur globalement comparable.

Ce qui est intéressant, c’est de voir que des dispositions comme celles-ci, qui sont elles aussi naturellement fondamentales, littéralement attachées à, à l’existence humaine, et au respect de la dignité humaine. L’interprétation de, de ces dispositions peut subir une évolution au cours du temps. La, la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg est assez intéressante à cet égard. Par exemple, qu’est-ce qui distingue la torture d’un traitement, entre guillemets, « simplement inhumain », ou entre guillemets toujours, « simplement dégradant »? Les instruments en protection des Droits de l’Homme n’apportent pas de réponse à cette question. C’est en l’occurrence, le juge, le Juge européen, le Juge international qui a dû, au cours d’une jurisprudence évolutive, précisé qu’il existe une gradation dans l’intensité de la souffrance et de l’atteinte à la dignité humaine entre la notion de traitements dégradants, puis plus graves, de traitements inhumains, et puis finalement, l’existence d’un cas de, de torture.

Et on voit bien qu’il n’y a guère que la casuistique au gré des, des, des cas révélés par des situations dans lesquelles une disposition comme l’Article trois de la Convention Européenne des Droits de l’Homme peut être amenée à s’appliquer, sont de nature à permettre d’apporter des réponses à ce genre de question. Plus encore, la, la Cour de Strasbourg a également précisé que l’interdiction de la torture revêt un caractère absolu, et qu’elle ne s’accommode d’aucune espèce de restriction ou de dérogation. Il n’y a pas de poser des intérêts possibles dans ce domaine. La torture, c’est l’enseignement des conflits liés à la Seconde Guerre mondiale qui trouvent ici leur consécration normative, l’interdiction de la torture est inconditionnelle.

Plus encore, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a eu l’occasion de préciser, dans un arrêt de principe rendu au mois de juillet 1989, l’arrêt Soering[10] qui fait l’objet de la documentation que vous deviez préparer pour aujourd’hui. Eh bien, la, la Cour de Strasbourg a eu l’occasion de préciser que l’interdiction de la torture déploie non seulement des effets internes, des effets nationaux bien entendu, mais qu’elle déploie aussi des effets extraterritoriaux, à travers la reconnaissance d’un principe qui a aquis la valeur de règle impérative contraignante du droit international, le principe du non-refoulement. En d’autres termes, dans cette perspective, un État européen susceptible, c’était le cas dans l’affaire Soering, de livrer ou de remettre à des autorités non-européennes, donc non parties à la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Une personne, en sachant que cette personne encourt vers le lieu de destination qui lui est, qui, qui lui est destinée, vers le lieu de sa destination, qu’elle encourt une violation, un risque de violation de l’interdiction de la torture, eh bien, une situation de ce genre peut engager la responsabilité de l’État qui extrade, qui renvoie, qui refoule, qui éloigne. Alors même que l’État qui commettra lui-même la violation du droit en cause n’est pas partie à la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Dans l’Arrêt Soering c. Royaume-Uni, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a précisé que l’interdiction de la torture (art. 3 CEDH) déploie des effets estraterritoriaux à travers la reconnaissance du principe de non-refoulement.

Plus encore, dans un arrêt de principe extrêmement important lui aussi, rendu en, en 1988 par la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme. C’est un arrêt qui fait aussi l’objet de la documentation que nous vous avons demandé de, de lire pour aujourd’hui[11]. Eh bien, la Cour de, de San José de Costa Rica a précisé que l’interdiction de la torture, ce n’est pas seulement l’interdiction pour un agent de l’État de se livrer à des actes de torture. Il y a bien sûr cet, ce volet matériel qui est inhérent et prioritaire à l’interdiction de la torture, mais il y a aussi un volet procédural qui est intégré à l’interdiction de la torture. En d’autres termes, les États ne sont pas seulement responsables en cas d’atteinte au droit de ne pas être torturés. Ils assument également une responsabilité de nature procédurale, et doivent conduire, d’après le droit international des Droits de l’Homme, une enquête indépendante, approfondie et effective, impliquant à cet effet, des moyens qui peuvent être considérables, afin d’identifier les personnes responsables de cas de tortures, si l’allégation d’un traitement de ce genre est présentée d’une façon défendable de manière à identifier et à punir les auteurs de cette violation.

Ces précisions ont été rendues possibles, eh bien, on le voit bien par les procédures, et grâce aux procédures internationales de contrôle qui visent à rendre opérantes, si je puis dire, concrètes et effectives les garanties figurant dans les instruments internationaux de protection des Droits de l’Homme. En d’autres termes, la pratique de ces organes, la pratique judicière, la jurisprudence issue de ces Cours internationales de justice. Ou bien plus largement, la pratique des organes chargés d’assurer le respect des Droits de l’Homme, même lorsqu’ils n’ont qu’une fonction quasi-judicière, représentent une source de protection des Droits de l’Homme qui permet utilement, non seulement de révéler le contenu de ces garanties conventionnelles, mais au besoin de les interpréter, et même de compléter leur protection en les adaptant aux nécessités de la vie contemporaine. La jurisprudence, la casuistique, la pratique internationale en matière de Droits de l’Homme représente ainsi elle aussi, une source certes dérivée, mais incontestablement, une source destinée à compléter et à renforcer leurs effets juridiques.

 

CONCLUSION

En conclusion, nous avons vu aujourd’hui que la question des sources des Droits de l’Homme affiche une importance considérable. Elle renvoie en effet à la notion, à la qualification juridique, au contenu, ainsi que plus largement, au processus de contrôle du respect de ces droits. Les sources des Droits de l’Homme, c’est le droit international. C’est historiquement de cet ordre juridique qu’ils sont issus. Sur la base des concepts qui ont certes été préalablement développés au niveau national à propos des droits fondamentaux, mais dont les Droits de l’Homme se sont distancés pour acquérir de nos jours une autonomie et faire partie d’un système particulier, nous l’avons vu, distinct de ce qui se fait au niveau des États. Les Droits de l’Homme trouvent leur assise prioritairement dans des traités internationaux nommés pactes, conventions, ou protocoles, au-delà de la terminologie le point commun de ces instruments est que tous confèrent une valeur et une force juridique à ces droits. Les Droits de l’Homme doivent être respectés, ils doivent être protégés, et ils doivent être mis en œuvre.

Pour une part importante, les Droits de l’Homme trouvent leur inspiration dans la Déclaration Universelle du 10 décembre 1948[12], nous avons vu que si ce texte est dépourvu d’effets juridiques, il n’en a pas moins exercé une influence déterminante sur la conception des Droits de l’Homme en vigueur à l’échelon universel que régional, sans oublier les progrès qu’il a permis d’accomplir à l’échelon national. La source normative des Droits de l’Homme, traités internationaux, règles impératives du droit international, cette source se double de nos jours de la casuistique, on pourrait dire de la jurisprudence qui se développe, à l’occasion de leur mise en œuvre, à l’occasion de l’application de traités comme la convention africaine des Droits de l’Homme, ou la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Ces, ces instruments, ces deux-là mais les autres aussi, procurent par l’intermédiaire des mécanismes internationaux qu’ils ont institués, des Cours de justice pour ce qui est du système africain et du système européen, ces instruments ont procuré une dimension extrêmement active, très concrète aux Droits de l’Homme, très évolutive aussi, à l’occasion du processus d’interprétation des garanties en vigueur sur le continent africain et sur le continent européen.

Du point de vue des sources, nous aimerions dire que le processus juridictionnel, ou quasi juridictionnel, qui accompagne la mise en œuvre des Droits de l’Homme est ainsi au moins aussi important que leur consécration dans des traités internationaux, qui un peu à l’image d’une fusée, y marque le premier étage de cette consécration et du respect de la dignité humaine à l’échelon international, mais qui ne s’épuise pas dans la simple proclamation et la reconnaissance par voie conventionnelle. En d’autres termes, le contrôle du respect des Droits de l’Homme participe pleinement au processus de reconnaissance et de garantie en vue de leur conférer, comme le dit magistralement la Cour Européenne des Droits de l’Homme, un caractère non pas théorique ou illusoire, mais bien concret et effectif.

Pour compléter les notions que nous avons étudiées cette semaine, je vous invite à visionner l’interview du Professeur Abdoulaye Soma, professeur à l’Université de Ougadougou, qui livre un témoignage et une expertise extrêmement intéressante, extrêmement édifiante du système africain de protection des Droits de l’Homme et des peuples.

 

ENTRETIEN AVEC ABDOULAYE SOMA

Professeur Soma, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation, ma première question portera sur la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981, par comparaison avec les autres instruments de protection des Droits de l’Homme tels qu’ils existent à l’échelon universel ou régional, pouvez-vous nous dire brièvement en quoi consiste l’originalité de la charte?

>> Merci beaucoup Professeur Hotellier. J’aimerais également vous exprimer tout mon bonheur et tout l’honneur que j’ai à coopérer avec vous sur le plan scientifique. S’agissant de l’originalité de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, je dirais qu’elle a une double originalité à la fois formelle et matérielle. L’originalité formelle c’est l’effet au champ géographique d’application de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, et de ce point de vue, on peut dire que la charte a une application holistique, puisque la charte s’applique sur l’ensemble du continent africain. Quand on regarde les différents systèmes de protection des Droits de l’Homme, la charte est la seule à couvrir l’ensemble d’un continent, à l’exception, à une exception près, notamment le cas du sud Soudan. La deuxième originalité, cette fois-ci matérielle, c’est l’effet au contenu. C’est-à-dire au droit garantit par la charte.

Et, de ce point de vue, une première originalité matérielle de la charte est sa consécration des droits des peuples. La charte est la norme de référence en matière de protection des droits des peuples en droit international des Droits de l’Homme, donc on trouve dans la charte des droits qui sont garantis à des peuples en tant que organes, en tant que organes collectifs. On a aussi des droits qui sont garantis dans les articles 22 et suivants de la charte, et qui concernent notamment le droit des peuples à l’existence, le droit des peuples à l’auto-détermination, le droit des peuples au développement, le droit à un environnement, le droit à la paix.

La deuxième originalité de la charte, c’est la consécration des devoirs. Et la charte a de ce point de vue un double schéma. Il y a d’abord un équilibre entre les devoirs de l’État et les devoirs de l’individu. Donc il y a notamment le devoir de l’État de veiller à l’existence d’un environnement national propice à la mise en œuvre des Droits de l’Homme, il y a corrélativement à ces devoirs de l’État, les devoirs de l’individu. Notamment à l’article 29, l’individu a des devoirs et à l’égard de sa communauté et à l’égard de sa famille. Et donc on voit que la charte essaie de faire un équilibre entre droits et devoirs, entre droits individuels et droits collectifs. La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples tente notamment d’établir un équilibre entre droits individuels et droits collectifs.

>> Merci professeur Soma pour ces réponses. Vous venez de le dire, l’une des originalités de la charte africaine réside dans la reconnaissance et la consécration des droits des peuples, cette originalité fait précisément l’objet de certaines critiques, en lien avec, de façon plus générale, la praticabilité de ces droits de solidarité, certains soutiennent en effet que les droits tels que le droit des peuples sont des droits qui ne sont pas suffisamment précis, qui sont dépourvus d’une précision suffisante pour pouvoir être appliqués et mis en œuvre. Quelle est votre position sur ce sujet?

>> Eh bien concernant la critique sur la difficile application des droits des peuples, j’aurais deux observations. Je peux déjà dire que la critique peut se comprendre, mais la critique n’est pas tellement justifiée. Sur le premier point, la critique peut se comprendre parce que le droit collectif, le droit des peuples, soulève d’énormes problématiques politiques. Si nous prenons chacun des droits collectifs, chacun des droits des peuples, sa mise en œuvre est sujette à discussion politique. Par exemple, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Alors ce droit va impliquer une sécession, une scission, la mise en cause de la souveraineté ou de l’intégrité territoriale, d’une, d’un État, d’une société politique. Il y a toujours des contestations parce que les États veulent préserver la souveraineté, les États veulent toujours préserver leur intégrité territoriale. C’est la même chose pour le droit au développement. Le droit au développement amène en fait à poser des actions en faveur de certaines catégories de personnes, elle soulève, il soulève également des problèmes et notamment des problèmes de coopération internationale, parce que le droit au développement peut être interprété jusqu’à, jusque dans les rapports de coopération entre les pays riches et les pays pauvres. Là aussi, il y a des frictions internationales, il y a des incertitudes internationales, en tout cas, des problèmes qui peuvent se poser de ce point de vue. Mais ces problèmes sont politiques. Et donc chaque droit de l’homme soulève de toute façon pour sa mise en œuvre, des questionnements politiques, une problématique politique qui peut faire comprendre cette critique. Mais du point de vue juridique, la critique n’est pas justifiée, parce que ces droits des peuples ont été garantis dans la charte. Et l’organe qui est chargé de la mise en œuvre technique, juridictionnelle, de ces droits, a déjà  précisé qu’il n’existe pas de droits qui soient garantis dans la charte et qui ne puissent faire l’objet d’une mise en œuvre. Sous-entendu ici même, une mise en œuvre juridictionnelle. Et on voit très bien que dans la pratique, des organes africains de protection de ces droits collectifs, il y a de la production prétorienne, il y a une activité jurisprudentielle de protection de ces droits.

Et ici je vais évoquer deux illustrations pour montrer que ces droits sont tout à fait susceptibles d’une mise en œuvre juridictionnelle. Le premier exemple, c’est l’affaire du peuple Ogoni. Contre le Nigéria. Le peuple Ogoni est un peuple qui est basé dans le delta du Niger et qui est une zone pétrolifère. Et ce peuple Ogoni a revendiqué plusieurs droits face à l’État Nigérien qui était impliqué dans l’exploitation du pétrole avec plusieurs compagnies étrangères, et les activités d’exploitation du pétrole avaient mis en jeu certains droits collectifs, certains droits des peuples. Notamment le droit à un environnement sain, notamment le droit à l’alimentation, notamment le droit au développement du peuple Ogoni. Et le peuple Ogoni a saisi la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples pour discuter de ces questions juridiquement avec l’État Nigérien. La commission africaine dans cette décision de 2001 portant sur l’affaire du peuple Ogoni, a reconnu non seulement la qualité du peuple, à ce groupe-là qu’on appelle l’Ogoni, et a reconnu aussi la protection des droits que le peuple revendiquait, notamment le droit au développement, notamment le droit à un environnement sain, et a même condamné le Nigéria pour violation de ces droits du peuple Ogoni. Donc là on a un cas concret de mise en œuvre.

Le deuxième exemple concerne le peuple Katangay. Et là  c’est une décision qui a été rendue par la commission africaine en 1996. Le peuple Katangay vit dans une région de la République Démocratique du Congo, qui s’appelle le Katanga, et qui est une région très riche. Et déjà au lendemain de l’indépendance, c’est un peuple qui réclamait son autonomie, sa souveraineté, face à État Zaïrois. Les responsable de ce peuple ont introduit une action devant la Commission Africaine des Droits de l’Homme pour revendiquer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qui est garantit par la charte africaine, et donc ils réclamaient, une autonomie, une sécession à l’égard du peuple zaïrois. La Commission a rendu, a discuté cette affaire et a rendu une décision en 1996 qui a rétablit en fait la souveraineté du peuple du Zaïre en disant que on doit reconnaître au peuple Ogoni, au peuple du moins Katangay le droit à l’autodétermination et on doit aussi reconnaître la souveraineté du zaïre et donc le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes doit être interprété d’une façon compatible, avec la souveraineté de l’État et partie à la charte africaine des Droits de l’Homme et des peuples. Voici en quoi ces droits peuvent avoir une portée et peuvent être discutés en justice.

 

 

[1] Pacte International relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels

[2] Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966

[3] Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations raciales

[4] Convention contre la torture et les peines aux traitements cruels inhumains ou dégradants

[5] Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Etat le 1er janvier 2016)

[6] Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

[7] Convention Américaine des Droits de l’Homme

[8] Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples

[9] Convention Européenne des Droits de l’Homme

[10] Cour européenne des droits de l’homme, arrêt Soering c. Royaume-Uni du 7 juillet 1989

[11] Cour interaméricaine des droits de l’homme, arrêt Velasquez-Rodriguez c. Honduras du 29 juillet 1988

[12] Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948

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Semaine 2: L’internationalisation des droits de l’homme

Le cours présentera dans les grandes lignes l’émergence des droits de l’homme au niveau international. Il familiarisera les étudiant(e)s avec les précurseurs de la protection internationale des droits de l’homme, en donnant un aperçu des principales institutions de droit international qui ont préparé le terrain à la consécration des droits de l’homme par l’ordre juridique international. Deux de ces précurseurs, le droit international humanitaire et le droit pénal international, seront abordés au travers d’entretiens avec des intervenants externes. Le cours permettra aux étudiant(e)s de :(1) comprendre le défi qu’a représenté l’internationalisation des droits de l’homme compte tenu de la conception dominante du droit international durant la première moitié du 20ème siècle ;(2) avoir une vision plus large des institutions du droit international qui visent à protéger la personne humaine et ont un rôle complémentaire par rapport aux droits de l’homme ;(3) comprendre les différences et les affinités entre les droits de l’homme d’une part, et le droit international humanitaire et le droit pénal international d’autre part, ainsi que les rapports entre ces différents corps de droit ;(4) connaître les principales étapes de l’internationalisation des droits de l’homme. De façon plus générale, le cours donnera aux participant(e)s des éléments nécessaires pour comprendre, et évaluer de façon critique, les acquis et déficiences du système contemporain de protection internationale des droits de l’homme.

Lectures préalables :

Pour en savoir plus :

Ouvrages et articles

  • CASSIN René, La Déclaration Universelle et la mise en œuvre des Droits de l’Homme, Recueil des cours de l’Académie de droit international, La Haye 1951, II, t. 79, pp. 240-367
  • GARIBIAN Sévane, Droit pénal international, in Introduction aux Droits de l’Homme, HERTIG RANDALL M. / HOTTELIER M. (éds.), Zurich 2014
  • GLENDON Mary Ann, A World Made New – Eleanor Roosevelt and the Universal Declaration of Human Rights, New York 2001
  • ISHAY Micheline, The History of Human Rights : From Ancient Times to the Globalization Era, Berkeley 2004
  • LAUTERPACHT Hersch, The Universal Declaration of Human Rights, in The British Yearbook of International Law 1948, vol. XXV, pp. 354-381
  • MORSINK Johannes, The Universal Declaration of Human Rights – Origins, Drafting & Intent, Philadelphie 1999
  • SCHABAS William (éd.), The Universal Declaration of Human Rights – The Travaux Préparatoires, Vols. 1 à 3, Cambridge 2013
  • VERDOODT Albert, Naissance et signification de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, Louvain/Paris 1964

Sources et ouvrages de référence sur les différents précurseurs, en particulier le droit international humanitaire et le droit pénal international

Autres sources

 

INTRODUCTION :

Bonjour. La semaine passée, nous nous sommes intéressés à l’émergence des Droits de l’Homme au niveau national. Nous avons vu, c’était un long processus marqué par des mouvements et des contre-mouvements. Aujourd’hui, nous nous intéressons à l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international.

Ce processus d’internationalisation a été fondamental pour que les Droits de l’Homme deviennent ce qu’ils sont aujourd’hui, des droits subjectifs garantis par l’ordre juridique international, et aux bénéfices de mécanisme de mise en œuvre internationaux.

L’internationalisation des Droits de l’Homme a présenté de nombreux défis. Les propos suivants de Hersch Lauterpacht nous permettent d’en mesurer l’ampleur: “Any attempt to translate the idea of an international Bill or Rights of Man into a working rule of law is fraught with difficulties which disturb orthodox thought to the point of utter discouragement.” (HERSCH LAUTERPACHT, An International Bill of the Rights of Man, New York 1945)

Ces paroles ne proviennent pas d’un sceptique des Droits de l’Homme. Ces paroles proviennent d’un auteur qui a inlassablement œuvré vers l’internationalisation des Droits de l’Homme. Il a lui-même écrit une Charte Internationale des Droits de l’Homme, son International Bill of Rights of Man a paru en 1945, dans l’ouvrage dont nous venons d’entendre des extraits. En quoi une Charte Internationale des Droits de l’Homme a-t-elle dérangé la pensée orthodoxe au point de la faire paraître utopique? Comment se fait-il que ce projet ait quand même pu être réalisé? L’a-t-il été entièrement ou partiellement?

Après ce cours, vous saurez répondre à cette question. Nous allons dans un premier temps nous familiariser avec la pensée classique du droit international pour comprendre en quoi l’internationalisation des Droits de l’Homme a été un projet révolutionnaire et visionnaire. Nous allons par la suite nous pencher sur les précurseurs de la protection internationale des Droits de l’Homme.

Par précurseurs, j’entends les institutions du droit international qui ont favorisé l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international. Aujourd’hui, en particulier deux domaines sont complémentaires à la protection internationale des Droits de l’Homme. Il s’agit du droit international humanitaire[1] d’une part, et du droit pénal international d’autre part. Nous allons découvrir ces deux domaines sous forme d’entretien avec deux expertes. Vous aurez ainsi à la fin de ce cours, une vision plus large des différents domaines du droit international qui sont voués à  la protection de la personne humaine. Enfin, dans un dernier temps, nous allons retracer les principales étapes qui ont conduit à  la naissance des Droits de l’Homme au niveau international après la Deuxième Guerre Mondiale.

 

DROITS DE L’HOMME ET DROIT INTERNATIONAL

Aujourd’hui, l’idée que l’ordre juridique international protège les Droits de l’Homme est acquise pour les spécialistes du droit international. Pourtant, en 1945 encore, cette idée paraissait utopique, révolutionnaire. L’internationalisation des Droits de l’Homme a ainsi nécessité une évolution importante de l’ordre juridique international, puisque justement elle remettait en cause les fondements et les caractéristiques du droit international tel qu’il existait à la première moitié du vingtième siècle. Arrêtons-nous donc un instant sur les fondements et les caractéristiques du droit international classique. Les principes que nous allons découvrir ensemble restent pertinents aujourd’hui. Mais leur portée a été relativisée, justement pour accommoder aussi la protection internationale des Droits de l’Homme.

Le modèle classique de droit international est souvent aussi appelé le modèle westphalien. Un modèle qui vise en premier lieu à assurer la coexistence entre les États. C’est un système qui est axé sur les États. Les États sont tant les auteurs que les destinataires des règles du droit international. En effet, les États régissent leurs rapports entre eux par des instruments de nature contractuelle, les traités internationaux. Les États sont tant les auteurs que les destinataires de ces traités. Ils sont libres de conclure des traités internationaux en fonction de leur intérêts nationaux, les traités ont donc leur source dans la volonté souveraine des États. Cependant, si un État conclut un traité, déclare sa volonté d’être lié par le traité, il est tenu à son respect. Il est à  l’image d’un particulier qui conclut un contrat, et doit respecter ce contrat face à son partenaire contractuel. En tant qu’auteur et destinataire des règles du droit international, l’État est le seul sujet de l’ordre juridique international, toujours selon la pensée classique. Contrairement au droit national, au droit interne des États, l’individu n’est pas un sujet de l’ordre juridique international. Il s’ensuit que le droit international classique ne peut ni imposer des obligations aux particuliers ni leur conférer des droits, notamment des droits subjectifs, comme les Droits de l’Homme. Nous voyons donc ici un obstacle fondamental à l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international.

Axé sur l’État, l’ordre juridique international connaît un autre principe fondamental, celui de la souveraineté. La souveraineté de l’État a deux corollaires, deux principes qui en découlent, tout d’abord le principe de la non-ingérence dans les affaires internes des États, et d’autre part, le respect du domaine réservé des États. La question de savoir comment un État traite ses ressortissants sur son territoire, une question qui est absolument capitale, qui est au cœur des Droits de l’Homme, relève justement selon la pensée classique, du domaine réservé des États. Nous voyons donc que l’internationalisation des Droits de l’Homme se heurte justement au dogme de la souveraineté des États.

Un autre principe important du droit international classique, est celui de la réciprocité. Le droit international est conçu comme un ordre juridique qui régit les relations réciproques entre les États. Les États concluent des traités toujours en fonction de leurs intérêts nationaux et il y a donc, on peut dire, un réseau d’obligation de droits entre les états. Nous pouvons illustrer ce point avec un traité en matière de commerce extérieur.

Prenons un traité qui vise à libéraliser les échanges commerciaux entre deux États. Appellons-les État A et État B. L’État A a une industrie très performante dans le domaine du textile, et il veut accéder au marché de l’État B. L’État B, quant à lui, a une économie qui dépend très fortement de la viticulture et des produits viticoles. Il a donc aussi un intérêt à accéder au marché de l’État A. Nous voyons qu’il y a un intérêt réciproque de collaborer.

Les deux États concluent donc un traité international qui vise à libéraliser les échanges commerciaux, ils abolissent notamment les droits de douane, pour les textiles et pour les produits viticoles.

Maintenant que se passe-t-il si un État ne respecte pas le traité? Prenons le cas de figure où l’État A réintroduit les droits de douane pour les produits viticoles. Que va faire l’autre État?

Il peut prendre des mesures de rétorsion, il peut lui-même réintroduire des droits de douane.

Très probablement, l’industrie d’exportation dans l’État A se plaindra auprès de son gouvernement, et il y aura une incitation pour le gouvernement de l’État A de se conformer de nouveau au traité de commerce.

Nous voyons donc que des mesures de rétorsion peuvent être un outil efficace pour que les États se conforment à ce traité régi par la logique de la réciprocité. Cette logique s’applique-t-elle aussi dans le domaine des Droits de l’Homme?

Tel n’est pas le cas, nous verrons tout à l’heure pourquoi. Tout d’abord, en règle générale, un État n’a pas un intérêt direct, matériel, à ce qu’un autre État respecte les Droits de l’Homme, les Droits de l’Homme de ses propres citoyens sur son territoire. En d’autres termes, pour reprendre notre exemple, si l’État A maintenant offre de respecter les Droits de l’Homme de ses propres citoyens, ce n’est pas une concession intéressante pour que l’État B s’engage à respecter les Droits de l’Homme de ses propres citoyens sur son territoire. Il y a donc, en règle générale, peu d’incitation à conclure un traité international qui engage les États à respecter les Droits de l’Homme. Si un tel traité est néanmoins conclu, nous voyons aussi qu’il y a un problème au niveau de la mise en œuvre. Que se passe-t-il par exemple si l’État A décide maintenant de violer les Droits de l’Homme de ses citoyens? Est-ce que l’État B va réagir? Et si oui, pourrait-on admettre que l’État B, maintenant suspend ses engagements contractuels et commence à violer les Droits de l’Homme de ses propres citoyens?

On voit assez facilement que cela irait à l’encontre de l’objet et du but du traité, qui est de protéger la personne humaine, et d’autre part, ce serait une mesure de rétorsion qui serait inefficace. Elle n’inciterait pas l’État A à respecter à  nouveau les Droits de l’Homme de ses propres citoyens.

Les traités en matière de Droits de l’Homme ne sont donc pas régis par le principe de la réciprocité. Les organes de contrôle en matière des Droits de l’Homme, d’ailleurs soulignent ce point. Le Comité des Droits de l’Homme, par exemple, a relevé au sujet des traités en matière des Droits de l’Homme: « Ces instruments […] ne constituent pas un réseau d’échanges d’obligations interétatiques. Il vise à reconnaître des droits aux individus. Le principe de la réciprocité interétatique ne s’applique pas […]» (Observation générale du Comité des Droits de l’Homme nº 24 (52) du 4 novembre 1994, par. 17). Les instruments internationaux relatifs aux Droits de l’Homme ne sont pas régis par le principe de réciprocité.

Comme les instruments visant à protéger les Droits de l’Homme n’obéissent pas à la logique de la réciprocité, il faudrait aussi avoir un mécanisme différent de mise en œuvre. En effet, on ne peut pas laisser le respect de ces obligations, de ces traités, aux États seuls. Il faudrait idéalement prévoir une instance internationale de contrôle, et conférer au particulier, à la personne humaine, la capacité de saisir cette instance internationale. C’est en effet le particulier qui a un intérêt au respect du traité en matière des Droits de l’Homme, et non l’État. Cette solution, cependant, se heurte au principe que nous avons déjà mentionné. C’est un obstacle compte tenu du principe de la souveraineté des États, et de plus on s’écarte de la vision selon laquelle c’est l’État seul qui est un sujet de droit international, et non le particulier.

On comprend donc, compte tenu de ces éléments, en quoi l’internationalisation des Droits de l’Homme a été un projet révolutionnaire. Il a nécessité une mutation profonde du droit international. Le droit international a dû évoluer de l’ordre juridique axé sur les États vers un ordre juridique qui tient compte des intérêts des particuliers de la personne humaine qui protège ses intérêts. Dans la mesure où les traités internationaux en matière des Droits de l’Homme confèrent des droits au particulier, on voit que la personne humaine est devenue un sujet de droit international, donc aussi quelque chose de radical. La mutation profonde de l’ordre juridique international, que j’ai évoqué, ne s’est pas fait d’une façon miraculeuse ou soudaine après la Deuxième Guerre Mondiale. Il y a eu plusieurs précurseurs qui ont préparé le terrain, qui ont facilité l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international.

 

  1. LES PRECURSEURS

Plusieurs institutions et évolutions de l’ordre juridique international ont favorisé l’internationalisation des Droits de l’Homme. Font partie de ces précurseurs, notamment, la lutte contre la traite des esclaves et contre l’esclavage, la protection diplomatique, la protection des travailleurs, la protection des minorités, le droit international humanitaire et le droit pénal international. Attardons-nous un instant sur les quatre premiers points avant de nous entretenir avec deux expertes au sujet du droit international humanitaire et du droit pénal international.

  1. Le premier précurseur est la lutte contre la traite des esclaves et contre l’esclavage. Nous avons déjà  parlé du mouvement visant à abolir l’esclavage. La semaine passée, nous avons vu qu’il a contribué, au dix-neuvième siècle, à l’élargissement du cercle des destinataires des Droits de l’Homme. La lutte contre l’esclavage n’a cependant pas eu une dimension purement interne, elle n’a pas été confinée au sein des États, elle a aussi eu une dimension internationale. Sur le plan international, cette lutte s’est poursuivie en deux temps. Dans un premier temps, on a visé la lutte contre la traite des esclaves et dans un deuxième temps, on a visé l’abolition de l’esclavage en tant que tel.

La première étape remonte au dix-neuvième siècle, d’abord au congrès de Vienne de 1815[2], et ensuite à la conférence de Berlin de 1885. La conférence de Berlin a eu pour but de fixer les règles régissant la colonisation en Afrique. Dans ce contexte, les grandes puissances coloniales ont adopté une déclaration sur la traite des esclaves. Selon cette déclaration, la traite est interdite « Conformément aux principes du droit des gens, tels qu’ils sont reconnus par les Puissances signataires, la traite des esclaves étant interdite […] » (Art. 9 de l’Acte général de la Conférence de Berlin du 26 février 1885). Arrêtons-nous un instant sur cette citation. Interdiction conformément au droit international, ce n’est pas anodin. Souvenons-nous que le droit international classique s’intéresse principalement aux intérêts des États. Ici, nous voyons que le droit international est vu comme se préoccupant du sort des individus, l’esclavage touchant en premier lieu la personne humaine.

La lutte contre l’esclavage s’est poursuivie au vingtième siècle : c’est au vingtième siècle qu’on a franchi une étape de plus. On n’a pas visé uniquement l’interdiction de la traite des esclaves mais on a visé la suppression de l’esclavage en tant que tel. Cette lutte s’est poursuivie sous l’égide de la Société des Nations, différentes mesures ont été prises. La première mesure, était l’adoption d’une convention relative à l’esclavage qui date de 1926. Cette convention interdit, justement, pas seulement la traite des esclaves, mais également l’esclavage en tant que tel. Elle interdit en plus le travail forcé pour fermer la porte à des pratiques qui sont analogues à l’esclavage.

La lutte internationale contre l’esclavage n’a pas été motivée exclusivement par des motifs humanitaires, d’autres motifs, notamment des motifs économiques ont aussi joué un rôle. Néanmoins, c’était une étape importante, en tant que précurseur, à l’émergence des Droits de l’Homme. On voit, en effet, que le droit international se préoccupe du sort de la personne humaine. Et, l’interdiction de l’esclavage en tant que tel, a préfiguré, en quelque sorte, aussi, une norme importante en matière de Droits de l’Homme, celle, justement, visant à interdire l’esclavage et le travail forcé.

  1. À l’instar de la lutte contre l’esclavage et contre la traite des esclaves, la protection diplomatique a été un précurseur des Droits de l’Homme. La protection diplomatique est une institution qui remonte au dix-huitième et aux dix-neuvième siècles, et qui a pour but de protéger les intérêts des nationaux qui vivent à l’étranger. La protection diplomatique permet, en effet, à un État de prendre fait et cause pour un de ses ressortissants, lésé par un autre État. Illustrons ceci avec un exemple :

Un État décide de nationaliser une entreprise appartenant à un étranger, et ceci sans aucune compensation.

La personne lésée essaye d’obtenir réparation au sein de l’État hôte mais sans aucun succès.

Elle s’adresse, par la suite, à son État national, elle lui demande de lui accorder la protection diplomatique.

Si l’État national est d’accord, il peut faire valoir, d’une façon indirecte, le préjudice subi par son ressortissant à l’égard de l’État hôte.

J’ai dit indirectement, pour la raison suivante : souvenons-nous que selon le droit international classique, c’est l’État qui est le principal sujet de droit international, de plus, autre principe cardinal, celui de la souveraineté de l’État. En vertu de ce principe, le préjudice subi par un particulier ne pouvait pas directement fonder la responsabilité de l’état hôte. Les intérêts de la personne lésée ne pouvaient être appréhendés que de façon indirecte, à travers l’État national. Les internationalistes du dix-huitième et du dix-neuvième siècles ont eu recours à une fiction. En faisant valoir le préjudice subi par son ressortissant, l’État fait valoir son droit propre, et non celui de son ressortissant. La Cour Permanente de Justice Internationale a confirmé ces théories dans l’affaire Mavrommatis. Elle y relève ce qui suit : « En prenant fait et cause pour l’un des siens, en mettant en mouvement, en sa faveur, l’action diplomatique ou l’action judiciaire internationale, cet État fait, à vrai dire, valoir son propre droit, le droit qu’il a de faire respecter, en la personne de ses ressortissants, le droit international » (CPJI, Affaire concessions Mavrommatis en Palestine, 30 août 1924, p. 12). Comme l’État national fait valoir son propre droit, et non celui de son ressortissant, la protection diplomatique est un droit discrétionnaire de l’État. L’État national est donc libre d’accorder ou non la protection diplomatique. Il décide souverainement s’il veut prendre fait et cause pour son ressortissant, ceci en fonction de ses intérêts nationaux.

Nous voyons donc que la protection diplomatique reste encore fortement ancrée dans le paradigme westphalien du droit international. À cet égard, elle diverge fortement de la protection internationale des Droits de l’Homme telle que nous la connaissons aujourd’hui. Quelle a donc été la signification de la protection diplomatique pour l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international? La protection diplomatique a en effet permis de créer un standard minimum du traitement des étrangers. Font partie de ces standards minimaux, notamment, des garanties aussi fondamentales comme le droit à la vie, l’interdiction de la torture, l’interdiction du déni de justice, le droit à un procès équitable, et aussi la garantie de la propriété. Nous retrouvons en grande partie ces principes dans le domaine des Droits de l’Homme. On voit donc que la protection diplomatique a permis de cristalliser certaines normes, qui, aujourd’hui, font partie des Droits de l’Homme.

  1. Le droit international ne s’est pas seulement préoccupé des intérêts des personnes vivant à l’étranger, il s’est aussi saisi d’une autre catégorie de personnes, des travailleurs. La protection internationale des travailleurs remonte à la fin de la Première Guerre Mondiale, au traité de Versailles de 1919[3]. Elle a été fondée sur la conviction que le travail ne doit pas être considéré simplement comme une marchandise ou un article de commerce, ou, pour le dire d’une façon plus succincte, en anglais, labor is not a commodity.

La protection internationale des travailleurs ne s’est fondée pas seulement sur des considérations humanitaires mais aussi sur un autre motif. Le but était aussi d’assurer la stabilité et la paix qui passe par la justice sociale. Il faut voir la protection internationale des travailleurs aussi dans son contexte historique. Le traité de Versailles date de 1919, on est donc deux ans après la Révolution d’octobre en Russie, et les États partis voulaient aussi se prémunir contre des mouvements révolutionnaires.

Le traité de Versailles énonce d’une façon assez précise les standards qu’il faut respecter, notamment la liberté syndicale, l’interdiction du travail des enfants, le principe de l’égalité salariale pour les deux sexes et aussi, le droit à un salaire qui procure un niveau de vie suffisant. Au niveau institutionnel, le traité de Versailles a fondé une organisation internationale qui est vouée à la protection des travailleurs. Il s’agit de l’Organisation Internationale du Travail, l’OIT, qui a son siège à  Genève.

Pendant la période d’entre-guerres, de nombreuses conventions relatives à la protection des travailleurs ont été adoptées sous l’égide de l’OIT. Ces conventions ont préparé le terrain pour l’émergence d’une catégorie spécifique des Droits de l’Homme, les droits économiques et sociaux avec lesquels nous allons nous familiariser dans la quatrième semaine de ce cours. Les conventions adoptées sous l’égide de l’Organisation internationale du travail ont principalement préparé le terrain pour la consécration de quelle catégorie des Droits de l’Homme ? Les droits économiques, sociaux et culturels.

Ce qui a aussi été significatif, c’est que sous l’égide de l’OIT, on a prévu un mécanisme international de contrôle du respect de ces normes de travail. Ce mécanisme international a fait œuvre de pionnier et a préparé le chemin vers l’émergence de mécanismes internationaux de surveillance dans le domaine des Droits de l’Homme.

  1. Outre les travailleurs, les États vainqueurs de la première guerre mondiale se sont aussi intéressés à une autre catégorie de personnes, les minorités nationales. Comme pour la protection des travailleurs, il y avait des considérations, derrière, qui concernaient l’assurance de la paix, de la stabilité. En effet, la cause nationale était vue comme un grand facteur d’instabilité, comme source de conflits.

Après la Première Guerre Mondiale, la carte de l’Europe a été redessinée : Sur le territoire des anciens Empires, l’Empire austro-hongrois et l’Empire ottoman, de nouveaux états ont été créés en application du Droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes. Peut-être, paradoxalement, on s’est donc fondé sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, on a vu l’émergence ou la création d’États qui étaient fortement hétérogènes du point de vue ethnique.

Pour des raisons stratégiques, géographiques, et autres, historiques, il n’était en effet pas possible de créer des États-nations, homogènes d’un point de vue ethnique. Nous nous retrouvons donc dans une région qui ressemble à un patchwork, du point de vue de la composition de la population, et on craignait que la question nationale, le traitement des minorités, soit justement source de conflits et d’instabilité dans la région. Pour cette raison, on a mis sur pied un système visant à protéger les minorités sous l’égide de la Société des Nations. Ce système se fondait sur une série de traités conclus avec des nouveaux États. Nous les voyons affichés sur la carte.

Il existait, en effet, deux séries de traités, 14 États furent concernés. Une première série de traités visait la Tchécoslovaquie, la Grèce, la Roumanie, la Yougoslavie, l’Autriche, la Bulgarie, la Hongrie, la Turquie et la Pologne.

Une deuxième série d’instruments concernait l’Albanie, l’Estonie, la Finlande, la Lituanie et la Lettonie[4].

Le régime de la protection des minorités a été complexe. Sans entrer dans les détails, trois points me paraissent pertinents pour notre cours. Premièrement, les traités qui visaient la protection des minorités ont consacré plusieurs droits pour les minorités. Vous avez lu pour aujourd’hui le Traité conclu avec la Pologne[5]. Ce traité a servi de modèle aux autres traités de minorités. Il est parfois, aussi, appelé le petit traité de Versailles. Si vous avez parcouru ce traité, on y voit notamment le droit à  la vie, le droit à la liberté, et un principe cardinal, celui de l’interdiction des discriminations et raisons de la langue, de la race et de la religion. Nous l’avons déjà vu, l’interdiction de la discrimination est un principe cardinal en matière de Droits de l’Homme. Il y a par la suite, aussi, des droits comme la liberté religieuse, la liberté de langue et des droits liés à l’instruction qui sont particulièrement pertinents pour les minorités. C’est aussi intéressant, vous l’avez peut-être vu, dans l’article un du traité, on énonce, en fait, que ces droits ont le statut de loi fondamentale au sein des États. Ils priment donc sur toute autre règlementation nationale contraire.

Deuxième point important, nous le trouvons à l’article 12 du traité. En effet, selon ces dispositions, en souscrivant à ce traité, la Pologne a accepté que les obligations qui sont consacrées constituent des obligations d’intérêt international, qui sont placées sous la garantie de la société des nations. Cela n’est pas anodin : souvenons-nous que selon le droit international classique, le système westphalien, la question de savoir comment l’État traite ses ressortissants relève de son domaine réservé. Alors, ici, on nous dit que le traitement des minorités, donc qui sont des ressortissants de l’État, est une préoccupation du droit international.

Troisième point important, qui est lié au deuxième : les traités ont aussi prévu un mécanisme de mise en œuvre. Vous avez lu, pour aujourd’hui, l’avis consultatif qui concernait le traité conclu avec la Pologne et qui portait sur le traitement de la minorité allemande. On voit, ici, assez bien exposé le mécanisme de mise en œuvre. Dans un premier temps, la problématique était portée à l’intérêt de la société des nations par une pétition. Comme par la suite on n’a pas trouvé un règlement de ce différend, c’est la cour permanente de justice internationale qui a été saisie. Elle a rendu un avis consultatif, un avis qui lui a permis de clarifier la situation. La compétence de la cour permanente de justice internationale est aussi prévue à l’article 12 du traité qui stipule clairement qu’il s’agit d’un différend de nature internationale. Nous voyons, donc, de nouveau, affirmé ce principe que ce n’est pas une affaire purement interne aux États. C’est intéressant de voir dans l’avis consultatif que la Pologne a justement avancé l’argument que c’était une affaire interne. L’avis consultatif concernait la question de la nationalité : les Allemands, au fond, ne se voyaient pas octroyer la nationalité polonaise et étaient donc traité comme des étrangers[6]. La Pologne faisait valoir comme ils étaient des étrangers, ils n’étaient pas une minorité nationale, ils n’étaient pas protégés par le traité. Et c’était intéressant de voir que la Cour Permanente de Justice Internationale a interprété d’une façon large ce traité et a dit clairement qu’ici on a une question de préoccupations internationales, question qui relève du champ d’application du traité.

Nous avons vu que le traité en matière de minorités instaure un mécanisme international de contrôle. Ces mécanismes ont, comme dans le cas de la protection internationale des travailleurs, préfigurés les mécanismes internationaux de surveillance dans le domaine des Droits de l’Homme.

Si nous faisons une synthèse à ce point, nous avons vu quatre précurseurs en matière des Droits de l’Homme. Nous avons vu qu’ils étaient importants pour l’émergence des Droits de l’Homme de façon différente. Tout d’abord, ils ont érigé certaines problématiques qui concernent la personne humaine en une préoccupation de l’ordre juridique internationale. Ensuite, ils ont permis de cristalliser le contenu des futures normes en matière des Droits de l’Homme. Et troisièmement, ils ont relativisé la souveraineté étatique, aussi par le fait qu’ils ont prévu des mécanismes de contrôle internationaux. Nous allons, dans les deux séquences à venir, encore examiner ensemble deux autres précurseurs, le droit international humanitaire et le droit pénal international. Nous verrons que leurs significations pour l’émergence des Droits de l’Homme, au niveau international, a été semblables à l’effet des précurseurs que nous venons de voir jusqu’à présent.

 

LES PRECURSEURS : LE DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE : ENTRETIEN AVEC GLORIA GAGGIOLI

Nous nous trouvons au Musée de la Croix-Rouge. Je suis ici avec Gloria Gaggioli.

>> Bonjour.

>> Gloria, bonjour. Vous êtes conseillère juridique au CICR, vous êtes aussi docteur en droit de l’Université de Genève. Votre recherche a porté sur la relation entre les Droits de l’Homme et le droit international humanitaire[7] à la lumière du droit à la vie. Vous connaissez donc très bien les deux domaines : Droits de l’Homme et droit international humanitaire, et je suis ravie que vous ayez accepté de répondre à quelques questions.

>> Merci pour l’invitation.

>> Avec plaisir.

>> Une première question que j’aimerais vous poser, c’est au fond, qu’est-ce qu’on entend par droit international humanitaire?

>> Alors, le, le droit international humanitaire qu’on appelle aussi DIH ou droit de la guerre et droit des conflits armés est en fait une branche du droit international public. C’est une branche qui contient des règles visant à apporter des solutions aux problèmes humanitaires que l’on rencontre dans des situations de conflits armés[8], qu’ils soient internationaux ou non-internationaux. Donc, le droit international humanitaire ne doit pas être confondu en fait avec ce que l’on appelle le jus ad bellum. C’est-à-dire qu’il ne règlemente pas les conditions dans lesquelles les États peuvent entrer en guerre. Au contraire, il s’attache à apporter quelque peu d’humanité, dirons-nous, dans la guerre.

Ensuite, on, on distingue en fait, plusieurs branches, quand on parle de droit international humanitaire. Il y a le droit de Genève et le droit de La Haye. Le droit de Genève en fait apporte une protection aux victimes des conflits armés. Alors, qu’est-ce qu’on entend par victimes? Ça peut être des civils, ça peut être aussi des combattants qui sont hors de combat par blessure ou maladie, ou qui se retrouvent prisonniers de guerre. Quand on parle par contre du droit de La Haye, ça règlemente les méthodes et les moyens de guerre.

>> Mm-hm.

>> Donc, il y a toute une série de méthodes de, de, en période de conflits armés qui sont interdites. Par exemple, le fait d’attaquer des civils, c’est complétement interdit par le droit international humanitaire. Chaque attaque doit être dirigée contre des objectifs militaires. Mais il y a aussi des moyens de guerre qui sont interdits. Donc, les moyens de guerre sont des armes.

>> Mm-hm.

>> Par exemple, on peut penser aux armes chimiques exactement, aux armes biologiques qui vont être complétement interdites. Maintenant, pour ce qui est des sources du droit international humanitaire, eh bien, il y a des sources aussi bien conventionnelles que coutumières. Parmi les sources conventionnelles, les plus connues sont les Conventions de Genève et leurs protocoles additionnels dont nous avons quelques exemplaires ici. C’est un peu la bible du droit international humanitaire.

>> Mm-hm.

>> Mais il y aussi des règles coutumières. Alors, les règles coutumières sont non écrites, mais on arrive à les trouver par le biais de la pratique des États qui est acceptée par ces États comme étant le droit. Et pour finir, je dirais que le droit international humanitaire est souvent vu comme un compromis entre deux grands principes : le principe de nécessité militaire et le principe d’humanité. Et le principe de nécessité militaire signifie qu’au fond, les mesures qui vont pouvoir être prises par les belligérants en période de conflits armés ne sont que les mesures qui sont conformes au droit international humanitaire, et qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs de la guerre, à savoir la soumission totale ou partielle de l’ennemi. Ensuite, le principe d’humanité signifie qu’au fond, il ne soit pas nécessaire d’avoir des, de d’impli, enfin d’in, d’infliger des souffrances, des blessures ou des destructions qui vont aller au-delà de l’objectif de la guerre.

>> Dans le cas de ce cours, nous nous intéressons au droit international humanitaire, essentiellement en temps que précurseur des Droits de l’Homme. Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots à ce sujet? En quoi peut-on dire que le droit international humanitaire a préparé le terrain pour l’émergence des Droits de l’Homme?

>> Alors, c’est une question complexe, parce que au fond, le droit international est un précurseur des Droits de l’Homme, oui. Et ce, je dirais pour deux raisons, probablement parce que le droit international humanitaire est déjà beaucoup plus ancien que le droit international des Droits de l’Homme. Il faut savoir que le droit international humanitaire est l’une des premières branches du droit international public. Hugo Grotius, l’un des pères fondateurs du droit international public s’intéressait déjà au droit international humanitaire. Parce qu’au fond, tous les peuples se sont fait la guerre, et ont dû finalement à avoir des règles pour règlementer ce jeu, entre guillemets. Donc, c’est un précurseur dans ce sens-là, au sens chronologique.

>> Mm-hm.

>> Mais c’est aussi un précurseur au fond, parce qu’il y a un certain nombre de règles qui sont communes au droit international humanitaire, et au droit international des Droits de l’Homme. Cela s’explique par le fait que ces deux corps de droit international ont un objectif commun, à savoir la sauvegarde de la vie, de la sécurité et de la dignité des personnes humaines. Donc, au cœur de ces deux corps de droit international, on trouve vraiment, vraiment la protection de l’être humain. Ça, c’est un grand point commun. Donc, si vous prenez par exemple, l’Article trois commun aux quatre Conventions de Genève[9], vous allez trouver toute une série de, de protection élémentaire que vous retrouverez également au droit de l’homme. Par exemple, vous avez la protection de la vie de, des personnes qui ne participent pas, ou qui ne participent plus directement aux hostilités. Vous allez avoir l’interdiction de la torture, des traitements cruels ou dégradants. Vous allez avoir l’interdiction des condamnations suite à un procès inéquitable, l’interdiction de la discrimination. Donc finalement, tous ces, tous ces, ces droits qui font partie aujourd’hui des Droits de l’Homme ont été déjà  inclus dans les Conventions de Genève et les Protocoles Additionnels, avant même l’émergence des premiers traités de, de droit international des Droits de l’Homme.

Donc, je dirais précurseur, oui, mais il ne faut pas oublier cependant que droit de l’homme et droit international humanitaire restent deux corps de droit qui sont tout à fait distincts. Ils se sont développés à des époques distinctes, mais aussi dans des sphères différentes. Si on regarde le droit international humanitaire, en fait c’est un droit qui a été fait par des militaires et pour des militaires. Un bon exemple de cela est le Code Lieber de 1863[10] qui a été développé par le professeur Lieber avec des militaires de l’époque pour donner des instructions aux forces armées lors de la Guerre Civile Américaine. Et ensuite, c’est, ce code Lieber a été proclamé par le Président Lincoln. Donc, on voit vraiment qu’à la base, c’est vraiment les militaires qui forgeaient ce droit international humanitaire.

Le droit international humanitaire a ensuite été codifié au dix-neuvième siècle, et vraiment dans la sphère du Mouvement International de la Croix-Rouge, et du Croissant-Rouge dont Henri Dunant est l’un des pères fondateurs. Donc, Henri Dunant qui a écrit Un souvenir de Solferino à  partir duquel nous avons eu le développement du mouvement international de la Croix-Rouge, les premiers traités de droit international humanitaire.

Donc, si on regarde par contre en Droits de l’Homme, c’est toute une autre origine. Les Droits de l’Homme se sont développés suite aux philosophies des Lumières, et finalement, l’émergence des traités de Droits de l’Homme est apparue au vingtième siècle, après la Seconde Guerre Mondiale, et plutôt dans la sphère des Nations Unies.

>> Vous l’avez dit, le droit international humanitaire et les Droits de l’Homme sont aujourd’hui considérés comme deux branches de droits distinctes. Vous l’avez aussi évoqué, des ressemblances et des différences entre les deux corps de droit. Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots de plus à  ce sujet?

>> Oui, c’est vrai. Il y a toute une série de, de ressemblances et de différences[11]. Alors, parmi les ressemblances, nous en avons effectivement déjà  mentionné quelques-unes, mais je soulignerais l’objectif fondamental des Droits de l’Homme et du droit international humanitaire qui est de sauvegarder la vie et la diginité des personnes humaines. Donc en fait, on peut dire que c’est vraiment le principe d’humanité qui est commun à ces deux corps de droit. Maintenant, il y a beaucoup de différences entre ces deux corps de droit. Et j’en veux pour preuve par exemple, que lorsque l’on regarde les champs d’applications du droit international humanitaire et des Droits de l’Homme, on constate toute une série de différences. Je vais prendre trois exemples.

Premièrement, le champ d’application situationnel. Le droit international humanitaire s’applique uniquement en période de conflits armés, qu’il soit international ou non-international. Les conflits armés internationaux sont ceux qui opposent un ou plusieurs États, ou alors les guerres de libération nationale. Tandis que les conflits armés non-internationaux opposent un État à un groupe armé organisé non étatique, ou alors à plusieurs groupes armés organisés non étatiques entre eux. Si on regarde par contre les Droits de l’Homme, ils s’appliquent dans toutes les situations, que ce soit en temps de paix, mais aussi en situation, d’autres situations de violence, que ce soit des troubles internes ou des tensions intérieures, et en période de conflit armé. Donc, les Droits de l’Homme s’appliquent dans toutes les situations, sous réserve bien évidemment de dérogations, lorsqu’il y a une menace à la vie de la nation. Donc, au niveau situationnel, déjà  on a une grande différence entre les deux corps de droit.

Maintenant, si on regarde au niveau du champ d’application personnel. Les entités qui vont être liées par ces deux corps de droit sont aussi différentes. En droit international humanitaire, les entités qui sont liées sont toutes les parties belligérantes, que ce soit les États, mais aussi les groupes armés non étatiques. Par contre, en Droits de l’Homme, l’acteur principal c’est l’État. Donc, c’est l’État qui a des obligations en matière de Droits de l’Homme. Ce ne sont pas des acteurs non étatiques. Pas seulement les États ont l’obligation de respecter le droit international humanitaire.

Bien évidemment, il y a certaines exceptions. Lorsque par exemple, un groupe armé non étatique exerce un contrôle territorial, et de fait a des fonctions en vérité gouvernementales, eh bien on peut dire qu’il a des responsabilités en matière de Droits de l’Homme, mais il ne s’agit pas de droits en tant que tels.

Un troisième et dernier exemple, c’est le champ d’application matériel. Donc, on a vu tout à l’heure avec l’article trois Commun aux Conventions de Genève, qu’il y a certains droits qui sont communs aux Droits de l’Homme et au droit international humanitaire, tels que l’interdiction de la torture, mais il y a aussi toute une série de droits qui sont complétement différents. Si on prend en droit international humanitaire, vous avez par exemple toutes les règles qui ont trait à la conduite des hostilités. Eh bien vous ne trouverez pas des règles semblables en droit international des Droits de l’Homme. De même, il y a les règles sur l’emblème de la Croix Rouge, quand est-ce qu’on emploie la Croix Rouge, il y a donc tout une série de règles lorsqu’on parle du statut de combattant, ou du statut de prisonnier de guerre, qui n’existe tout simplement pas en droit international des Droits de l’Homme. Et c’est la même chose quand on regarde les Droits de l’Homme. Donc par exemple la liberté d’expression, la liberté d’association, le droit de vote, ce sont des droits typiques des Droits de l’Homme, qui vous ne retrouvez pas en droit international humanitaire.

>> Les exemples que vous nous avez donnés montrent bien donc les ressemblances, les différences entre les deux branches de droit, et là, avec cette question, je vais toucher au cœur de votre recherche, de votre thèse de Doctorat, comment peut-on définir d’une façon plus large les rapports entre les rapports entre le droit international humanitaire d’une part, et les Droits de l’Homme?

>> Alors la première chose que je dirais sur la relation entre Droits de l’Homme et droit international humanitaire c’est que il s’agit de deux branches du droit international qui sont complémentaires. Elles sont complémentaires à  plusieurs égards. Premièrement, on a vu que le droit international humanitaire ne s’applique qu’en période de conflit armé. Ça veut dire que dans toutes les autres situations de violence qui n’atteignent pas le degré de conflit armé, nous avons besoin du droit international des Droits de l’Homme. De même en temps de paix, c’est le droit international des Droits de l’Homme qui va s’appliquer. Donc on voit une complémentarité à ce niveau-là. Mais il y aussi une complémentarité dans les conflits armés. En période de conflit armé, le droit international des Droits de l’Homme peut compléter utilement le droit international humanitaire, par exemple, à travers les droits économiques sociaux et culturels, le droit à l’eau, le droit à une nourriture suffisante, qui vont être tout à fait pertinents dans des situations par exemple d’occupation militaire, ou alors de conflits armés non-internationaux. Ensuite, il y a certains droits qui sont communs aux Droits de l’Homme, et au droit international humanitaire, comme l’interdiction de la torture, le droit à un procès équitable, et là, la pratique des organes de supervision des Droits de l’Homme qui est tout à  fait abondante et riche va permettre d’interpréter ces mêmes termes et ces mêmes droits en droit international humanitaire. Donc on a une grande complémentarité. Et la Cour Internationale de Justice s’est aussi prononcée sur la question de la relation entre Droits de l’Homme et droit international humanitaire, et l’affaire, disons l’avis principal à cet égard est l’avis sur Licéité de la Menace ou de l’Emploi de l’Arme Nucléaire datant de 1996[12]. Et dans cet avis, la Cour Internationale de Justice a souligné que le droit international humanitaire constitue une lex specialis, donc un droit spécial, par rapport au droit international des Droits de l’Homme. Alors qu’est-ce que ça veut dire? Ma foi, il y a des controverses autour de cette qualification de lex specialis par rapport au droit international humanitaire. En tout cas, ça met en exergue le fait que le droit international humanitaire est le droit premier en période de conflit armé, parce qu’il a été conçu spécialement pour régir des situations exceptionnelles que sont les conflits armés. Ça ne veut pas dire cependant que la Cour Internationale de Justice ait exclu la pertinence du droit international des Droits de l’Homme. Bien au contraire, dans cet avis elle a interprété en fait le droit international humanitaire à la lumière des Droits de l’Homme. Et dans plusieurs affaires subséquentes, elle a démontré que les Droits de l’Homme s’appliquaient en période de conflit armé, et complétaient la protection offerte par le droit international humanitaire.

>> Vous l’avez dit, parfois les opinions sont controversées, quels sont les rapports entre ces deux corps de droit, si nous prenons un exemple très concret, la lutte contre le terrorisme. Là on a vraiment vu, vous savez, une question controversée. Alors, quand les États prennent des mesures pour lutter contre le terrorisme, sont-ils liés par les Droits de l’Homme, par le droit international humanitaire, et comment ces deux branches interagissent au fond?

>> Eh bien, à cette question, on ne peut qu’apporter une réponse qui doit être nuancée. Parce que tout va dépendre de la situation. Les États peuvent prendre toute une série de mesures pour lutter contre le terrorisme. Certaines de ces mesures vont être prises en temps de paix, par exemple, ils vont geler les avoirs de personnes qui sont présumées terroristes, ils vont peut-être capturer, arrêter ces personnes, les poursuivre pénalement et les mettre en détention. Toutes ces mesures sont en fait des mesures de maintien de l’ordre public, qui sont couvertes par le droit international des Droits de l’Homme, par le droit national, mais pas par le droit international humanitaire.

Cependant, la lutte contre le terrorisme peut mener à un conflit armé véritablement. Donc si on prend par exemple le cas du 11 septembre 2001, donc une attaque terroriste de grande ampleur, eh bien les États-Unis d’Amérique, qui ont été victimes de cette attaque terroriste, ont réagi en entrant en guerre en fait avec l’Afghanistan qui était sous le régime des Talibans. Donc là vous aviez véritablement un conflit armé international entre les États Unis d’Amérique d’une part, et l’Afghanistan des Talibans d’autre part. Donc c’était un conflit armé qui était couvert par les règles de droit international humanitaire, que sont les conventions de Genève notamment. Et par exemple, les personnes qui étaient capturées dans le cadre de ce conflit armé devaient être protégées par les règles de droit international humanitaire, que ce soit les règles concernant les prisonniers de guerre, quand il s’agissait de combattants réguliers, ou alors les règles concernant les internés civils.

Il y a aussi toute une série de conflits armés qui sont des conflits armés qui sont de nature interne, ou non-international. Où vous allez avoir un gouvernement en place, qui va faire face à un mouvement insurrectionnel, à des insurgés, un groupe armé organisé, et ils vont qualifier ces insurgés de « terroristes ». Donc ça, c’est une qualification qui est souvent politique, et qui ne doit pas faire croire que le droit international humanitaire ne s’applique pas. Le droit international humanitaire en fait repose sur une qualification qui est basée sur des faits. Donc il faut voir dans les faits s’il y a bien intensité de la violence entre un État d’une part, par exemple, et un groupe armé organisé d’autre part. Le fait que le groupe armé des insurgés soit qualifié de terroriste de la part du gouvernement ne change absolument rien.

Et enfin, un dernier point sur la question de cette lutte contre le terrorisme, il y a la terminologie de guerre contre le terrorisme, de guerre mondiale contre le terrorisme qui a été parfois employée. Et donc certains ont prétendu que au fond il y avait une guerre sur le plan planétaire contre le terrorisme international. Eh bien, du point de vue du CICR, une telle guerre mondiale contre le terrorisme n’existe pas. Il faut au fond regarder au cas par cas les situations de violence, et voir si elles correspondent à des conflits armés internationaux ou à des conflits armés non-internationaux.

>> Donc c’est un concept juridique, n’est-ce pas?

>> Exactement.

>> Et vous avez mentionné le CICR, et dès qu’on parle de conflit armé on entend parler du CICR. Est-ce que vous pourriez nous dire en quelques mots quel est le rôle du CICR, ses fonctions principales?

>> Eh bien, le CICR a un rôle clé en matière de mise en œuvre du droit international humanitaire. Le mandat du CICR en fait, repose déjà  sur les Conventions de Genève et les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève. Donc la communauté internationale a vraiment voulu donner un mandat au CICR en matière de droit international humanitaire. Donc les activités du CICR sont diverses et variées, hein. Le CICR est en fait une organisation qui est purement humanitaire, qui est neutre, indépendante et impartiale, et donc les activités humanitaires visent à la protection d’une part, et à l’assistance d’autre part, des victimes des conflits armés, mais aussi des autres situations de violence.

Alors parmi les activités de protection du Comité International de la Croix Rouge, on peut penser premièrement aux visites des détenus. Donc le CICR va en fait envoyer ses délégués à travers le monde pour ouvrir les portes des prisons, aller à la rencontre des détenus, et voir quelles sont leurs conditions de détention, quels sont leurs traitements, et ensuite, intervenir auprès des autorités détentrices au sein d’un dialogue confidentiel pour trouver des solutions concrètes pour les détenus. Ça c’est un type d’activité de protection très connu du Comité International de la Croix Rouge. Mais on peut penser également au rétablissement des liens familiaux. Suite à un conflit armé, parfois les familles sont dispersées. Et donc des enfants disparaissent, là vous avez derrière vous toute une série de cartes, où l’on voit des enfants qui ont perdu leurs parents, du fait du conflit armé, soit ils ne les retrouvent pas, soit les parents sont décédés, et en fait le CICR va chercher à rétablir les liens entre ces enfants et leurs parents, ou alors des proches qui vont pouvoir s’occuper d’eux. Donc toutes ces activités de rétablissement des liens familiaux sont faites par le CICR, mais bien sûr en collaboration avec les sociétés nationales de la Croix Rouge et du Croissant Rouge. Ensuite, le CICR procède aussi à des activités en matière d’assistance. Donc le CICR va par exemple apporter de la nourriture, des soins de santé, aux victimes des conflits armés. Et enfin, le Comité International de la Croix Rouge[13] travaille pour la promotion, la clarification, et le développement du droit international humanitaire.

>> C’est en partie aussi votre rôle n’est-ce pas? En tant que conseillère juridique.

>> C’est juste, oui.

>> Donc je vous remercie, c’était vraiment passionnant de vous écouter, et nous avons maintenant vraiment une vision assez globale du droit humanitaire.

>> Merci beaucoup.

 

LES PRECURSEURS : LE DROIT PENAL INTERNATIONAL : ENTRETIEN AVEC SEVANE GARIBIAN

On voit que le musée de la Croix-Rouge aborde aussi le droit pénal international. Nous nous trouvons, ici, dans la salle des témoins. Nous voyons, derrière nous, Carla Del Ponte, l’ancien procureur au Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie. Et, j’ai, ici, avec moi, Sévane Garibian. Bonjour Sévane.

>> Bonjour Maya.

>> Sévane, vous être maître assistante à l’Université de Genève et boursière d’excellence. Vous êtes aussi chargée d’enseignement à l’Université de Neuchâtel. Et vos recherches ont justement porté et portent sur le droit pénal international. Dans votre thèse de doctorat, vous avez analysé les crimes contre l’humanité au regard des principes fondateurs de l’État moderne

>> Tout à fait.

>> Merci beaucoup d’être ici avec nous et de répondre à quelques questions sur le droit pénal international.

>> Merci à vous pour l’invitation.

>> Une première question, tout à fait, question de base : qu’est-ce que c’est au fond le droit pénal international?

>> Alors, le droit pénal international c’est en réalité une discipline récente dont la formation, puis le développement, ont été laborieux, difficiles, complexes, et ceci du fait de la particularité de son objet. Alors, qu’est-ce que l’objet du droit pénal international? Je pense vraiment que c’est ce qui fait sa spécificité. L’objet de cette discipline c’est au fond l’incrimination, donc la définition, la répression, mais aussi la prévention de crimes pas comme les autres. Alors, c’est quoi ces crimes pas comme les autres? En réalité, il s’agit de crimes qui ont tous une ampleur particulière, une gravité particulière. Alors, lorsque l’on parle d’ampleur particulière, c’est qu’il s’agit pour la plupart de crimes de masse, commis par un État, donc on parle souvent de crimes d’État, ou de crimes de masse ou crime étatique de masse.

Donc vous voyez d’emblée l’ampleur de la situation criminelle. La gravité, ensuite, parce qu’il s’agit dans tous les cas de figure, on en parlera peut-être plus tard, au fond, de violations graves des droits les plus fondamentaux de la personne humaine. Donc, tant du point de vue de leur ampleur que du point de vue de leur gravité, ce sont des crimes pas comme les autres et parce qu’ils ne sont pas comme les autres, on part du postulat qu’ils touchent, que leur commissions, leurs réalisations, touchent la communauté internationale dans son ensemble. Au fond, la question de ces crimes, les plus graves, concerne tout le monde, touche tout le monde. C’est ça l’idée, en fait, de cet objet tellement singulier du droit pénal international. Alors, si je souligne cet aspect, cet aspect, vraiment, du particularisme de l’objet de cette discipline, c’est aussi pour vous dire que du coup, par ricochet, la question du traitement juridique de ces crimes est également complexe parce qu’elle vient révolutionner, basculer complétement les conceptions traditionnelles que l’on a, à la fois du droit pénal, du droit de punir, à la fois de l’État, et à la fois de la notion de justice. Parce que le traitement juridique de ces crimes, donc d’une ampleur particulière, d’une gravité particulière, va créer une situation où il va falloir créer de toutes pièces, en fait, inventer de toutes pièces de nouveaux mécanismes judiciaires qui transcendent complétement l’État dans sa souveraineté.

Comme vous le savez, Maya, on associe le droit de punir, le monopole du droit de punir, à la souveraineté de chaque État. Chaque État a le monopole de punir les crimes commis sur son territoire ou contre ses citoyens ou par ses citoyens. Or, dans le cas de figure du droit pénal international, on fait exploser cette conception territoriale du droit de punir et il va s’agir de permettre à des États tiers, dans certains cas, à des États tiers ou à la communauté internationale d’intervenir dans le traitement de ces crimes si particuliers. Donc, j’aime à dire que le droit pénal international est en réalité un droit révolutionnaire, totalement révolutionnaire, qui nous permet de répondre à la question de savoir que fait-on? Que peut-on faire? Que doit-on faire lorsque l’État protecteur devient l’État criminel, c’est-à-dire lorsque l’entité qui est censée nous protéger, en tant qu’individu, eh bien, devient le bourreau, devient le criminel de masse? C’est cette rupture du contrat social, au fond, du point de vue strictement philosophique, c’est une rupture du contrat social qui fonde la société, c’est ce à quoi répond le droit pénal international.

>> Vous avez relevé, au fond, cet aspect révolutionnaire du droit pénal international, vous avez parlé d’un basculement. Est-ce que vous pourriez nous dire quand est-ce que ce basculement a eu lieu?

>> Alors, Maya, concrètement, ben, ça renvoie à la question de la naissance du droit pénal international. On estime que la naissance officielle, si j’ose dire, de cette discipline se situe en 1945. Alors, pourquoi 45? C’est l’immédiat lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, après l’ampleur des crimes nazis que nous connaissons tous, est constitué le Tribunal de Nuremberg qui n’est rien d’autre que, quand même, la première juridiction pénale internationale ad hoc. On y arrive. C’est le premier tribunal militaire, en l’occurrence, à l’époque, qui est censé appliquer ce nouveau droit pénal international, nouveau-né, et qui est élaboré, préparé, rédigé dans les, le statut du Tribunal de Nuremberg. Donc, crée en 45, et qui donnera ses jugements un an plus tard, en 46.

>> Vous avez parlé, ici, déjà, du Tribunal de Nuremberg. Aujourd’hui, quand on s’intéresse au droit pénal international, on lit, on entend beaucoup de juridictions différentes, n’est-ce pas? Tribunal Pénal International, Tribunal Pénal pour l’ex-Yougoslavie, Tribunal Pénal pour le Rwanda, est-ce que vous pourriez nous éclaircir sur les rapports entre ces juridictions?

>> Oui, bien sûr. Alors, c’est d’autant plus intéressant la question des rapports entre ces juridictions que la création de ces diverses juridictions, sur lesquelles je reviendrai dans un instant, illustre en parallèle, au fond, les différentes grandes étapes du développement du droit pénal international.

Alors, je vous ai d’abord dit que l’on situe sa naissance officielle en 45, mais il faut savoir que sa naissance est le fruit, est le résultat d’un très long processus de formation qui a connu plusieurs tentatives concrètes pour mettre au jour, mettre en lumière un nouveau droit pénal international et qui a connu de multiples échecs.

Alors, les premières tentatives concrètes remontent au lendemain de la Première Guerre Mondiale, en 1919. C’est sur la base des travaux issus de la Conférence de Paix de Paris de 1919 que va, par la suite se préparer le fameux droit de Nuremberg en 45, qui est élaboré par les alliés, en fait par les États vainqueurs, donc il s’agit des États-Unis, de la Grande Bretagne, de la France, de la Russie. On a là, au fond, le début de la première génération des juridictions pénales internationales.

Il y a trois générations de juridictions, en gros, trois catégories. La première contient Nuremberg et son immédiat successeur, dont on parle un peu moins mais qui est important, aussi, c’est le Tribunal de Tokyo, le tribunal militaire de Tokyo créé en 46. Il s’agit dans les deux cas de juridictions pénales militaires internationales ad hoc, c’est-à-dire créés pour traiter d’une situation particulière dans un temps limité, et ayant une compétence géographiquement limitée.

Suivent les deux autres juridictions pénales internationales ad hoc, celles-ci beaucoup plus connues parce que récentes, le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, créé en 93, et le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, créé en 94. Ces deux tribunaux, donc ça nous fait quatre juridictions en tout, qui constituent la première génération de tribunaux, tribunaux internationaux.

Dans les quatre cas, il s’agit de juridictions qui ont donc une compétence limitée dans le temps et dans l’espace, qui sont créées pour faire face, pour répondre à une situation d’exception et d’urgence, donc ad hoc, et qui sont fondés, ces tribunaux, sur des textes particuliers, puisque, dans le cas des deux premières juridictions, il s’agit d’un accord entre les États vainqueurs, ce qui a pu être critiqué, parce qu’on a pu entendre dire qu’il s’agit, en réalité, d’une justice des vainqueurs. Et dans le cadre des deux TPI, 93 et 94, il s’agit de juridictions créées sur des fondements de résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU, donc dans le champ du droit de l’ONU.

Deuxième génération de juridictions pénales internationales, la CPI, la Cour Pénale Internationale, créée en 98, entrée en vigueur en 2002. Là, c’est l’unique juridiction pénale que nous connaissons, internationale que nous connaissons, qui soit permanente, donc plus du tout ad hoc, qui est une compétence, qui, a priori, n’est limitée ni dans le temps ni dans l’espace, à la précision près, que sa compétence n’est pas rétroactive. C’est-à-dire, que la Cour Pénale Internationale peut se saisir d’affaires ayant trait à des crimes commis après le premier juillet 2002. C’est-à-dire après son entrée en vigueur. À partir de juillet 2002, ça entre dans son champ temporel. Avant cela, les crimes ne peuvent pas entrer dans son champ de compétences. Donc ça c’est la Cour Pénale Internationale[14]. Elle a pour particularité d’être fondée, elle, sur eh bien, un traité, au sens le plus classique du droit international public, il s’agit du traité de Rome. Donc vous voyez déjà  le changement de paradigme, le changement de perspective, la deuxième génération symbolise vraiment un tribunal qui au fond, suppose l’accord, le consentement des États, à s’y lier. Il ne s’agit plus d’un droit pénal international qui est imposé aux États, mais un droit pénal international choisi, conventionnellement choisi.

Et pour terminer, la troisième génération des juridictions pénales internationales, eh bien désigne, alors vous mentionnez tout à l’heure le Tribunal Spécial pour la Sierra Léone, le Tribunal Spécial pour l’Irak, pour le Liban, la Chambre Spéciale pour le Cambodge, pour la Bosnie et cetera, il s’agit de juridictions pénales internationales qui comme celles de la première juridiction sont limitées dans leurs compétences, et sont créées pour traiter d’un phénomène singulier dans un État du monde particulier, en revanche, leur particularité à  elles, c’est qu’il s’agit de juridictions mixtes. On les appelle les juridictions pénales internationalisées, ou mixtes, ou hybrides, parce que elles contiennent un personnel, donc des juges, concrètement, et aussi un droit applicable, qui dans les deux cas est mixte, c’est-à-dire mélange le droit pénal international avec le droit pénal interne de l’État concerné. Donc, leurs rapports, parce que, elles sont nombreuses, ces juridictions. Il s’agit de juridictions indépendantes les unes des autres, je pense que c’est l’essentiel à retenir, Maya, elles travaillent totalement indépendamment les unes des autres, en revanche on peut constater une forme de dialogue, moi j’aime bien parler de dialogue entre les juges, parce que les juges de certaines, de telle ou telle juridiction vont pouvoir se référer à la jurisprudence de leurs confrères, donc il y a une sorte d’interaction jurisprudentielle, mais informelle, et vraiment sous forme de dialogue des juges, mais en revanche statutairement parlant, structurellement parlant, et du point de vue strict de leur travail, chacune de ces juridictions est indépendante par rapport aux autres.

>> Vous avez parlé du dialogue des juges, et nous on parle aussi aujourd’hui je dirais des dialogues entre les différentes branches juridiques. Et le droit pénal international est souvent vu comme un précurseur des Droits de l’Homme, est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots à ce sujet, en quoi est-ce qu’on peut dire, le droit pénal international a vraiment donné une impulsion aux Droits de l’Homme?

>> Oui. Oui, c’est une belle image, c’est vraiment ça. J’aime bien l’image de l’impulsion. En réalité ce qui s’est passé, c’est qu’on s’aperçoit que dès les toutes premières tentatives, souvenez-vous, je vous disais que la formation du droit pénal international a été compliquée. Et dès les premières tentatives de réalisation, de concrétisation de ce droit, donc au début du vingtième, et plus spécifiquement au lendemain de la première guerre mondiale, avant d’arriver à Nuremberg en 45, eh bien on s’aperçoit que les acteurs internationaux, qui travaillent cette question de comment faire pour créer une nouvelle branche du droit, comment faire pour mettre en place une juridiction spéciale qui soit internationale pour juger des crimes d’une telle ampleur, en particulier dans le contexte de la guerre, comment faire pour poursuivre des agents d’États, des chefs d’États, c’est quelque chose de totalement nouveau, comme conception. Eh bien, dans le cadre de ces réflexions et de ces travaux, par exemple dans le cadre des travaux de 1919 auxquels je me referais tout à l’heure, donc Conférence de Paix de Paris, eh bien on va s’apercevoir que, à chaque fois qu’il s’agit de penser ce nouveau droit pénal international pas encore né, eh bien les acteurs soulignent qu’il s’agit de traiter de crimes qui ont pour particularité, une fois de plus, de constituer des violations graves, des droits de la personne humaine. Et on retrouve dans les archives de l’époque, des références aux lois de l’humanité, elles ne sont pas définies, mais on dit, ce sont des violations massives aux lois de l’humanité, qui se transforment petit à petit en droits humains, lesquels vont se transformer en Droits de l’Homme. Donc voyez qu’au cœur même de la réflexion autour de la construction d’un droit pénal international au début du vingtième, alors que le champ à strictement parler du droit international des Droits de l’Homme n’existe pas encore, eh bien on associe déjà  les questions relatives à la protection des droits humains, à celles relatives à la répression des crimes internationaux. Ça c’est d’une part.

Une autre chose à laquelle je pense, de nouveau concrètement, c’est ce qu’il se passe après 1919, dans les années 20. Alors, on a crée la Société des Nations en 1919, qui sera ensuite l’ONU, en fait, l’ancêtre de l’ONU.

>> Le précurseur.

>> Voilà, tout à fait, exactement. Dans le contexte de la création de la Société des Nations, continuent à avoir lieu les interrogations, les travaux doctrinaux sur comment consacrer un nouveau droit pénal international, on n’arrive pas à le faire, parce que c’est compliqué, ça met en péril la souveraineté des États, a priori, bon. Eh bien dans ce contexte-là ont aussi lieu des travaux que vous connaissez bien, des travaux doctrinaux majeurs sur des droits humains, futurs Droits de l’Homme, et sur la question de savoir comment est-ce qu’on peut concilier trois choses. La répression des crimes les plus graves, la sauvegarde des droits humains, futurs Droits de l’Homme, et la paix. Et la paix.

Et là on voit déjà quelque chose de fascinant, qui nous, qui sont des sujets que l’on traite aujourd’hui, qui sont des liens extrêmement étroits entre non seulement droit pénal international et Droits de l’Homme, comme vous disiez, mais aussi de ces deux disciplines avec le droit international humanitaire. Donc là aussi, dialogue, effectivement. Dialogue très fort.

>> On dirait un triangle, entre eux.

>> Oui, oui, je crois qu’on peut parler de triangle, et je crois aussi qu’il n’est pas anodin que les années 20 correspondent aussi, au moment où travaille beaucoup sur la notion d’agression, la paix et cetera en matière de situation de guerre, et puis plus tard, après Nuremberg, alors ça, quand même, j’aimerais souligner un phénomène intéressant, c’est que après l’expérience de Nuremberg en 45, jusqu’aux années 90 où on va créer les deux suivantes juridictions pénales internationales, donc les deux TPI, eh bien il y a un blanc du point de vue strictement du pénal international, un blanc. Pendant près de 50 ans, il ne se passe a priori rien. En revanche, ce qu’il se passe, c’est l’immense essor des instruments en matière de protection des Droits de l’Homme. Donc, Convention sur le Génocide de 48, droits, Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 48, Convention Européenne des Droits de l’Homme de 50, les pactes internationaux de 66, que sais-je encore, la Convention Américaine des Droits de l’Homme, 69, Charte Africaine des Droits de l’Homme, 81, donc vous voyez, durant ces 50 années de situation un peu de paralysie du droit pénal international, pendant ce temps foisonnent les textes en matière de protection des Droits de l’Homme, et ce qui va être intéressant, on en parlera peut-être tout à l’heure, c’est qu’il va y avoir une sorte de retour des Droits de l’Homme vers le droit pénal international dans les années 90, c’est-à-dire si le droit pénal international a été à l’origine des premiers travaux relatifs aux Droits de l’Homme, à leur tour, les Droits de l’Homme, une fois développés, entre 45 et les années 90, vont être eux-mêmes une source d’influence du droit pénal international.

>> Ce qui illustre bien cette idée de dialogue entre les branches, que c’est pas un dialogue dans un sens unique, c’est pas un monologue, mais il y a une réciprocité, n’est-ce pas?

>> Oui, oui, un échange, une interaction, un échange, absolument.

>> Et on voit aussi qu’il y a quand même une finalité commune, toujours de protéger, comme vous l’avez dit,

>> Absolument

>> les droits des plus fondamentaux de la personne humaine, mais il y a quand même, on considère qu’il s’agit de deux branches de droit différentes, n’est-ce pas? Il y a d’une part le droit pénal international, d’autre part les Droits de l’Homme, est-ce que vous pourriez nous esquisser les rapports entre ces branches de droit, leurs ressemblances, leurs différences? Question vaste, je le sais.

>> Question vaste mais, qui me fais sourire parce que vous me permettez, à  travers votre question, de, d’avoir en mémoire que j’aime beaucoup, qui est utilisée par deux de mes collègues, et je crois que je vais leur emprunter leur image pour vous répondre. Je pense à William Chabasse et à Paul Tavernier, qui ont écrit tous les deux sur la question du rapport en particulier entre le droit pénal international et les Droits de l’Homme, et ils utilisent cette image de faux-frères, et frères siamois. Ils disent que ces deux disciplines sont en fait des disciplines sœurs, un peu comme des frères siamois. Donc elles ont une origine commune, elles ont un lien de filiation certain, en revanche elles ont des perspectives différentes. Complétement différentes. Et elles sont amenées, en quelque sorte comme des frères et sœurs, elles sont un peu condamnées à vivre ensemble. À cohabiter, même s’il y a des différences qui les, évidemment qui les dissocient, et j’aime bien cette image-là. Alors concrètement, qu’est-ce que ça veut dire? Le point commun, vous l’avez dit tout à l’heure, c’est clairement la protection de la personne humaine. Dans le cadre, protection dans le cadre de laquelle la protection de la dignité humaine prend une place particulièrement importante. Donc ce qu’on cherche, vraiment ce qu’on vise derrière ces disciplines à terme, c’est le respect et la sauvegarde de la dignité humaine.

Qu’en est-il des différences entre ces frères siamois? Hein, on disait. Je vais, c’est évidemment une question complexe donc j’essaierai de synthétiser en soulignant peut-être simplement deux ou trois points, s’agissant de chaque discipline, qui illustrent vraiment ces différences structurelles. Alors d’abord, le droit pénal international. Qu’est-ce qu’il fait? Il met, en réalité, face à face des individus, en mettant en jeu la responsabilité pénale internationale de l’individu accusé. Dans la plupart des cas, il s’agit de toute façon de représentants d’États, soit de chefs d’États soit d’agents d’État. Bon, deuxièmement, c’est-à-dire que le droit pénal international prévoit la sanction pénale, j’insiste sur ce terme, la sanction pénale de l’accusé, le cas échéant, en lui imposant des devoirs, des obligations. Autrement dit, le droit pénal international est entièrement centré sur l’individu accusé.

À l’inverse, le droit international des Droits de l’Homme met face à  face l’individu et un État, non pas des individus ensemble. L’individu victime et l’État qui aurait abusé de ses droits, en mettant en jeu la responsabilité internationale de l’État donc vous voyez qu’on est dans une toute autre perspective. Par ailleurs, c’est ce qui nous permet de dire que le droit international des Droits de l’Homme vise la protection de l’individu en lui octroyant des droits, non pas la sanction pénale de l’individu en lui imposant des obligations.

Et pour terminer, pour faire le parallèle avec ce qu’on disait tout à l’heure, au fond le droit international des Droits de l’Homme est centré sur l’individu victime, non pas l’individu, non pas l’individu accusé. Donc, vous voyez que la philosophie au fond, l’État d’esprit sous-jacent à chacune de ces deux disciplines, par ailleurs très proches, est quand même très différent.

>> Donc, vous l’avez bien montré, il y a quand même une perspective très différente. Une fois on s’intéresse à la personne qui au fond est tenue à des obligations par le droit international, l’autre fois on s’intéresse à la personne qui est, bénéficie de droits de par le droit international. Est-ce que ces perspectives différentes, au fond, peuvent engendrer des conflits entre les deux branches, des interférences en quelque sorte?

>> C’est une très belle question parce que, alors, effectivement, conflit? Dans l’absolu, Maya, non, pas nécessairement. En plus conflit, c’est fort. Mais, c’est vrai que dans le contexte spécifique de la justice pénale internationale, vous avez raison, il y a ce que vous appelez, c’est en fait une sorte de court-circuitage, des sortes, des, ça fait des étincelles par moment, cette interaction entre les deux disciplines. Certains qualifieront ça de conflit. Je préfère pour ma part parler de problèmes de transposabilité des Droits de l’Homme au sein du droit pénal international. Alors je m’explique. Pourquoi est-ce que je parle de problème de transposabilité? Parce qu’on va s’apercevoir assez rapidement, dans les années 90, dans le cadre des travaux des deux TPI donc pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, que les juges pénaux internationaux vont avoir, systématiquement, recours aux normes du droit international des Droits de l’Homme pour, en quelque sorte, enrichir, parfois préciser, solidifier, développer le droit pénal applicable, le droit pénal international qu’ils sont censés appliquer qui est donc défini dans le statut des tribunes. Donc, il y a vraiment une sorte d’importation du droit des Droits de l’Homme dans le travail des juges pénaux internationaux.

Alors, certains de mes collègues ont souligné ce phénomène de cross fertilisation. Fertilisation, entre guillemets, réciproque si j’ose dire de, d’interactions problématiques voire conflictuelles, pourquoi? Alors, je les comprends parce que ce qu’il se passe c’est qu’au fond, on réalise que les Droits de l’Homme sont utilisés dans un État d’esprit complètement contraire à leur propre création. C’est-à-dire, initialement les Droits de l’Homme ont été créés pour limiter la répression faite à l’individu. Or là, du coup, ils sont utilisés dans le champ pénal international comme légitimation à la répression. Donc, au fond, il y a ce que Robert Rauth, par exemple, appelle un renversement des Droits de l’Homme qui de bouclier deviennent épée. Donc, on les utilise et d’ailleurs de manière, ils sont mobilisés les Droits de l’Homme, vraiment mobilisés de manière très forte dans la lutte contre l’impunité des crimes internationaux. Alors, c’est d’une extrême richesse mais c’est vrai que du coup ça pénalise les Droits de l’Homme dont on dit qu’ils deviennent pénalistes. Donc, vous vous rendez compte le hiatus. Tout à coup les Droits de l’Homme sont pénalisés, sont servis pour, utilisés pour la justification de la répression. Alors, moi j’ai une expression que j’utilise souvent pour désigner ce phénomène. Je parle du Human Rights Turn. Il y a un tournant des Droits de l’Homme vraiment spécifiquement dans les années 90 pour désigner spécifiquement ce phénomène de pénalisation des Droits de l’Homme. Donc, de là découle un certain nombre de transpositions que je vois, pour ma part, comme quelque chose d’assez riche parce que ça nous invite, en réalité, à penser mieux. Les limites aussi de chaque discipline et la manière dont on peut cadrer juridiquement au mieux, eh bien, ce dialogue, ce dialogue entre les juges.

>> En tout cas merci beaucoup pour ces propos très intéressants, très complets.

>> Merci à  vous. Merci à  vous Maya. Merci pour l’invitation.

 

LA NAISSANCE DES DROITS DE L’HOMME

Malgré tous les précurseurs que nous venons de voir, les États sont peu enclins à limiter leur souveraineté et de donner suite aux demandes d’internationaliser les Droits de l’Homme. Ceci, malgré le fait, d’ailleurs, qu’il y a eu plusieurs propositions dans la période d’entre-guerres et ces efforts se sont intensifiés pendant la Deuxième Guerre Mondiale. En effet, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, les Droits de l’Homme sont invoqués comme le fondement d’un nouvel ordre mondial. Ils deviennent aussi une cause au nom de laquelle les alliés combattent les pouvoirs de l’Axe. Dans ce contexte, la campagne de l’écrivain Herbert George Wells a eu un grand impact. Elle a été déclenchée par une lettre écrite dans le journal The Times, en 1939. En effet, Wells a publié un projet d’une Déclaration Internationale des Droits de l’Homme. Il l’a repris plus tard et publié sous version modifiée dans un ouvrage dont le titre est révélateur, l’ouvrage est intitulée The Rights of Man: Or What are we fighting for? La déclaration de droit de Herbert George Wells a été diffusée d’une façon très large, non seulement en Europe, mais aussi sur le continent asiatique et africain. Plus de 100 000 exemplaires ont circulé et ont été diffusés dans 48 pays. Des efforts ont aussi été entrepris pour rendre la déclaration accessible dans les pays appartenant à l’Axe.

La communauté académique n’est pas non plus restée silencieuse. Souvenons-nous de Hersch Lauterpacht, notamment, et de son projet d’une International Bill of Rights, présenté au public d’abord en 1943, et publié sous forme de livre en 1945. Dans le monde politique, le président américain Franklin Delano Roosevelt a invoqué aussi les Droits de l’Homme comme justification idéologique pour lutter contre l’Allemagne et ses alliés[15]. Dans son discours sur l’État de l’Union, du 6 janvier 1941, Franklin Delano Roosevelt esquissait sa vision d’un nouvel ordre mondial, un ordre mondial où toute personne, partout, doit pouvoir jouir de quatre libertés fondamentales : la liberté d’expression, la liberté de religion, la liberté de vivre à l’abri du besoin et la liberté de vivre à l’abri de la peur. Roosevelt a confirmé sa vision d’un ordre mondial respectueux de ces quatre libertés dans une déclaration commune avec le premier ministre britannique, Winston Churchill. Cette déclaration est connue sous le nom de la Charte de l’Atlantique.

La Charte de l’Atlantique a été adoptée à l’issue de la Conférence de l’Atlantique qui s’est tenue au bord du navire USS Augusta. La charte, elle-même, a été adoptée le 14 août 1941. La charte contient des principes de base d’une nouvelle politique internationale qui repose notamment sur la justice, la liberté, la paix, la fraternité et la sécurité. Avant la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, ces principes ont été approuvés par 25 États. La Charte de l’Atlantique a servi de base à la Déclaration des Nations unies, signée le premier janvier 1942 par les représentants de 26 pays en guerre contre l’Allemagne et ses alliés. Elle a également de base à la Charte des Nations Unies, signée le 26 juin 1945 à San Francisco.

Pour les auteurs visionnaires des Droits de l’Homme, comme Hersch Lauterpacht, l’adoption de la Charte des Nations Unies fut cependant une déception. Selon Lauterpacht, l’internationalisation des Droits de l’Homme devait, en effet, reposer sur deux piliers pour être effectif. Le premier pilier, c’est une Charte Internationale des Droits de l’Homme par quoi il entendait un instrument juridiquement contraignant. On ne pouvait donc pas se contenter simplement de déclarations politiques. Ensuite, il fallait, selon Lauterpacht, aussi, un mécanisme international de surveillance. Le régime nazi l’a montré, les États sont capables d’actes monstrueux face à leurs propres populations. Il fallait donc limiter la souveraineté de l’État par l’instauration d’un contrôle externe. Lauterpacht avait en tête, notamment, la création d’une Cour mondiale en matière des Droits de l’Homme.

Cependant, si nous regardons la Charte des Nations Unies, on n’y trouve aucun catalogue des Droits de l’Homme, on n’y trouve aucune mention, non plus, d’un contrôle extérieur, d’un contrôle international, en matière des Droits de l’Homme. En effet, au sujet des Droits de l’Homme, la charte est assez sommaire. Elle mentionne les Droits de l’Homme dans le Préambule, elle érige le respect des Droits de l’Homme en but des Nations Unies et en but de la coopération internationale. Ces dispositions de la charte, cependant, il faut les lire, aussi, en lien avec d’autres principes de la charte. La charte consacre, notamment, le principe de la souveraineté égale des États et le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures. Comment concilier, donc, le respect des Droits de l’Homme d’une part et le principe de la souveraineté, de la non-ingérence, d’autre part?

La charte ne nous donne pas une réponse à ces questions. D’un point de vue institutionnel, la Charte prévoit à l’article 68 la compétence du Conseil Économique et Social, de créer des commissions, qui peuvent aussi, donc, promouvoir le respect des Droits de l’Homme. Le Conseil Économique et Social n’a pas tardé de faire usage de cette compétence : en 1946, il a créé la Commission des Droits de l’Homme. La Commission des Droits de l’Homme est le précurseur du Conseil des Droits de l’Homme. C’était, pendant six décennies, l’institution principale vouée à la protection des Droits de l’Homme dans le système onusien.

C’est en effet en 2006 que le Conseil des Droits de l’Homme a remplacé la Commission des Droits de l’Homme. La première mission de la commission a été la rédaction d’une Charte Internationale des Droits de l’Homme. La commission, qui était présidée par Eleanor Roosevelt, estimait qu’une Charte Internationale des Droits de l’Homme devait comprendre trois volets. D’abord, une déclaration des Droits de l’Homme, la déclaration étant un instrument juridiquement non contraignant. Ensuite, il faudrait une convention qui protège les Droits de l’Homme, là , il s’agirait donc d’un traité international, un instrument juridiquement contraignant. Et ensuite, il faudrait, comme l’avait proposé aussi Lauterpacht, des mécanismes de mise en œuvre internationaux.

Dans l’immédiat, seulement le premier point a pu être réalisé. Mais même le projet de rédiger une déclaration des Droits de l’Homme, donc un instrument juridiquement non contraignant, a été ambitieux. Il s’est heurté à plusieurs obstacles. D’une part, l’effet de la Guerre Froide s’est déjà  fait ressentir, ce qui a amené à une polarisation entre le bloc soviétique, d’une part, et le bloc occidental, d’autre part. Autre point contentieux, c’était l’ambition, au fond, universelle de la déclaration. Dans ce contexte, un document, un texte écrit par l’Association Américaine d’Anthropologie a fait beaucoup parler de lui. Dans ce document, l’association d’anthropologie, au fond, a défendu un point de vue relativiste, elle était très sceptique face à cette ambition d’écrire une charte avec une portée universelle en matière des Droits de l’Homme. Voici un passage clé : “3. Standards and values are relative to the culture from which they derive so that any attempt to formulate postulates that grow out of the beliefs or moral codes of one culture must to that extent detract from the applicability of any Declaration of Human Rights to mankind as a whole. Ideas of right and wrong, good and evil, are found in all societies, thought they differ in their expression among different peoples. What is held to be a human right in one society may be regarded as anti-social by another people or by the same people in a different period of their history. The saint of one epoch would at a later time be confined as a man not fitted to cope with reality. Even the nature of the physical world, the colors we see, the sounds we hear, are conditioned by the language we speak, which is part of the culture into which we are born”(The Executive Board, American Athropological Association, Statement on Human Rights, in American Anthropologist, 1947)[16].

La question sur l’universalisme des Droits de l’Homme a aussi été alimentée par une étude de l’Unesco. En effet, en 1947, l’Unesco mena une grande enquête sur les fondements des Droits de l’Homme. Elle l’a fait sous forme de questionnaire, questionnaire qui a été envoyé à environ 150 personnes de notoriété mondiale, des personnes qui représentent différentes cultures. L’Unesco a reçu environ 70 réponses en retour qui ont servi de base au rapport qu’elle a rédigé. Les conclusions de ce rapport sont plus positives que les propos que nous venons d’entendre de l’Association Américaine d’Anthropologie. Il proposait notamment un catalogue de Droits de l’Homme qui faisait, selon l’Unesco, l’objet d’un accord transculturel. La vision de l’Unesco n’a pas été excessivement optimiste[17].

Le 12 décembre 1948, l’Assemblée Générale a adopté la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, à  Paris. La Déclaration a été adoptée avec quelques abstentions mais sans aucune opposition. L’adoption sans opposition représente, dans les paroles de Stéphane Hessel, « certainement un des derniers moments consensuels de la communauté internationale ». L’adoption de la Déclaration Universelle a marqué la naissance des Droits de l’Homme au niveau international. Lisons, pour finir, quelques extraits du préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. « Considérant que la méconnaissance et le mépris des Droits de l’Homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité et que l’avènement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l’homme […]. L’Assemblée Générale proclame la présente Déclaration Universelle des Droits de l’Homme comme l’idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations » (Préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) du 10 décembre 1948). Nous retrouverons dans ce passage cité plusieurs idées que nous avons déjà vues dans les deux premières semaines de ce cours. Nous y voyons l’idée que les Droits de l’Homme sont des réactions contre des tragédies humaines, notamment, ici, la tragédie du nazisme. Nous y retrouvons également la vision d’un nouvel ordre mondial et l’aspiration universelle des Droits de l’Homme.

 

CONCLUSION

Le cours de cette semaine l’a montré, l’internationalisation des Droits de l’Homme a été un défi colossal. Elle allait tout d’abord à l’encontre de la pensée orthodoxe des internationalistes de l’époque. Ensuite, elle se heurtait à la résistance des États attachés à leur souveraineté. Elle se heurte également à la diversité des pratiques culturelles, vues comme un obstacle face à l’ambition universelle des Droits de l’Homme.

Plusieurs institutions et évolutions de l’ordre juridique international ont préparé le terrain à l’émergence des Droits de l’Homme au niveau international. Ils l’ont fait de différentes façons. Tout d’abord, ils ont préparé le terrain en cristallisant le contenu des futures normes dans le domaine des Droits de l’Homme. Ensuite, ils ont ouvert une brèche dans la souveraineté étatique, en déplaçant l’accent d’un ordre juridique international axé principalement sur les États vers un ordre juridique international qui se préoccupe aussi de la personne humaine, ou au moins de différentes catégories de personnes. Il s’agissait notamment des esclaves, des travailleurs, des minorités nationales, des nationaux vivants dans un autre État, des combattants ou de la population civile dans les conflits armés.

Ensuite, la souveraineté a aussi été relativisée par la mise en place de différents mécanismes internationaux de contrôle qui existaient justement grâce à ces précurseurs. Le droit pénal international, en particulier, a permis encore de réfuter une autre objection majeure face à l’internationalisation des Droits de l’Homme. Il s’agissait de l’objection selon laquelle seuls les États sont des sujets du droit international classique, ce qui exclut la personne humaine, l’individu. Si le droit pénal international, au fond, impose des devoirs aux particuliers et sanctionne la violation de ses obligations, pourquoi le droit international ne pourrait-il pas non plus conférer des droits subjectifs aux particuliers, notamment des Droits de l’Homme?

Ces précurseurs, ainsi que l’expérience dramatique de la deuxième guerre mondiale, n’ont cependant pas été suffisant pour réaliser des projets aussi ambitieux que celui préconisé par Hersch Lauterpacht. L’adoption d’une Charte Internationale des Droits de l’Homme juridiquement contraignante n’a pas vu le jour après la Deuxième Guerre Mondiale. On n’a pas non plus mis en place des mécanismes internationaux de contrôle comme une cour mondiale des Droits de l’Homme. Déplorant le caractère juridiquement non contraignant de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, Hersch Lauterpacht l’a déclaré mort-né dans les années 50. Quelles conclusions s’imposent aujourd’hui, plus de six décennies après l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme?

Nous le verrons, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme n’a marqué qu’un début. Les droits qu’elle énonce, ont été consacrés plus tard dans des traités internationaux, donc des instruments juridiquement contraignants. Nous allons également voir que des mécanismes mis en œuvre existent bel et bien aujourd’hui, au niveau international. Bien qu’une cour mondiale des Droits de l’Homme n’existe pas encore au niveau universel, il existe aujourd’hui, d’ailleurs, des cours qui veillent au respect des Droits de l’Homme au niveau régional, en Europe, sur le continent américain et sur le continent africain. Bien entendu, tout n’est pas rose. Les Droits de l’Homme restent une vision jamais entièrement réalisée. Vous apprendrez encore plus sur les acquis et les défis dans ce domaine dans les semaines à venir. À vous de juger, après ce cours de huit semaines, si le verre est à moitié plein ou à moitié vide, ou, peut-être, presque entièrement plein ou presque entièrement vide.

 

 

[1] Fiche technique sur les similitudes et différences entre droit international humanitaire et droit international des droits de l’homme

 

[2] Déclaration du Congrès de Vienne du 8 février 1815 au sujet de l’abolition de la traite des nègres d’Afrique ou du commerce des esclaves

[3] Traité de Versailles du 28 juin 1919, Partie XIII

 

[4] CPJI, avis consultatif du 6 avril 1935 rendu dans l’affaire des écoles minoritaires en Albanie

[5] Traité dit des minorités du 28 juin 1919 entre les Etats-Unis d’Amérique, l’Empire britannique, la France, l’Italie, le Japon et la Pologne

 

[6] CPJI, avis consultatif du 15 septembre 1923 sur l’acquisition de la nationalité polonaise

[7] Formation DIH du Comité international de la Croix-Rouge

[8] Rapport du CICR, Le droit international humanitaire et les défis posés par les conflits armés contemporains, soumis à la 31ème Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 2011, pp. 16-26

 

[9] Article 3 commun aux quatre Conventions de Genève

[10] Instruction de 1863 pour les armées en campagne des Etats-Unis d’Amérique (Code Lieber)

 

[11] Fiche technique sur les similitudes et différences entre droit international humanitaire et droit international des droits de l’homme

 

[12] CIJ, avis consultatif du 8 juillet 1996 dans l’affaire concernant la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires (AG)

[13] Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) : La mission du CICR

[14] Extraits du préambule du Statut de la CPI et des listes de crimes entrant dans la compétence de la Cour

[15] Franklin Delano Roosevelt, «State of the Union Address» to the 77th Congress, Washington 6 janvier 1941

 

[16] American Anthropological Association, Statement on Human Rights, publié dans American Anthropologist, New Series, Vol. 49, No. 4, Part 1 (Oct.- Dec. 1947), pp. 539-543

[17] Rapport du Comité de l’UNESCO sur les Principes Philosophiques des Droits de l’Homme à la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies, Paris 31 juillet 1947

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Semaine 1: Les fondements des droits de l’homme

La première partie du cours de cette semaine clarifiera la notion et les caractéristiques des droits de l’homme. La deuxième initiera les étudiant(e)s aux fondements philosophiques des droits de l’homme. Une importance particulière sera accordée à la dignité humaine, sa signification, sa concrétisation et son évolution. La troisième partie tracera dans les grandes lignes l’émergence et l’évolution des droits humains au niveau national. Le cours poursuivra cinq objectifs principaux : (1) relever les caractéristiques et spécificités des droits de l’homme, (2) familiariser les étudiant(e)s avec les valeurs fondatrices des droits de l’homme, (3) les initier aux concepts de la dignité humaine, sa concrétisation et son évolution, (4) montrer aux étudiant(e)s la dimension historique des droits de l’homme en leur enseignant les principales étapes ayant conduit à l’émergence des droits de l’homme au niveau national, (5) montrer aux étudiant(e)s l’ancrage des droits de l’homme dans différentes cultures.

Ouvrages Géneraux :

  • ALSTON P. / GOODMAN R., International Human Rights, Oxford 2013
  • ANDRIANTSIMBAZOVINA J. / GAUDIN H. / MARGUÉNAUD J.-P. / RIALS S. / SUDRE F. (éds.), Dictionnaire des Droits de l’Homme, Paris 2008
  • BALLESTEROS J., Derechos humanos: concepto, fundamentos, sujetos, Madrid 1992
  • BEITZ C. R., The Idea of Human Rights, Oxford 2009
  • BUERGENTHAL T. / THÜRER D., Menschenrechte: Ideale, Instrumente, Institutionen, Zurich 2010
  • CARETTI P., I diritti fondamentali: Libertà e diritti sociali, 3ème éd., Turin 2011
  • EIDE A. / ALFREDSSON G. (éds.), The Universal Declaration of Human Rights: A Commentary, Oslo 1992
  • FERNÁNDEZ DE CASADEVANTE ROMANI C., Derecho internacional de los derechos humanos, 4ème éd., Madrid 2011
  • FORSYTHE D. P., Encyclopedia of Human Rights, Oxford 2009
  • KÄLIN W. / KÜNZLI J., The Law of International Human Rights Protection, Oxford 2009
  • KÄLIN W. / KÜNZLI J., Universeller Menschenrechtsschutz, 3ème éd., Bâle 2013
  • LEVINET M., Théorie générale des droits et libertés, 3ème éd., Bruxelles 2010
  • MOECKLI D. / SHAH S. / SIVAKUMARAN S. / HARRIS D., International Human Rights Law, Oxford 2010
  • NOWAK M., Einführung in das internationale Menschenrechtssystem, Vienne 2002
  • ROBERT J. / DUFFAR J., Droits de l’Homme et libertés fondamentales, 8ème éd., Paris 2009
  • SUDRE F., Droit international et européen des Droits de l’Homme, 11ème éd., Paris 2012
  • TOMUSCHAT C., Human rights: Between Idealism and Realism, 2ème éd., Oxford 20

Lectures préalables :

Pour en savoir plus :

    • ALSTON P. / GOODMAN R., International Human Rights, Oxford 2013
    • ANDRIANTSIMBAZOVINA J. / GAUDIN H. / MARGUÉNAUD J.-P. / RIALS S. / SUDRE F. (éds.), Dictionnaire des Droits de l’Homme, Paris 2008
    • BALLESTEROS J., Derechos humanos: concepto, fundamentos, sujetos, Madrid 1992
    • BEITZ C. R., The Idea of Human Rights, Oxford 2009
    • BUERGENTHAL T. / THÜRER D., Menschenrechte: Ideale, Instrumente, Institutionen, Zurich 2010
    • CARETTI P., I diritti fondamentali: Libertà e diritti sociali, 3ème éd., Turin 2011
    • EIDE A. / ALFREDSSON G. (éds.), The Universal Declaration of Human Rights: A Commentary, Oslo 1992
    • FERNÁNDEZ DE CASADEVANTE ROMANI C., Derecho internacional de los derechos humanos, 4ème éd., Madrid 2011
    • FORSYTHE D. P., Encyclopedia of Human Rights, Oxford 2009
    • KÄLIN W. / KÜNZLI J., The Law of International Human Rights Protection, Oxford 2009
    • KÄLIN W. / KÜNZLI J., Universeller Menschenrechtsschutz, 3ème éd., Bâle 2013
    • LEVINET M., Théorie générale des droits et libertés, 3ème éd., Bruxelles 2010
    • MOECKLI D. / SHAH S. / SIVAKUMARAN S. / HARRIS D., International Human Rights Law, Oxford 2010
    • NOWAK M., Einführung in das internationale Menschenrechtssystem, Vienne 2002
    • ROBERT J. / DUFFAR J., Droits de l’Homme et libertés fondamentales, 8ème éd., Paris 2009
    • SUDRE F., Droit international et européen des Droits de l’Homme, 11ème éd., Paris 2012
  • TOMUSCHAT C., Human rights: Between Idealism and Realism, 2ème éd., Oxford 20

 

INTRODUCTION :

[MUSIQUE] [MUSIQUE] Qu’est-ce qu’on entend par Droits de l’Homme? Quels sont leurs caractéristiques? Sur quelles valeurs et idées se fondent-ils? D’où sont-ils venus? Quelle a été leur trajectoire?

Nous allons explorer ensembles ces questions, ici dans la Salle des assemblées des Nations Unies, à  Genève. Une question préalable se pose cependant. Elle est d’ordre terminologique. Allons-nous parler des Droits de l’Homme ou des droits humains? Dans d’autres langues, cette question ne se pose pas. En allemand par exemple, le terme Menschenrechte désigne clairement tous les êtres humains. Il en est de même en russe droits de tous les êtres humains. En anglais aujourd’hui, le terme Human Rights est clairement dominant. Ce n’était cependant pas toujours le cas. Jusqu’à  l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, on utilisait la terminologie Rights of Man. Le changement de terminologie de Rights of Man vers Human Rights a été délibéré. Elle visait à  souligner que les Droits de l’Homme ne sont pas l’apanage, le privilège du genre masculin, mais qu’ils reviennent bel et bien à  tous les êtres humains, y compris les femmes. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme souligne ce point. Son article 1 dit. « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits »[1].

La déclaration innove ainsi par rapport à des déclarations plus anciennes, notamment la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen[2]. L’article 1 de la dite déclaration a la teneur suivante : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ». Contrairement à  la langue anglaise, Droits de l’Homme reste la terminologie officielle en français. Le titre de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme le montre bien. Droits de l’Homme reste aussi la terminologie officielle pour désigner d’autres conventions et instruments en matière de la protection des Droits de l’Homme. C’est la terminologie aussi pour désigner les organes de contrôle, pensant au Conseil des Droits de l’Homme, au Comité des Droits de l’Homme ou à la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Nous nous sommes décidés de suivre la terminologie officielle mais il n’est bien sûr pas question d’opposer les Droits de l’Homme aux droits de femmes. L’objet du cours, c’est clairement les droits de tous les êtres humains.

 

NOTION ET CARACTERISTIQUES:

Nous avons tous une intuition, ce que sont les Droits de l’Homme. Essayons ensemble d’éclaircir davantage cette notion, de faire ressortir ses traits saillants, à partir de la définition suivante. Les Droits de l’Homme sont des 1) droits subjectifs, 2) garantis par le droit international, 3) visant à  protéger les intérêts les plus fondamentaux de la personne humaine, et 4) subsidiaires par rapport aux garanties nationales.

Reprenons ensemble ces divers éléments de définition.

  1. Les Droits de l’Homme sont donc des droits subjectifs. The rights, pour le dire en anglais. Les droits subjectifs sont des prérogatives, des prérogatives permettant au titulaire du droit d’exiger quelque chose, du destinataire du droit. Les droits subjectifs impliquent donc toujours une relation entre deux parties. D’une part, le sujet du droit, le titulaire, le bénéficiaire du droit. Et d’autre part, le destinataire, la personne qui est tenue au respect du droit.

Qui peut être titulaire des Droits de l’Homme? C’est tout d’abord l’individu, la personne humaine, et en général, indépendamment de la nationalité. Les Droits de l’Homme reviennent ainsi mêmes aux apatrides, aux étrangers. Qu’en est-il maintenant des personnes morales? Par exemple des entreprises commerciales. Une entreprise commerciale peut-elle invoquer les Droits de l’Homme? La réponse varie en fonction des systèmes de protection. La Cour Européenne des Droits de l’Homme admet par exemple que, qu’une personne morale, une entreprise de presse, puisse invoquer la liberté d’expression, pour s’opposer à une interdiction de publier. Mais d’autres droits, pensons par exemple au droit à  la vie, à l’interdiction de la torture, sont indissociablement liées à  la personne humaine, et ne peuvent pas être invoquées par des entreprises commerciales. Une autre question qui se pose pour le titulaire, est de savoir: est-ce que les entités collectives, les peuples, peuvent invoquer les Droits de l’Homme? La question est controversée. La tendance contemporaine est de répondre par l’affirmative. Nous allons nous pencher sur cette question plus en détail dans la quatrième semaine de ce cours.

Tournons-nous maintenant vers l’autre partie du droit subjectif, vers le destinataire. Qui est le destinataire des Droits de l’Homme? Les Droits de l’Homme se dirigent principalement contre l’État. Quand on dit destinataire des Droits de l’Homme, cela veut donc aussi dire que cette entité-là est tenue au respect des Droits de l’Homme. Elle a des obligations. Donc on voit qu’il y a toujours, les Droits de l’Homme ont toujours deux faces. Droit, et le corollaire, c’est des obligations. Ce sont deux faces de la même médaille.

Je vous l’ai déjà dit, les Droits de l’Homme sont dirigés principalement contre l’État. Quand on dit l’État, ce sont tous les organes de l’État. Toutes les entités qui, de facto, ou de jure, agissent en son nom. L’administration, les tribunaux, le pouvoir législatif, et dans les démocraties directes, c’est également le peuple. Les Droits de l’Homme peuvent aussi déployer de façon indirecte des effets entre particuliers. Nous en parlerons davantage dans ce cours. Mais ce qui est important, les requêtes au niveau international sont toujours dirigées contre l’État. Jamais contre un individu, contre un particulier. Le fait que l’État soit le destinataire des Droits de l’Homme, s’explique surtout par des raisons historiques. L’État, l’entité souveraine, le monopole de la force, c’est l’État qui est un danger pour la liberté des particuliers. Il peut, peut les arrêter, les juger. Il peut confisquer leurs biens. D’où l’idée de protéger l’individu contre l’emprise de l’État.

Dans le contexte contemporain, des menaces peuvent aussi provenir d’autres acteurs. Pensons par exemple aux dégâts à la santé et à l’environnement, causés par des entreprises pétrolières, ou pensons aux sanctions décrétés par le conseil de sécurité des Nations Unies à l’encontre des personnes figurant sur les listes noires, dans le contexte de la lutte contre le terrorisme. Nous voyons donc des tendances, aujourd’hui d’élargir le cercle des destinataires, d’attendre la portée des Droits de l’Homme, aussi, vers les entreprises multinationales, vers les organisations internationales. Mon collègue Michel Hottelier vous en dira davantage dans la cinquième semaine de ce cours.

Nous avons donc vu jusqu’à  présent que les Droits de l’Homme ont un titulaire, la personne physique, ils ont un destinataire, principalement l’État. Une autre précision est importante, pour comprendre que les Droits de l’Homme sont des droits subjectifs. Les Droits de l’Homme sont en effet des droits subjectifs, à  deux titres. Ils sont des droits moraux, et ils sont également ce qu’on appelle des droits légaux. Et c’est les deux caractéristiques ensemble, qui font la force particulière des Droits de l’Homme.

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme annonce ces deux caractéristiques :

«Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde. »

Préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) du 10 décembre 1948

Elle dit, d’une part, que les Droits de l’Homme sont des droits inaliénables, de tous les membres de la famille humaine. Les Droits de l’Homme, en tant que droits inaliénables, qui reviennent à toute personne humaine, par le simple fait qu’elle est une personne humaine, exprime la vision des Droits de l’Homme comme droits moraux.

Les Droits de l’Homme, comme ils reviennent à toute personne, sont universels. Ils sont aussi inaliénables, dans le sens qu’on ne peut pas les perdre, qu’on ne peut pas nous enlever ces droits. Ces droits préexistent donc l’ordre juridique. Ils sont indépendants du droit en vigueur. Et ils restent aussi, transcendent l’ordre juridique, et ils restent des points de référence pour évaluer d’une façon critique le droit en vigueur. On parle de droits moraux, parce que les Droits de l’Homme compris de cette façon, sont ancrés dans la morale, et dans l’éthique.

La Déclaration Universelle énonce cependant aussi la caractéristique des Droits de l’Homme en tant que droits légaux. Elle nous dit en effet, qu’il « est essentiel que les Droits de l’Homme soient protégés par un régime de droit ». Pour être pleinement effectifs, il n’est pas suffisant que les Droits de l’Homme soient des considérations d’ordre moral. Mais ils doivent être protégés par l’ordre juridique. Des longs efforts ont donc été déployés pour que les Droits de l’Homme intègrent l’ordre juridique. Depuis une soixantaine d’années, les Droits de l’Homme sont protégés par le droit international.

  1. La protection des Droits de l’Homme par le droit international, est le deuxième élément de la définition que je vous ai donnée. En effet, on trouve des garanties analogues aux Droits de l’Homme, au niveau national, dans les Constitutions nationales, qui contiennent tous un catalogue de droits. Pour ces garanties-là, il est plus usuel d’utiliser une autre terminologie. On ne parle pas de Droits de l’Homme, mais plutôt de droits fondamentaux, de droits Constitutionnels, de liberté publique, ou, dans les pays anglo-saxons, de civil rights, ou civil liberties. Le droit international ne se limite pas juste à  protéger ces garanties, à  les énoncer, mais il prévoit aussi des mécanismes de mise en œuvre. Les droits doivent avoir des remèdes, il doit y avoir des sanctions quand ils sont violés.

L’importance des mécanismes de mise en œuvre résulte aussi de la résolution 41/120 de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur l’établissement des normes internationales dans le domaine des Droits de l’Homme[3]. Vous avez lu cette résolution pour aujourd’hui. Elle exige que les Droits de l’Homme soient « assortis de mécanismes d’application réalistes et efficaces » (Ch. 4. let d. de la résolution 41/120 de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur l’établissement de normes internationales dans le domaine des Droits de l’Homme du 4 décembre 1986).

Pour qu’un droit mérite d’être qualifié de droit de l’homme, il y a de plus une exigence d’ordre qualitatif :

  1. Les Droits de l’Homme sont des droits qui visent à  protéger les intérêts les plus fondamentaux de la personne humaine. Cette exigence on la retrouve aussi dans la résolution 41/120. Celle-ci dit, en effet, que les Droits de l’Homme doivent « revêtir un caractère fondamental et procéder de la dignité et de la valeur inhérente à  la personne humaine». (Ch. 4. let b. de la résolution 41/120 de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur l’établissement de normes internationales dans le domaine des Droits de l’Homme du 4 décembre 1986).

L’idée, derrière les Droits de l’Homme, c’est donc pas de garantir une liberté générale d’action, mais c’est de garantir des îlots de liberté, de garantir ce qui est fondamental pour l’existence, pour l’intégrité, et l’épanouissement de la personne. Et les Droits de l’Homme se concentrent aussi sur des domaines où il y a un risque avéré de violation.

Pensons, par exemple, à  la censure de la presse où nous voyons, c’est une constante de l’humanité, pendant plusieurs siècles. Mais qu’en est-il, par exemple, de la publicité commerciale, est-ce un droit de l’homme? Qu’en est-il, par exemple, du droit de fumer, du droit de monter à  cheval dans la forêt, du droit de détenir des armes? Tracer une ligne entre ce qui est fondamental et entre ce qui ne l’est pas n’est pas toujours facile. C’est cependant important de le faire.

Il faut éviter une banalisation des Droits de l’Homme, une dilution par une prolifération, par leur prolifération. Un éminent expert dans le domaine des Droits de l’Homme, Philip Alston, a ainsi exigé un contrôle de qualité. Les Droits de l’Homme, c’est comme le bon vin, c’est le grand cru, ce n’est pas le vin de table. Il est important de comprendre que pas tous les droits subjectifs protégés par le droit national sont des Droits de l’Homme.

Prenons, comme exemple, le droit des successions. Le droit de succession prévoit très souvent le droit des enfants d’hériter de leurs parents, mais ce n’est pas un droit de l’homme, on n’a pas une garantie analogue au niveau international. Même les droits garantis dans les Constitutions nationales ne sont pas tous des Droits de l’Homme. La Constitution allemande, par exemple, protège une garantie générale de la liberté d’action. Cette garantie a été interprétée comme protégeant le droit de monter à  cheval dans la forêt, le droit de nourrir des pigeons ; il y a, de nouveau, pas un pendant au niveau international. Il en va de même de la Constitution américaine qui protège, à son deuxième amendement, le droit de porter des armes, le droit international ne connaît pas une telle garantie. Cela est aussi dû au fait qu’il faut un consensus parmi les États sur ce qui est fondamental.

La résolution 41/120 dit, en effet, qu’il faut que les Droits de l’Homme se fondent sur un vaste soutien international. Le droit national peut donc aller au-delà des garanties des Droits de l’Homme.

  1. En d’autres termes, les Droits de l’Homme sont subsidiaires, ce sont des garanties qui sont subsidiaires par rapport aux garanties nationales. C’est la quatrième caractéristique que j’ai mis en exergue. Donc c’est important d’avoir en tête que les Constitutions nationales peuvent accorder des droits d’une façon plus généreuse que les Droits de l’Homme. Les Droits de l’Homme sont vraiment le dernier filet de secours, c’est un standard minimum.

 

FONDEMENTS PHILOSOPHIQUES

Quels sont les fondements philosophiques des Droits de l’Homme? Quelles valeurs les sous-tendent? Prenons à nouveau l’article un de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme comme point de départ. Ses dispositions stipulent : « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience, et doivent agir les uns avec les autres dans un esprit de fraternité » (Art. 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme DUDH du 10 décembre 1948).

La première phrase, tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits, est normative et non descriptive. C’est important de souligner ce point. Cette phrase ne fait pas décrire de l’État dans lequel se trouvent les gens, mais elle prescrit. Elle nous dit ce à quoi tous les êtres humains ont droit. La liberté, l’égalité, et la dignité.

Parmi ces trois valeurs, c’est souvent la dignité qui est mise le plus en avant. D’autres conventions souvent se contentent de mentionner uniquement la dignité. Il en va de même de la résolution 41/120 sur l’établissement des normes internationales dans le domaine des Droits de l’Homme. Nous avons vu l’importance de la dignité, nous allons lui consacrer un module à part.

Concernant l’égalité, une précision s’impose. L’article un de la Déclaration Universelle ne garantit pas l’égalité dans tous les domaines de la vie, à tous les égards, elle est plus précise. Elle garantit l’égalité en dignité et en droits. En d’autres termes, l’idée sous-jacente, c’est que toutes les personnes ont les mêmes droits. Nous voyons cette idée exprimée plus clairement dans l’article deux de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Cette disposition nous dit : « chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation » (Art. 2 al. 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme DUDH du décembre 1948).

Une clause analogue existe dans quasiment toutes les conventions en matière de Droits de l’Homme. Ces conventions identifient donc des critères qui ont servi à travers l’histoire pour marginaliser, exclure des personnes du cercle de l’humanité. Concéder les droits à  tout le monde suppose au fond la pensée de la réciprocité. Si moi, je veux me prévaloir de certains droits, je dois les concéder à autrui. Si je veux être respectée comme personne, je dois aussi respecter autrui. Des droits qui ne reviennent pas à  tout être humain, à toute personne, ce sont des privilèges, mais ce ne sont pas des Droits de l’Homme.  L’idée de la réciprocité, du respect mutuel, nous la trouvons aussi dans l’article un de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, vu que ce texte nous dit, que l’homme en tant qu’être doué de raison, de conscience, doit agir envers autrui avec un esprit de fraternité. On voit donc aussi que la titularité des droits va de pair avec des devoirs envers autrui, va de pair avec le respect pour autrui. Cette idée de réciprocité suppose aussi la conscience qu’il y a d’autres hommes. Et c’est dans ce sens précis qu’on a inclus le terme conscience dans l’article un de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Ce terme a été inclus, c’était une proposition chinoise, et elle visait à codifier la vertu centrale du confucianisme, dite ren, ren implique tout d’abord la conscience qu’il y a d’autres hommes. Ren implique également le respect pour autrui, on trouve cette idée exprimée dans la vertu fondamentale du confucianisme exprimé dans les Analectes, on parle aussi de la règle dite d’or :

« Ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse, ne le fais pas aux autres ». La règle d’or, l’esprit de fraternité supposent donc l’empathie. La capacité de se mettre à  la place d’autrui. L’homme à celle de la femme, l’athée à  la place du croyant, le riche à celle du pauvre. Cette empathie, elle est nécessaire non juste à l’égard de proches, ou des membres de la même nation, mais envers toute l’humanité.

L’égalité est donc indissociablement liée avec l’idée de l’humanité. Les Droits de l’Homme reviennent à tous les êtres humains. L’idée de l’humanité a été difficilement conquise. Elle ne va pas du tout de soi. Pensons par exemple aux débats qui ont lieu en Espagne au quinzième et seizième siècle suite aux conquêtes de l’Amérique. La conquête de l’Amérique a eu pour conséquence la rencontre entre les Espagnols et les Indiens. Et la question qui s’était posée, c’est : est-ce que les Indiens sont des êtres humains? Est-ce qu’on peut les tuer, les exploiter, les traiter comme esclaves?

Trois représentants de l’école dite de Salamanque Francisco de Vitoria, Bartolomé de las Casas, et Francisco Suarez ont donné une définition très large, très inclusive de l’humanité. Dans ces débats, ils ont donc pris position, en disant oui, les Indiens font aussi partie de l’humanité. Dans son ouvrage, Tractatus de Legibus, Suarez écrit : « le genre humain, quoique partagé en peuples et en royaumes divers, n’en a pas moins une unité non seulement spécifique, mais aussi pour ainsi dire politique et morale. Cette unité est indiquée par le précepte naturel de l’amour mutuel et de la miséricorde, précepte qui s’étend à tous, même aux étrangers, de quelque condition qu’ils soient ». (FRANCISCO SUAREZ, Tractatus de Legibus ac de Deo legislatore (1872) traduction in J. HERSCH, Le droit d’être un homme, Paris 1968).

L’idée de l’humanité n’est jamais définitivement conquise. Elle doit être réaffirmée constamment, défendue, aujourd’hui contre des courants par exemple xénophobes, racistes, ou nous voyons aujourd’hui aussi dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, au fond une tendance de nier aux terroristes l’appartenance à la famille des êtres humains. Le fait d’exclure ces personnes du cercle de l’humanité conduit à  justifier qu’on leur nie des droits aussi fondamentaux que l’interdiction de la torture, ou le droit à  la liberté et à la sûreté. On a aussi vu apparaître des Legal Black Holes, des régimes à  part, justement appliqués à  ces personnes, qu’on sort en quelques sortes de l’humanité. En Inde, un juge de la Cour Suprême a semé la polémique lorsqu’il a déclaré lors d’un séminaire sur le terrorisme que les terroristes justement, ne sont pas des êtres humains, mais qu’ils sont des animaux. Et le juge a poursuivi en disant, donc ils sont titulaires non des Droits de l’Homme, mais des droits des animaux. Une telle vision au fond est une attaque frontale à  l’idée de la liberté et de l’égalité des personnes humaines, et surtout c’est une attaque frontale à  la dignité, un concept que nous allons explorer plus en détail dans la séquence qui va suivre.

 

LA DIGNITE HUMAINE : NOTION ET EVOLUTION :

La dignité humaine est une, voire la valeur fondatrice des Droits de l’Homme. Il est donc important de comprendre ce concept. Prenons comme point de départ le préambule de la Charte des Nations Unies. Le préambule se réfère à  la « dignité et la valeur de la personne humaine » (Préambule de la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945). Dignité et valeur sont utilisées comme des synonymes dans ce passage. La résolution 41/120 est encore plus précise. Elle se réfère, en effet, à  la valeur, à  la dignité et à la valeur inhérente à  la personne humaine. Dignité veut donc dire valeur intrinsèque à la personne humaine.

La dignité comprise comme valeur intrinsèque se distingue, s’oppose à  un autre concept, celui du mérite. Le mérite d’une personne dépend de divers critères, de son comportement, sa naissance, sa réputation. Le mérite, donc, peut se perdre. Une personne peut perdre toute considération sociale. Par contre, la dignité ne se perd jamais. La valeur intrinsèque à  la personne ne peut pas être enlevée. L’histoire abonde d’exemples où on a traité une personne uniquement en fonction de son mérite, on a donc nié sa dignité, sa valeur intrinsèque. Par exemple, au quinzième siècle, le tribunal de Châtelet, à Paris, a condamné à mort un vagabond soupçonné d’avoir commis un vol en indiquant qu’il était digne de mourir parce qu’il était inutile au monde.

En déclarant le vagabond inutile au monde, le tribunal a nié sa dignité, sa valeur intrinsèque. Qu’est-ce qui justifie ce statut spécial de l’homme, le fait qu’on lui accorde une valeur intrinsèque? La Déclaration Universelle ne nous donne pas de réponse, elle reste ouverte à différentes justifications. Dans l’histoire, par exemple, des justifications religieuses ont joué un rôle important, encore aujourd’hui, un rôle important : dans la pensée chrétienne, par exemple, la dignité de l’homme a été justifiée par le fait qu’il soit fait à l’image de Dieu.

Pour des justifications plus contemporaines, la pensée d’Emmanuel Kant et son ouvrage, Fondements de la Métaphysique des Moeurs, est devenu une référence incontournable. Le point de départ de Kant est que l’homme se caractérise par sa volonté et par sa raison. Contrairement à d’autres créatures, l’homme n’est pas juste soumis aux lois de la nature, à  la causalité. Sa volonté lui permet de fixer des buts, d’orienter sa conduite vers un but. L’homme est donc conçu comme un acteur : il peut faire des choix, tracer son mode de vie. La raison permet à  l’homme d’orienter sa volonté, d’en faire, comme le dit Kant, une volonté bonne. La raison explique aussi que l’homme ne répond pas juste à des pulsions, à  des instincts, mais il est capable d’agir moralement, d’agir bien. Cela fonde, pour Kant, l’autonomie de la personne : l’homme est capable de se donner les lois morales lui-même et de s’y plier.

De ce que je viens de dire découle pour Kant une distinction fondamentale : Kant distingue, donc, entre les êtres raisonnables d’une part et les autres êtres, ou des objets, des instruments. Des instruments, des objets pour Kant ont tous une valeur relative. Des objets, des instruments ont un prix, une valeur marchande, on les utilise pour atteindre ces fins à soi. Par contre, les êtres raisonnables, et l’homme ont pour Kant une valeur absolue. Kant dit que les êtres raisonnables sont une fin en soi, n’ont donc pas un prix, pas une valeur marchande. Kant en déduit le précepte suivant : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de toute autre toujours et en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen ». (EMMANUEL KANT, Métaphysique des mœurs (1795) (traduit par A. RENAUT, Paris 1998).

Par cette formule, Kant n’exclut pas qu’on puisse avoir recours à autrui, avoir recours à ses services, donc, dans ce sens, se servir d’une autre personne comme un instrument. Mais il faut toujours, en même temps, respecter la personnalité, la personne d’autrui. Donc, la conception kantienne de la dignité implique tout d’abord qu’on respecte autrui, qu’on ait des égards face à autrui.

Comme pour Kant, l’homme est un être autonome, raisonnable, il faut aussi respecter son autodétermination. L’homme sait mieux ce qu’il veut faire de sa vie. Donc, il ne faut pas le soumettre à la contrainte. Et pour Kant, le seul droit originaire, inné à l’homme, c’est la liberté. Par liberté, il comprend justement de ne pas être soumis à la contrainte. Et la liberté se comprend toujours dans le sens qu’elle doit être compatible, conciliable, avec la même liberté pour autrui. Négativement parlant, la dignité donc violée, par exemple, quand on humilie quelqu’un, quand on ne le respecte pas, quand on le traite comme un objet, un instrument. Un objet, on peut le vendre, on peut le donner, voire on peut le détruire, mais on ne peut pas traiter de cette façon une personne parce que, justement, elle a une valeur intrinsèque.

 

LA DIGNITE HUMAINE : CONCRETISATION :

Malgré les précisions que nous venons de donner, la dignité reste un concept assez abstrait, il ne nous fournit pas une liste concrète des Droits de l’Homme. Les Droits de l’Homme ont, en effet, été définis d’une façon négative à travers les expériences concrètes de violations, d’injustices. Les Droits de l’Homme sont donc des réponses concrètes à des expériences d’injustices. Il est en effet plus facile de définir l’injustice que de définir la justice, plus facile d’identifier quand les droits ont été bafoués que de définir précisément leur contenu. Suivant cette approche négative, j’aimerais bien vous donner quelques exemples historiques qui montrent comment les Droits de l’Homme ont été concrétisés, comment ils ont émergé en tant que réponse à  des tragédies humaines.

J’ai retenu cinq exemples.

  1. Le premier exemple, c’est l’esclavage. L’esclavage est un clair affront à la dignité humaine parce qu’une personne est traitée comme un objet, un objet qu’on peut vendre, qu’on peut donner, voire tuer, la personne est traitée comme un instrument de travail, exploitée à des fins d’autrui. L’opposition à l’esclavage a déjà été articulée au treizième siècle, en Afrique, dans la charte du Manden[4], un document que vous avez lu pour aujourd’hui. La charte du Manden est considérée comme un texte fondateur des Droits de l’Homme sur le continent africain. Au sujet de l’esclavage, la charte du Manden nous dit ceci : « il n’y a pas pire calamité que ces choses-là, dans ce bas monde. […] L’essence de l’esclavage est éteinte ce jour, d’un mur à  l’autre, d’une frontière à  l’autre du Manden» (Charte de Manden (1922).
  2. Les détentions arbitraires, c’est le deuxième exemple que j’ai retenu. Les victimes sont en effet privées de leur liberté la plus élémentaire et livrées aux caprices du souverain. L’opposition à cette pratique remonte au treizième siècle, au Royaume-Uni, nous voyons dans la Magna Carta, déjà les revendications des barons faces à Jean sans Terre, le roi Jean Sans Terre, revendications d’avoir des garanties judiciaires, un contrôle judiciaire pour les privations de liberté.
  3. La persécution des minorités religieuses est le troisième exemple d’une concrétisation négative de la dignité que j’aimerais évoquer. Cette pratique a donné naissance à la liberté religieuse et à la liberté d’expression. C’est en effet dans le domaine religieux que la liberté de la parole a été revendiquée en premier. Les réformateurs, par exemple, ont revendiqué le droit d’interpréter la Bible. La tolérance religieuse a cependant des antécédents historiques encore plus lointains. Au sixième siècle avant Jésus-Christ, le roi Perse, Cyrus le Grand, s’engagea à respecter toutes les fois et coutumes de tous les peuples de son royaume. Cet engagement est inscrit sur le cylindre de Cyrus découvert au dix-neuvième siècle et conservé aujourd’hui au British Museum. Sur le sous-continent indien, deux empereurs ont aussi revendiqué ou pratiqué la tolérance religieuse. C’était d’abord l’empereur bouddhiste, Ashoka, au troisième siècle avant Jésus-Christ, qui organisait, aussi, des débats entre différentes croyances, et plus tard, au seizième siècle, l’empereur Akhbar, qui faisait partie de la dynastie des Moghols, lui aussi, c’était un grand plaisir pour lui d’assister, d’organiser des débats entre différentes croyances. Et il a fait un temps où la Contre-Réforme battait son plein en Europe.
  4. Le quatrième exemple, la pauvreté, l’exploitation est une constante de l’humanité. Il n’est donc guère surprenant que dans les grands textes religieux, nous trouvons le précepte de la charité, d’aider autrui, d’aider les personnes les plus démunies. Les droits sociaux, notamment le droit au logement, le droit à l’alimentation, le droit à la sécurité sociale sont des réponses contemporaines à la misère, à la pauvreté. Les pays qui ont souffert du colonialisme, qui ont vu, par exemple, le pillage de leurs ressources naturelles, pour eux, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le droit, aussi, de disposer de ses richesses naturelles est une revendication, une réponse en matière des Droits de l’Homme. Les Droits de l’Homme se doivent aussi d’apporter des réponses à des menaces contemporaines. Leur contenu est donc dynamique, il évolue.
  5. Le cinquième exemple, la pollution et la destruction massive de l’environnement illustrent que les Droits de l’Homme, justement, apportent une réponse, aussi, à des problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui. Cette problématique, en effet, a donné naissance à la revendication de nouveaux Droits de l’Homme, le droit à un environnement sain.

Ces quelques exemples que j’ai donnés n’épuisent de loin pas l’univers vaste des Droits de l’Homme. Le but était, au fond, de montrer justement de quelle manière les Droits de l’Homme sont concrétisés à  travers l’histoire, à travers des tragédies humaines. Ces exemples nous montrent aussi que les Droits de l’Homme ne sont pas hors histoire, ils ne sont pas figés une fois pour toutes, mais ils évoluent avec l’histoire, et ils sont de nature dynamique pour apporter des réponses, aussi, à des problèmes contemporains. À l’inverse, les valeurs générales de la dignité, de la liberté, de l’égalité, permettent d’évaluer de façon critique des revendications, de créer de nouveaux Droits de l’Homme. Il faut chaque fois s’interroger : est-il justifié de répandre un problème social en créant un nouveau droit?

En conclusion, on peut dire que les Droits de l’Homme reposent sur deux piliers qui interagissent : le premier pilier ce sont des valeurs générales, intemporelles, la dignité, la liberté et l’égalité, et le deuxième pilier, ce sont les expériences concrètes, qui à travers l’histoire ont forgé le contenu des Droits de l’Homme.

 

L’EMERGENCE ET L’EVOLUTION DES DROITS DE L’HOMME AU NIVEAU NATIONAL : 1ERE PARTIE :

Aujourd’hui, on entend par Droits de l’Homme nous l’avons vu, des droits qui sont garantis par le droit international. D’un point de vue historique, cependant, les Droits de l’Homme sont d’origine nationale; c’est d’abord au niveau national qu’ils ont fait apparition. Où commence l’histoire des Droits de l’Homme, jusqu’à faut-il remonter? Cette question est controversée, elle est difficile. À mon sens, il n’est pas possible, et même pas souhaitable d’y apporter une réponse. Ce qui est important c’est que toutes les cultures puissent s’approprier les Droits de l’Homme ; puissent ancrer les Droits de l’Homme dans leur histoire, dans leur patrimoine religieux, culturel et autre. Et nous avons vu dans la séquence précédente qu’il existe des précurseurs aux Droits de l’Homme dans différentes cultures.

Ce qui est indéniable cependant c’est que le siècle des Lumières a été une époque cruciale pour l’émergence des Droits de l’Homme. La naissance des Droits de l’Homme au siècle des Lumières est étroitement liée à la théorie dite du droit naturel. Le droit naturel est plus ancien que le siècle des Lumières. Il a des racines déjà  dans l’Antiquité, il a joué un rôle important dans la pensée scolastique. Cependant, dans la pensée scolastique, le droit naturel était fortement imprégné par la religion, et il mettait plus en avant les devoirs. Le droit naturel était vu comme imposant des devoirs aux particuliers. Au siècle des Lumières, le droit naturel s’émancipe progressivement de la religion. Il y a aussi deux autres changements qui sont importants, deux autres évolutions :

  1. a) Tout d’abord, le droit naturel met plus l’homme au centre, de cette vision découle que le droit naturel devient maintenant pas une source juste de devoirs, mais une source de droits subjectifs, des droits naturels comme on les appelait.
  2. B) Deuxième innovation, c’est la distinction faite par les auteurs des Lumières entre l’État de nature d’une part et l’État civil d’autre part. Une distinction qui était déjà présente dans les écrits de Thomas Hobbes et que nous retrouvons par la suite chez d’autres auteurs.

Qu’est-ce qu’on entend par l’état de nature? L’état de nature désigne l’état de l’homme avant qu’il ne vive en société politique. C’est donc un état pré-social, pré-étatique. L’homme n’est pas soumis à la puissance publique, ou aux lois positives, mais il est régi uniquement par les lois naturelles. L’état civil ou la société politique par contre désignent l’État de l’homme qui est soumis à la puissance publique et son statut est régi par les lois positives.

La distinction entre l’état de nature d’une part, et l’état civil d’autre part, permet de comprendre la fameuse citation de Jean-Jacques Rousseau: « L’homme est né libre et partout il est dans les fers ». (JEAN-JACQUES ROUSSEAU, Du contrat social (1762).

L’homme est né libre désigne l’état de nature, un état régi par le droit naturel où toute personne a le droit à la liberté, à l’égalité. L’homme est dans les fers désigne les sociétés politiques telles qu’elles étaient à l’époque, les sociétés politiques que les auteurs des Lumières voulaient combattre, des sociétés hiérarchisées, stratifiées, fondées sur des différences du statut des personnes. Ces sociétés-là étaient justifiées par le droit divin, étaient censées représenter l’ordre voulu par Dieu.

L’état de nature par contre était ici une vision vraiment une idée subversive. Elle faisait voler en éclats la société politique telle qu’était. Elle faisait exploser les hiérarchies sociales. En effet, selon Rousseau, une société politique juste devait se fonder sur le contrat social. Le contrat social étant donc un contrat par lequel toutes les personnes dans l’état de nature s’unissent et fondent ensemble l’État, la société politique. Ce qu’on voit dans cette idée aussi, c’est une idée démocratique, la légitimité de l’État ne vient plus d’en-haut, de Dieu, mais vient d’en-bas, des citoyens. L’État fonde donc sa légitimité du consentement des citoyens.

Parmi les auteurs des Lumières, un penseur anglo-saxon, qui a eu une forte influence, c’était John Locke. John Locke écrivait au dix-septième siècle, donc avant Rousseau, et sa théorie du droit naturel, selon sa théorie, le droit naturel conférait aux hommes trois droits, le droit à la vie, à la liberté et à la propriété. Ces droits, les individus les gardent même une fois qu’ils s’unissent pour créer L’État. Ce sont des droits antérieurs à l’État, et qu’on ne perd pas par le fait qu’on entre dans la société politique. Le but de l’État, c’est justement de sauvegarder, de protéger ces droits. Locke en déduit le droit de se révolter, un État qui bafoue les droits de ses citoyens, là les citoyens ont le droit de s’en défaire, donc il y a un droit à la révolution.

Cette pensée de Locke a eu un grand retentissement outre-atlantique et elle a justifié, ou elle a servi de justification à la déclaration d’Indépendance aux Etats-Unis. On voit déjà une influence de Locke, d’abord dans la déclaration de Virginie de 1776 qui elle à son tour a influencé la déclaration d’Indépendance écrite par Thomas Jefferson aussi en 1776. Dans la déclaration d’Indépendance, d’abord sont invoqués des droits inaliénables, le droit à la vie, le droit à la liberté et à la recherche du bonheur. On voit aussi l’affirmation du droit à la révolution. Donc la justification de la sécession des treize colonies du Royaume-Uni, c’est justement le droit de conserver ces droits, de se défaire d’un gouvernement qui est devenu tyrannique.

En 1789, la vague révolutionnaire saisit aussi l’Europe et précisément la France. C’est dans ce contexte-là  qu’est adoptée la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Soulignons que le terme déclaration n’est pas le fruit de le hasard, en choisissant ce terme, les auteurs ont voulu souligner que ces droits ne sont pas inventés, ne sont pas créés, mais ils ont toujours existé, on se borne à les exposer dans ces textes solennels. Ce point de vue est exprimé dans la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen en les termes suivants : « L’ignorance, l’oubli ou le mépris des Droits de l’Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements » (Préambule de la Déclaration française des Droits de l’Homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789). Les déclarations au fond ont pour but de rappeler ces droits, de les exposer, des droits qui ont été méprisés et oubliés par le passé.

 

L’EMERGENCE ET L’EVOLUTION DES DROITS DE L’HOMME AU NIVEAU NATIONAL : 2EME PARTIE

Les grandes Déclarations des Droits de l’Homme du dix-huitième siècle ont sans doute marqué une époque importante dans la naissance des Droits de l’Homme. Ils restèrent cependant encore des problèmes à surmonter, j’aimerais en souligner trois. 1) La nature juridique non contraignante des déclarations, 2) l’absence d’un mécanisme juridique de mise en œuvre, 3) le cercle limité des destinataires. Je vais revenir sur chacun de ces problèmes, et montrer aussi quelles réponses lui ont été apportées.

1) Premier problème, donc la nature juridique non contraignante des déclarations. En effet, les déclarations du dix-huitième siècle ont eu une valeur politique mais non juridique. Avec ces déclarations, les Droits de l’Homme ont vu le jour en tant que droits moraux, mais pas encore en tant que droits légaux. Aujourd’hui, les droits fondamentaux, les Droits de l’Homme sont protégés dans quasiment toutes les Constitutions nationales. D’un point de vue historique, les États-Unis ont joué un rôle pionnier. La Constitution américaine de 1787 fut révisée deux ans, deux années plus tard, en 1789, pour y ajouter un catalogue de droits fondamentaux, les dix premiers amendements connus sous le nom Bill of Rights. Dans les autres États, et dans les États européens, la codification des droits fondamentaux est un phénomène plutôt du dix-neuvième siècle.

2) Pour l’effectivité des droits fondamentaux, il n’est pas suffisant de les protéger par des Constitutions nationales. Il faut en plus un organe qui est la mission de veiller à leur respect. Dans l’histoire, c’est le juge Constitutionnel qui a émergé comme l’organe, qui a eu, qui a pour mission de mettre en œuvre les droits fondamentaux. Les droits fondamentaux ont été saisis par le juge Constitutionnel qui est là  pour sanctionner leurs violations, mais aussi pour concrétiser le contenu de ces droits. La prise en main des droits fondamentaux par le juge Constitutionnel est un phénomène récent essentiellement du vingtième siècle.

3) Le cercle limité des destinataires était aussi une difficulté auquel le mouvement des Droits de l’Homme a été confronté. En effet, les, la belle rhétorique des grandes déclarations du dix-huitième siècle contrastait avec la réalité politique ou l’interprétation faite de ses textes. Plusieurs catégories de personnes étaient d’une façon ou d’une autre exclues du cercle des titulaires des droits. On peut mentionner à titre d’exemple, les femmes, les esclaves et les personnes démunies sans fortune.

Quant aux femmes, Olympe de Gouges critiqua la marginalisation et l’oppression du genre féminin, déjà en 1786. Celle qui mourut guillotinée, condamnée pour avoir été une impudente, ennemie de la révolution française, et une femme-homme écrivait : « Voilà comme notre sexe est exposé. Les hommes ont tous les avantages… On nous a exclues de tout pouvoir, de tout savoir » (OLYMPE DE GOUGES, L’Homme généreux (1786). En 1791, elle opposa la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, une Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne, un texte qui soulignait la nécessité de réforme. L’article 4 de cette Déclaration a la teneur suivante : « […] l’exercice des droits naturels de la femme n’a de bornes que la tyrannie perpétuelle que l’homme lui oppose ; ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison ». (Art. 4 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne de 1791).

Les esclaves n’ont pas non plus été considérés comme des titulaires des Droits de l’Homme. La Déclaration de Virgine permet d’étayer ces propos. En effet, dans un projet de la Déclaration figurait l’affirmation que les hommes sont nés égaux et libres. Par la suite, on a biffé le terme naissance, parce qu’il était considéré comme étant dangereux à une société qui pratique l’esclavage. Et en plus, on a encore ajouté un bout de phrase, on a ajouté que on ne peut pas perdre les Droits de l’Homme lorsqu’on entre dans un état de société. L’idée de derrière cette précision était d’affirmer que les esclaves justement, ne font pas partie de la société politique, et ne sont donc pas titulaires des Droits de l’Homme.

Quand aux personnes sans fortune, ils étaient rayés du contrat social par le fait qu’ils ne pouvaient pas voter. C’était le, c’était donc le système du suffrage censitaire. Abbé Sieyès déjà, avait fait une distinction entre les citoyens dits actifs, ceux qui ont une fortune, et qui peuvent voter, et les citoyens passifs, les personnes qui ne peuvent pas voter, qui n’ont pas de fortune. Nous voyons donc qu’il y a plusieurs catégories de personnes qui étaient exclues de la titularité des Droits de l’Homme. Néanmoins, les grandes déclarations du dix-huitième siècle ont en quelque sorte posé une présomption, créé une présomption d’égalité et de liberté, et elles ont inspiré après des revendications vers l’extension du cercle des titu, des titulaires. Elles ont, les déclarations ont inspiré notamment le mouvement féministe, le mouvement socialiste qui combattait aussi le suffrage censitaire, et le mouvement abolitionniste. Il serait faux de penser que l’histoire des Droits de l’Homme est une histoire linéaire qu’on va toujours vers le progrès. On a aussi vu au dix-neuvième siècle, l’apparition de plusieurs contre-courants. J’aimerais en mentionner les suivants : le positivisme, l’utilitarisme, le nationalisme, le colonialisme et le darwinisme social.

1) Le positivisme juridique d’abord, c’est une doctrine donc qui était opposée à la théorie du droit naturel. Elle réfutait la théorie du droit et des droits naturels comme un concept métaphysique subjectif, relevant de la morale mais pas du droit. Un partisan connu du positivisme, Jeremy Bentham est l’auteur aussi d’une critique très délurante de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Dans son écrit, Anarchical Fallacies – L’absurdité sur des échasses, Bentham réfute la théorie des droits naturels. Pour lui, c’est une absurdité rhétorique, une absurdité sur des échasses. Les vrais droits, les seuls véritables droits, c’est les droits qui sont consacrés par l’ordre juridique. Mais des droits naturels sont pas des véritables droits, c’est une fiction, c’est quelque chose qu’on a imaginé. Bentham n’était pas seulement un adhérent du positivisme, mais il était aussi le père fondateur de l’utilitarisme.

2) Pour l’utilitarisme, au fond, la maxime éthique qu’il faut suivre, c’est de maximiser le bonheur de tous. Donc, des droits subjectifs se justifient dans la mesure qu’ils sont utiles au bien-être général. Pour l’utilitariste par exemple, tel que Bentham le, le défendait, la torture n’est pas absolument interdite. Elle peut se justifier en certaines circonstances justement, quand elle peut être utile, par exemple pour prévenir une grande calamité.

3) Le troisième contre-courant, le nationalisme a conduit à une vision introvertie, on peut dire, de, des Droits de l’Homme. Les Droits de l’Homme sont moins vraiment, des Droits de l’Homme, mais ce sont des droits du citoyen. Et qui est le citoyen? Le citoyen est celui qui appartient à la nation. Donc, on ne met pas en avant l’individu comme l’a fait le siècle des Lumières, mais on met l’accent sur l’appartenance à une collectivité, à la nation elle-même définie comme une communauté qui est, qui est unie par l’histoire ou par la religion. Si on suit cette approche, il ne peut pas y avoir de droits universels. Les droits sont toujours relatifs à une communauté donnée, à un ordre juridique donné. On voit derrière le nationalisme, mais aussi avec le nationalisme apparaît des controverses sur l’universalité des Droits de l’Homme, et c’est une controverse qui perdure aujourd’hui, controverse difficile opposant les universalistes aux relativistes des Droits de l’Homme.

4) Le quatrième et le cinquième contre-courant, le colonialisme et le darwinisme social n’ont pas non plus été favorables dans la doctrine des Droits de l’Homme. Les deux pratiques, au fond, ont justifié l’occupation d’autres pays entre autres par une distinction faite entre les peuples dits avancés d’une part, et d’autre part entre les peuples dits barbares, moins avancés dans l’évolution. La citation suivante qui définit le colonialisme illustre ces propos : « Coloniser, c’est se mettre en rapport avec des pays neufs, pour profiter des ressources de toute nature de ces pays, les mettre en valeur dans l’intérêt national et, en même temps apporter aux peuplades primitives qui en sont privées, les avantages de la culture intellectuelle, sociale, scientifique, morale, artistique, littéraire, commerciale et industrielle, apanage des races supérieures. La colonisation est donc un établissement fondé en pays neuf par une race avancée, pour réaliser le double but que nous venons d’indiquer » (ALEXANDRE MERIGNHAC, Précis de législation et d’économie coloniales, Paris 1912). La distinction entre race supérieure d’une part, et race inférieure d’autre part a conduit l’humanité à la négation des Droits de l’Homme, à la catastrophe morale et humanitaire de la Deuxième Guerre Mondiale. Comme nous le verrons la semaine prochaine, c’est l’expérience de la Deuxième Guerre Mondiale qui a conduit à une renaissance de la pensée des Droits de l’Homme et à leur ancrage au niveau international.

 

CONCLUSION :

En conclusion, dans cette première semaine de cours, nous avons appris ce que sont les Droits de l’Homme, sur quelles idées, valeurs, ils se fondent, et d’où ils viennent. Nous avons vu que les Droits de l’Homme sont des droits subjectifs, garantis par le droit international et visant à protéger les intérêts les plus fondamentaux de la personne humaine. Nous avons vu que les Droits de l’Homme, en tant que droits subjectifs, ont un titulaire, principalement la personne humaine, et un destinataire, principalement l’État. Les Droits de l’Homme se caractérisent par leurs subsidiarités, ils sont un standard minimum, et non un seuil maximum à atteindre. Nous avons aussi vu que les Droits de l’Homme se fondent sur la dignité humaine, sur la valeur intrinsèque de la personne humaine, et que leur contenu a été concrétisé à travers des expériences historiques, des expériences d’injustice. En tant que réponse à  des situations d’injustice, les Droits de l’Homme plongent leurs racines dans différentes cultures. Pour la naissance des Droits de l’Homme, c’est cependant le siècle des Lumières qui a joué un rôle important. Les Droits de l’Homme ont d’abord été déclarés de façon solennelle, après ils ont été codifiés dans les Constitutions nationales, et ultérieurement, c’est le juge Constitutionnel qui les a pris en main, qui est devenu l’organe, de les protéger, de les mettre en œuvre. En même temps, ces acquis ont été remis en cause par plusieurs courants du dix-neuvième et du vingtième siècle. Comment, à partir d’un tel contexte, les Droits de l’Homme sont-ils devenus parties du droit international? Nous le verrons ensemble dans une semaine.

 

 

[1] Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948

[2] Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789

 

[3] Résolution 41/120 de l’Assemblée générale des Nations Unies sur l’établissement des normes internationales dans le domaine des droits de l’homme du 4 décembre 1986

 

[4] Charte de Manden

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Introduction aux droits de l’homme par l’Université de Genève

Link: https://www.coursera.org/learn/droits-de-lhomme

À propos de ce cours : Ce cours propose une introduction à la protection internationale des droits de l’homme. Il en présente les sources, les catégories, le contenu et les limites qui leur sont opposables, ainsi que les obligations qu’ils génèrent à la charge des Etats. Il expose aussi les principaux mécanismes de mise en œuvre prévus au niveau universel et régional pour assurer leur respect. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les droits de l’homme sont un domaine en plein essor. De nombreuses causes sont aujourd’hui défendues et débattues sous la bannière des droits de l’homme : la protection des minorités, la lutte contre la discrimination des femmes, des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres (LGBT), la lutte contre la torture et les disparitions forcées, la lutte contre la pauvreté ou encore la protection de l’environnement et la protection des données. Partout dans le monde, ces causes mobilisent tant les acteurs politiques que la société civile et elles sont discutées dans de multiples enceintes, nationales et internationales. Le présent cours vise à offrir les bases nécessaires pour appréhender et comprendre le domaine vaste et complexe que sont devenus les droits de l’homme. Quelles sont les caractéristiques et les différentes catégorie des droits de l’homme ? Quels sont leurs fondements philosophiques et historiques ? Pourquoi ces droits sont-ils importants ? Quels instruments visent à les protéger ? Comment rendre ces droits opérationnels ? Quels mécanismes existent pour les mettre en œuvre et quels sont leurs avantages et leurs inconvénients ? En abordant ces questions, le cours s’adresse tant à des membres de la communauté universitaire qu’à des praticiens (responsables politiques, membres du corps diplomatique, fonctionnaires, journalistes, membres d’ONG, défenseurs des droits de l’homme et spécialistes de la coopération au développement, de l’aide humanitaire et des questions relatives aux réfugiés), ainsi qu’à toutes les personnes qui sont engagées dans la protection des droits de l’homme ou simplement désireuses de mieux comprendre ce phénomène. Le cours est conçu et dispensé par les Professeurs Maya Hertig Randall et Michel Hottelier, de la Faculté de droit de l’Université de Genève. Durant le cours, des membres d’organes et institutions voués à la protection des droits de l’homme et des spécialistes de la communauté académique seront invités à intervenir. Le cours est donné en français. Il consiste en une série de 8 sessions, comprenant chacune un certain nombre de brèves présentations vidéo (8 à 15 minutes). Chaque session s’accompagne d’un questionnaire d’évaluation. Des lectures préparatoires sont requises pour chaque session.

Tableau des Contenus

Bienvenue au cours Introduction aux Droits de l’Homme. En vous inscrivant, vous rejoignez une communauté de milliers d’apprenants du cours. Nous sommes ravis de vous compter parmi nous et enthousiastes de votre future contribution à cette communauté.

Pour commencer, nous vous recommandons de prendre quelques minutes pour explorer le site du cours. Vous pouvez dès à présent parcourir les thèmes de chaque semaine, les slides ainsi que les lectures proposés. Pour accéder au forum, vous devez cliquer sur Discussion, et vous pourrez ainsi discuter avec les autres étudiant-e-s qui participent au cours. N’oubliez pas de vous présenter sous la rubrique du forum Meet and Greet.

Si vous avez des questions concernant le contenu du cours, merci de bien vouloir les publier sur le forum afin d’obtenir de l’aide de la communauté du cours. Pour des problèmes techniques avec la plateforme Coursera, merci de bien vouloir préalablement visiter le Learner Help Center.

Excellente découverte et bon travail.

 

Semaine 1 : Les fondements des Droits de l’Homme

Ouvrages généraux

Lecture Semaine 1

Introduction 3 min

Notion et caractéristiques 15 min

Fondements philosophiques 9 min

La dignité humaine : Notion et évolution 7 min

La dignité humaine : Concrétisation 7 min

L’émergence et l’évolution des Droits de l’Homme au niveau national : 1ère partie 8 min

L’émergence et l’évolution des Droits de l’Homme au niveau national : 2ème partie 11 min

Conclusion 2 min

 

Semaine 2 : L’internationalisation des Droits de l’Homme

Lecture Semaine 2

Introduction 3 min

Droits de l’Homme et droit international 11 min

Les précurseurs 18 min

Les précurseurs : Le droit international humanitaire : Entretien avec Gloria Gaggioli20 min

Les précurseurs : Le droit pénal international : Entretien avec Sévane Garibian 25 min

La naissance des Droits de l’Homme12 min

Conclusion 5 min

 

Semaine 3 : Les sources des Droits de l’Homme

Lecture Semaine 3

Introduction 2 min

Les sources nationales 4 min

Les sources internationales 16 min

L’articulation des sources8 min

L’implantation dans l’ordre juridique des Etats12 min

L’importance du contrôle international 13 min

Conclusion 4 min

Entretien avec Abdoulaye Soma8 min

 

Semaine 4 : La typologie des Droits de l’Homme

Lecture Semaine 4

Introduction 4 min

La première génération des Droits de l’Homme : les droits civils et politiques 10 min

La deuxième génération des Droits de l’Homme : les droits économiques, sociaux et culturels 12 min

La troisième génération des Droits de l’Homme : les droits de solidarité8 min

La classification générationnelle : Approche critique – 1ère partie8 min

La classification générationnelle : Approche critique – 2ème partie 10 min

La classification générationnelle : Approche critique – 3ème partie 5 min

L’indivisibilité des Droits de l’Homme 7 min

Conclusion 4 min

La pertinence de la classification générationnelle : Entretiens avec Abdoulaye Soma et Gregor Chatton 36 min

 

Semaine 5 : Les obligations découlant des Droits de l’Homme

Lecture Semaine 5

Introduction 3 min

L’obligation de respecter8 min

L’obligation de protéger14 min

L’obligation de mettre en œuvre 7 min

Les perspectives nouvelles14 min

Conclusion 3 min

 

Semaine 6 : Les limites des Droits de l’Homme

Lecture Semaine 6

Introduction 7 min

Questions préalables 9 min

La dérogation : Entretien avec Frédéric Bernard 15 min

La déchéance 7 min

Les restrictions : Notion et méthode d’examen 5 min

Les droits absolus 4 min

Les droits soumis à des motifs limités de restriction 6 min

Les droits soumis à la réserve d’ordre public 11 min

Les droits soumis à la réserve d’ordre public : Illustration à l’aide d’un exemple 10:57/11 min

Conclusion 5 min

 

Semaine 7 : Les mécanismes de mise en œuvre des Droits de l’Homme (première partie)

Lecture Semaine 7

Introduction 5 min

Les caractéristiques de la mise en œuvre des Droits de l’Homme10 min

Le contrôle préventif9 min

Entretien avec Jean Zermatten16 min

Le contrôle préventif (suite) 4 min

Le contrôle successif6 min

Entretien avec Abdoulaye Soma10 min

Le contrôle successif (suite) 11 min

Entretien avec Giorgio Malinverni25 min

Conclusion 1 min

 

Semaine 8 : Les mécanismes de mise en œuvre des Droits de l’Homme (seconde partie)

Lecture Semaine 8

Introduction 1 min

Le contrôle contentieux et non contentieux 8 min

Entretien avec Jean-Pierre Restellini 21 min

Le contrôle contentieux et non contentieux (suite)3 min

Le contrôle du suivi du respect des Droits de l’Homme13 min

Les perspectives d’évolution8 min

Conclusion 3 min

Considérations finales 4 min

 

About Université de Genève

Founded in 1559, the University of Geneva (UNIGE) is one of Europe’s leading universities. Devoted to research, education and dialogue, the UNIGE shares the international calling of its host city, Geneva, a centre of international and multicultural activities with a venerable cosmopolitan tradition.

Enseignants:

Maya Hertig Randall

Professeure ordinaire au département de droit public

Faculté de droit

Université de Genève

http://www.unige.ch/droit/collaborateurs/?maya_hertig

Maya Hertig Randall est docteur en droit et titulaire du brevet d’avocat. Elle a également obtenu un Master à l’Université de Cambridge et a été Visiting Scholar à l’Université de Budapest, ainsi qu’à l’Université Ann Arbor, aux Etats-Unis.

Professeure ordinaire auprès du Département de droit public de l’Université de Genève depuis 2007, Maya Hertig Randall a été préalablement Professeure assistante de droit européen à l’Université de Berne. Ses enseignements et sa recherche portent principalement sur le droit constitutionnel suisse et comparé et les droits de l’homme.

Auteur de publications parues en langue française, allemande et anglaise, elle est membre de la Commission fédérale contre le racisme de la Confédération suisse et co-directrice du programme du Certificat de formation continue et de formation intensive en droits de l’homme de l’Université de Genève. Parmi les publications en cours figurent l’ouvrage Introduction aux droits de l’homme , co-édité avec Michel Hottelier.

 

Michel Hottelier

Professeur ordinaire au département de droit public

Faculté de droit

Université de Genève

http://www.unige.ch/droit/collaborateurs/?michel_hottelier

Michel Hottelier est Professeur ordinaire auprès du Département de droit public de  l’Université de Genève depuis 1995. Titulaire d’un doctorat en droit (1985) et d’un brevet d’avocat (1988), il enseigne les diverses disciplines propres au droit constitutionnel et, plus largement, au droit public et aux droits de l’homme, avec une spécialisation dans le domaine de la justice constitutionnelle et de la Convention européenne des droits de l’homme. Ses domaines de recherche portent principalement sur le droit constitutionnel suisse et comparé et sur les droits de l’homme. Il est en particulier coauteur, avec les Professeurs Giorgio Malinverni et Andreas Auer, de l’ouvrage Droit constitutionnel suisse. Il dirige avec Maya Hertig Randall le programme du Certificat de formation continue et de formation intensive en droits de l’homme de l’Université de Genève.

 

Zohra Kibboua

Collaboratrice scientifique / Assistante doctorante au département de droit public

Faculté de droit

Université de Genève

Zohra Kibboua est titulaire du brevet d’avocat suisse (2012), d’un Master en droit international et européen (Université de Genève / Università degli Studi di Firenze (2009)) et d’un Bachelor en droit (Université de Genève, 2007). Après ses études, elle a travaillé au sein d’une compagnie multinationale, spécialisée dans la fiscalité et effectué son stage d’avocat auprès des Etudes AH Legal et Cavadini Golovtchiner Nikolic.

Depuis mai 2013, elle est assistante de recherche et d’enseignements au Global Studies Institute ainsi qu’au Département de droit public de la Faculté de droit. Ses principaux domaines de recherche et d’intérêt portent sur les droits de l’homme, plus particulièrement sur la protection de la liberté religieuse. Elle rédige actuellement sa thèse de doctorat sur les signes religieux au sein des entreprises privées en Suisse sous la direction de la Prof. Hertig Randall.

 

Anton Vallelian

Collaborateur scientifique / Assistant au département de droit public

Faculté de droit

Université de Genève

Anton Vallélian est assistant au département de droit public de la Faculté de droit de l’Université de Genève. Major de sa promotion de Bachelor, il reçoit le prix Schellenberg Wittmer en 2011, suivi en 2013 du Prix des meilleurs mémoires pour son mémoire de Master à l’Université de Genève. Il complète par la suite sa formation en droit international par le Certificat de droit transnational organisé par l’Université de Genève en collaboration avec l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID). Il rédige actuellement une thèse de doctorat sur la prise en compte des droits de l’homme dans les politiques publiques en matière de psychotropes sous la direction de la Prof. Maya Hertig Randall.

Parallèlement à son engagement académique, Anton Vallélian a travaillé en tant que paralegal dans le groupe d’arbitrage international de l’étude Lenz & Staehelin pour Me Paolo Michele Patocchi de 2009 à 2012. Malgré son départ de l’étude, il garde un pied dans la pratique et assiste Me Patocchi et Me Matthias Scherer en tant qu’éditeur assistant des Swiss International Arbitration Law Reports et des Swiss International Sports Arbitration Reports.

 

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Examen de Facultad – Rol 4

Rol 4: La firma Rodríguez Solarte y Asociados: Abogados de la Fiduciaria de Cundinamarca

Los abogados de la fiduciaria fundan su argumentación en las tesis siguientes: (1)la fiduciaria no es responsable de las actividades peligrosas que se han emprendido: el guardián jurídico es la constructora; (2)la fiduciaria no es responsable de ninguno de los daños porque ya había hecho entrega a satisfacción de las torres I y II; (3)todos los sucesos ocurridos durante el siniestro se deben a causa extraña; (4)el gerente de la fiduciaria se extralimitó en sus funciones sin que tal hecho comprometa la responsabilidad del patrimonio autónomo o de la fiduciaria de Cundinamarca.

Documento esperado: Documento de máximo siete (7) páginas, letra Times, interlineado 1, una cara por hoja, tamaño carta, 2,5cms de márgenes, Bibliografía y notas al final.

Honorables Magistrados

Tribunal Superior de Bogotá – Sala Civil

Ciudad.

  1. S. D.

REFERENCIA: Proceso Ordinario de Responsabilidad Civil Extracontractual No. 2010-0815 de ‘Víctimas de El Cortijo’ contra Constructora Solarium S.A., Fiduciaria de Cundinamarca S.A. y “Torres el Mirador del Parque” P.H.

ASUNTO: Alegato de Conclusión (Art. 360 CPC)

Respetados Magistrados:

EDDY FICTIO[i], identificado a pie del documento, abogado de la firma Rodríguez Solarte y Asociados, en mi calidad de apoderado judicial de la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A., demandada en el proceso de la referencia, cumplo con la carga procesal de presentar dentro del término de ley Alegatos de Conclusión[ii] (Art. 360 CPC)[iii] los cuales se sustentan así:

 

  1. SOBRE LOS HECHOS RELEVANTES:

Tanto en el escrito incoatario, como en la apelación de la sentencia del a quo de este proceso, pretende la parte actora que se declare que la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A. es responsable solidariamente (junto a los demás litisconsortes de la parte pasiva) por los daños y perjuicios ocasionados[iv] por el siniestro del 20 de Junio de 2010 (Hecho 21 y ss). Para tal fin, expuso como relevantes los siguientes[v]:

 

Hechos 1-15: De acuerdo con las “numerosas fuentes documentales” allegadas, tanto por la parte actora como por la parte pasiva, estos hechos se encuentran probados, razón por la cual las partes no discrepan[vi].

Hechos 16-20: Sobre estos radica el debate jurídico que da lugar a la proposición de las excepciones de mérito de Hecho de un Tercero y Causa Extraña como eximentes de responsabilidad de la Fiduciaria de Cundinamarca S.A.

Hechos 21-25: A lo largo del proceso, la parte demandante no ha probado una tasación de los daños y perjuicios patrimoniales y/o extrapatrimoniales y, mucho menos, que estos sean imputables a la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A. y/o que esta esté obligada a indemnizarlos.

Hechos 26-29: No son relevantes dado que los procesos iniciados no han concluido para ninguno de los interesados que son también partes en este proceso.

 

Del anterior recuento de los hechos se tiene que el debate jurídico que es relevante se radica en los hechos 16-20 sobre los cuales se efectuó oportunamente la fijación del litigio (Art. 101 CPC)[vii] por guardar relación con las circunstancias fácticas y jurídicas que fundamentan las excepciones de fondo propuestas por esta parte a continuación:

 

  1. SOBRE LA EXCEPCIÓN DE HECHO DE UN TERCERO COMO EXIMENTE DE RESPONSABILIDAD CIVIL EXTRACONTRACTUAL:
  2. a) ¿Es responsable una fiduciaria que cumple efectiva y eficientemente con los encargos fiduciarios que el fideicomitente le encomendó?

Las obligaciones contraídas por la persona jurídica[viii] profesional de la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A. en el contrato de fiducia mercantil (1226 C.Co)[ix] son de medio[x] (Art. 29 núm. 3 del E.O. del S.F – Decreto 663 de 1993)[xi] y no de resultado. Siendo así que una fiduciaria responde hasta por la culpa leve en el cumplimiento de su función (1243 C.Co), no obstante, para que la conducta de la fiduciaria genere responsabilidad es menester que se produzca un daño cierto. En el caso que nos atañe, los demandantes ni siquiera han probado ni cuantificado el daño ni que haya un nexo causal[xii] entre un supuesto hecho ilícito de la Fiduciaria de Cundinamarca S.A.

Es en virtud de esto que mi representada desde el contrato original de encargo fiduciario[xiii] solo tenía la obligación general de “adelantar las gestiones necesarias para adelantar un proyecto urbanístico y constructivo” (Hecho 3) para lo cual celebró de buena fe y con permiso de la Superfinanciera, contratos de fiducia de inversión[xiv] con los 80 inversionistas, con el fin de recaudar los fondos suficientes para llegar al punto de equilibrio (Hecho 4-5); diligentemente la Fiduciaria de Cundinamarca solicitó y consiguió en debida forma las “licencias de demolición, urbanización y construcción ante la Curaduría Tercera de la ciudad de Bogotá” (Hecho 6); celebró contrato de fiducia inmobiliaria (Circ. Básica Jurídica, Superfinanciera. Tit. V, Cap. Primero, núm. 8º, subnúm. 8.2.)[xv] por medio del cual se constituyó el Patrimonio Autónomo “Proyecto Torres El Mirador del Parque P.A.”, “con el propósito de adelantar en forma organizada el proceso constructivo” (Hecho 7); y, finalmente, como administradora y vocera del P.A., “se celebra contrato de administración delegada entre el patrimonio autónomo (…) y la firma constructora Solarium S.A.”, negocio en el que participó el gerente del P.A. y empleado de la Fiduciaria el Dr. Ricardo Plazas Meneses (Hecho 8).

Gracias al actuar diligente (63 CC)[xvi] de la Fiduciaria de Cundinamarca S.A. en la celebración de todos estos negocios fiduciarios[xvii] es que se pudo dar inicio formal a la primera etapa del proyecto el 30 de agosto de 2006 (Hecho 9) que tuvo culminación exitosa el 30 de junio de 2008 (Hecho 10).

 

  1. b) ¿Es responsable una fiduciaria del hecho dañoso ya sea por la actividad peligrosa de la construcción o por el hecho de la ruina de unos edificios que en virtud de un contrato de “administración delegada” le encargó construir a una constructora?

Lamentablemente, en un caso como este no basta simplemente probar la diligencia de un buen hombre de negocios que ha tenido mi mandante en el ejercicio de los negocios fiduciarios encargados para la consecución del Proyecto Torres el Mirador del Parque, sino que hay que desvirtuar la presunción en contra de responsabilidad por el ejercicio de la actividad peligrosa de la construcción y de responsabilidad por el hecho de una cosa, la ruina de una construcción, con el fin de que se declare la excepción perentoria de causa extraña por culpa de un tercero o la fuerza mayor eximente de responsabilidad.

La Fiduciaria por medio del contrato de administración delegada no delegó[xviii] las funciones[xix] que la ley prescribe como indelegables (1234 C.Co)[xx] para una fiduciaria a la que los fideicomitentes (la Familia Vargas Guillén y los inversionistas) le encargan unos bienes (P.A.) para la consecución de un fin, sino que solamente el P.A. encargó a la firma constructora la ejecución material del proyecto en dos etapas. Lo que tiene sentido[xxi], si se tiene en cuenta que la Fiduciaria en virtud del contrato de fiducia de administración y pagos (Circ. Básica Jurídica, Superfinanciera. Tit. V, Cap. Primero, núm. 8º, subnúm. 8.2.1.)[xxii] se obligó a llevar a cabo todas las gestiones necesarias para adelantar el proyecto urbanístico y constructivo, más no se obligó a construir, cual es la obligación que tiene la Constructora tanto en virtud del contrato, como por su carácter de profesional[xxiii] de la construcción.

Pese a la presunción que hay en contra de todas las personas jurídicas, privadas y/o públicas, asumiéndolas responsables de los perjuicios ocasionados por el hecho culposo de sus subalternos, en ejercicio de sus funciones[xxiv]. En este caso la ocurrencia del daño[xxv] fue llevado a cabo por una persona cuyo obrar era externo a la esfera jurídica de la Fiduciaria, hecho que no habría podido ser previsto ni evitado por la parte demandada, hecho de tercero que fue causa exclusiva del daño y, por tanto, responsable único sin dar lugar a responsabilidad directa en lo relativo a sus agentes[xxvi] ni a responsabilidad solidaria de la demandada (2344 CC)[xxvii].

Teniendo en consideración lo anterior, la guarda de la cosa le ha correspondido a la Constructora Solarium desde el momento en el que se le encarga la obligación de ejecutar materialmente el proyecto, siendo de este modo que cualquier daño o perjuicio extracontractual que de la obra derive (art. 2356 C.C.) se convierte en obligación exclusiva del contratista, y no admite la solidaridad propia de los daños que se ocasionen en ejercicio de actividades dañosas cuando sea más de uno el que lo ejecute, o tenga la guardia del bien que ha inferido el daño (art. 2344 C.C.).

Hay evidencia de que las Torres II (Etapa I) y III (Etapa II – En construcción durante la ocurrencia del siniestro) adolecían de problemas y patologías estructurales internas en los meses y días previos al colapso. Tal es el caso que las grietas en la fachada de la Torre II fueron reportadas en tiempo (Hecho 13: Noviembre de 2008) por parte de los residentes de la Torre II a la Constructora Solarium S.A. quien hizo caso omiso y solo hasta la asamblea extraordinaria de octubre de 2009, se comprometió a intervenir con prontitud a comienzos el año 2010 (Hecho 19), compromiso que nunca cumplió, dando lugar a los hechos (21-29) por los cuales se demandó solidariamente a la Fiduciaria de Colombia S.A., cuando es culpa de la Constructora.

Esta defensa, alegando causa extraña[xxviii], específicamente busca desvirtuar la presunción en contra y que le imputa a mi poderdante la responsabilidad civil[xxix] por el hecho del tercero que es la Constructora Solarium S.A., quien en virtud del contrato de “administración delegada”[xxx] tenía la guarda de la construcción[xxxi], la cual configura actividad peligrosa (art 2356 CC)[xxxii], y de lo que llevaba construido de la Etapa dos, presumiéndose su responsabilidad por el hecho de las cosas inanimadas[xxxiii].

 

  1. c) ¿Es responsable la constructora de cometer infracción urbanística y de los daños que haya podido causar la obra construida al modificarse el proyecto original que consta en las licencias de construcción solicitadas por la fiduciaria?

La Constructora Solarium alegará que los daños ocasionados por la mala calidad estructural de las Torres II y III son responsabilidad de la Fiduciaria de Cundinamarca que le dio, supuestamente, órdenes de modificar el proyecto original en contravención de las licencias (Art. 1 Decreto 564 de 2006)[xxxiv] de demolición, urbanización[xxxv] y construcción[xxxvi] expedidas por la Curaduría Tercera de Bogotá (Hecho 6).

Ahora bien, hay que tener en cuenta que fue la misma Constructora la que aportó inicialmente los planos de urbanización y construcción, en tiempo récord (Hecho 3); que fue la misma constructora quien previó la creación de un terraplén con columnas sobresalientes del terreno para estabilizar la construcción de ‘El Mirador del Parque Torres III y IV’ (Hecho 11); que por haberse extendido en el tiempo, la fiduciaria se vio precisada a solicitar la renovación de las licencias de construcción por dos años más; que a los dos meses de terminada la primera etapa por parte de la Constructora, “los nuevos residentes de la Torre II reportan la aparición de algunas grietas en la fachada del edificio” (Hecho 13); y que la Constructora reconoció su incumplimiento al comprometerse con la asamblea a realizar las reparaciones futuras (Hecho 19) que a fecha del siniestro no se efectuaron, dejando pasar dos años desde que se reportaron las grietas en la Torre II.

Igualmente, hay que tener en cuenta que siendo el Dr. Roberto Meléndez, gerente de la Constructora Solárium S.A., es también un ingeniero (Ley 842 de 2003, art. 1)[xxxvii] que como diseñador del proyecto estaría sujeto a las reglas del mandato (2063 y 2069 CC y 1262 ss C.Co.), y no podría excusar su responsabilidad como profesional de la construcción alegando que, aunque sabía que las reformas vulneraban las licencias de construcción y las normas de sismo resistencia, guardó silencio, no consultó con los órganos competentes, como el comité asesor ni la asamblea de inversionistas, y siguió una orden que nunca se le dio. Aun cuando ello pusiera en peligro la obra para la cual se le contrató, la constructora habría podido oponerse[xxxviii].

Sin embargo, como se ha venido demostrando, la constructora es responsable de los daños ocasionados por el perjuicio ya que, en calidad de mandataria (1263 C.Co.)[xxxix], se excedió en lo encomendado al llevar a cabo modificaciones sustanciales (Hecho 18) y no simplemente de los acabados[xl], para los que se le dio dos meses (Hechos 17 y 18: Junio-Septiembre de 2009) para plantear unas reformas en estos y no las modificaciones de diseño que implementó en la construcción sin autorización expresa y especial en el proyecto original, y sin consultar con la Asamblea de Inversionistas del Patrimonio Autónomo, que es el órgano con la labor de autorizar cambios y modificaciones en el proyecto urbanístico (Hecho 7) y en especial las modificaciones de cálculo y diseño “no previstas en la licencia de construcción”, lo que incurre en infracción urbanística (Art. 1 L. 810 de 2003)[xli] de “construcción en terrenos aptos en contravención a la licencia (Ley 810 de 2003, art. 2º, núm. 3º)[xlii], que haría acreedora a la constructora de una sanción de “8 a 15 SMLDV. Tope 200 SMLMV por metro cuadrado de intervención o construcción. Suspensión de servicios públicos domiciliarios”.

 

  1. ¿Constituyen las lluvias causa extraña (caso fortuito) eximente de la responsabilidad de la Fiduciaria por los daños causados por el derrumbe de un edificio en construcción o la ruina de la fachada de uno ya construido?

Lo más grave en cuanto a la Torre III del Proyecto el Mirador del Parque Etapa II es que de haberse diseñado y construido por parte de la Constructora Solarium S.A. cumpliendo la totalidad de los requisitos aplicables de la Ley 400 de 1997[xliii] y sus Decretos Reglamentarios (NSR-98), sin llevar a cabo las reducciones estructurales “al máximo posible de las columnas y paredes estructurales”, “cambiando a composición de los materiales constructivos para hacerlos un poco más baratos” (Hecho 18), que la Fiduciaria nunca le solicitó que llevara a cabo en reunión de Junio de 2009 (Hecho 17), la construcción no hubiese presentado el colapso que presentó (Hecho 21) así haya habido una nota de advertencia del IDEAM (Hecho 12) o un “fuerte aguacero” (Hecho 21) característico del “Fenómeno de la Niña” en la tarde del siniestro.

Es cuestionable que la Constructora Solarium S.A., como todo un profesional con el deber de “anticipar o prever los riesgos de daños que su actividad pueda causar a terceros” alegue caso fortuito y fuerza mayor[xliv],  a través de su gerente que el siniestro del 20 de junio de 2010 (Hecho 21) es “consecuencia de la ola invernal. Nunca habíamos experimentado lluvias de esta duración y magnitud. Hicimos todo lo posible para prevenir el incidente, pero las fuerzas de la naturaleza nos vencieron” (Hecho 23), porque si hubiera sido así, otros edificios aledaños sin las enfermedades estructurales de las Torres II y III, se hubieran caído, haciendo del hecho una causa extraña irresistible, como no fue en el caso ni lo probó la Constructora Solarium para poder exonerarse en su responsabilidad. Ni siquiera pudiendo llamar en garantía[xlv] a Seguros Bolívar porque incurrió en causal de exclusión de la cláusula cuarenta y siete según la cual “la compañía de seguros no responderá de los daños causados por problemas de diseño en el proyecto arquitectónico o que se hayan derivado de la inestabilidad del terreno” (Hecho 9).

 

  1. e) ¿Hay conflicto de interés eximente de responsabilidad para la fiduciaria cuando el gerente de la fiduciaria y el gerente del patrimonio autónomo, quien es también funcionario de la fiduciaria, celebran un contrato de mutuo sobre un fideicomiso administrado por la misma fiduciaria?

La conducta del Doctor Ramiro Forero Corzo (gerente general de la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A.) y del Dr. Ricardo Plazas Meneses (abogado, empleado de la Fiduciaria y Gerente del Patrimonio Autónomo ‘Proyecto Torres El Mirador del Parque, P.A.’) podría ser censurable porque al celebrar contrato de mutuo con garantía hipotecaria por U$ 1 millón del fondo ‘Inversiones Especiales’, administrado por el Dr. Forero, para financiar las obras de la segunda etapa del Proyecto (Hechos 16 y 17), podrían haber incurrido en un conflicto de interés, ya sea como administrador de la sociedad fiduciaria (L. 222/95, art. 23, núm. 7º)[xlvi], como del fondo de inversiones especiales (D. 2555/2010, art. 3.1.11.1.1)[xlvii] y que le prohibiría llevar a cabo operaciones entre fondos que administra.

Aunque el demandante afirme que la FIDUCIARIA DE CUNDINAMARCA S.A. es responsable indirecto por la conducta de sus empleados que tienen funciones de dirección, confianza y manejo (2347 CC) o culpa in eligendo, en este caso no se puede hablar simplemente de empleados subordinados a la Fiduciaria por un contrato de trabajo, sino de administradores puesto que el Gerente está vinculado a la Fiduciaria como un Administrador[xlviii] en virtud del contrato social o de los estatutos de la sociedad. Administrador que, valiéndose del conocimiento privilegiado y de su posición como Gerente de la Fiduciaria, habría podido realizar actos en flagrante conflicto de interés[xlix] que se salían de sus deberes de actuar “buena fe, con lealtad y con la diligencia de un buen hombre de negocios” en interés de la sociedad (art. 23 L. 222/95), siendo de esta manera responsable “solidaria e ilimitadamente de los perjuicios que por dolo o culpa ocasionen a la sociedad, a los socios o a terceros.” (Art. 200 C.Co).

Contrario a esto, parte de la doctrina, admite eventualmente la posibilidad de que el fiduciario otorgue créditos al fideicomiso sin incurrir en causal de conflicto de interés, siempre y cuando se tenga como objetivo la consecución del encargo que hace parte del contrato[l]. Consecución que se vio peligrada cuando la asamblea de inversionistas no aprobó un nuevo aporte para financiar la segunda etapa del proyecto, de tal manera que sería dable afirmar que de buena fe (871 CCO), los gerentes que celebraron el préstamo del dinero para obtener los fondos necesarios para cubrir los sobrecostos causados por la poca previsión de la Constructora en la planificación del proyecto, que puso en peligro la consecución del encargo para el que fue contratada la Fiduciaria y constituido el patrimonio autónomo, no incurrieron en causal de conflicto de interés ni orquestaron operaciones encaminadas a contravenir los intereses de los fiduciantes, de los inversionistas ni de los beneficiarios del proyecto.

 

  1. f) ¿Sería responsable la fiduciaria a título personal por las obligaciones contractuales o extracontractuales del patrimonio autónomo del que es vocera?

El a quo debió declarar probada en primera instancia la excepción previa de falta de legitimación en la causa por pasiva (artículo 97 del Código de Procedimiento Civil modificado por el artículo 6º de la Ley 1395 de 1010) impetrada oportunamente por esta defensa en escrito separado a la contestación de demanda, pero que, en clara vía de hecho y flagrante vulneración del debido proceso (29 CN), el juez consideró inadmisible a pesar de que “el apoderado de las víctimas del Cortijo presentó demanda de responsabilidad civil contra la constructora Solarium, la Fiduciaria de Cundinamarca y los propietarios de los apartamentos de la Torre II”, convocando a la Fiduciaria en nombre propio (Hecho 26) al proceso cuando ese llamado, indiscutidamente, debió ser al Patrimonio Autónomo en sí (1238 C.Co) y/o a la Fiduciaria, en su calidad de vocera y administradora (inc. 2º del art. 2.5.2.1.1. del Decreto 2555 de 2010)[li] del patrimonio autónomo constituido en virtud del contrato de fiducia inmobiliaria, teniendo en cuenta que entre los efectos jurídicos de la constitución del patrimonio autónomo se encuentra la limitación de la responsabilidad patrimonial de las obligaciones, contractuales o extracontractuales, de la fiduciaria, su exclusión de la garantía general de los acreedores de la fiduciaria y su capacidad legal para concurrir procesalmente, ya sea como demandante, demandado o tercero (D. 2555/2010 art. 2.5.2.1.1., inc. 3º reglamentario de los artículos 1233 y 1234 del Código de Comercio)[lii].

De tal manera que, al no haberse demandado a la persona sobre la cual recaía la responsabilidad indemnizatoria reclamada, se presentó una falta de legitimación en la causa por pasiva, razón por la cual las pretensiones de los demandantes deben confirmarse denegadas en consideración de que este hecho fue alegado en excepción previa (142 C. de P.C.). De todos modos, se le solicita al Tribunal Superior – Sala Civil que reconozca oficiosamente los hechos que constituyan una excepción, especialmente si esta conduce a rechazar todas las pretensiones de los demandantes (Art. 306 CPC).

 

III. PRETENSIONES: Con base en todo lo anterior, solicito muy comedidamente a la Sala:

  1. i) Confirme la Sentencia del Juzgado Primero Civil del Circuito en el proceso de la referencia[liii] denegando las pretensiones de la parte actora.
  2. ii) Declare denegadas las pretensiones incoadas por la parte actora.

iii) Confirme probada la excepción de Hecho de un Tercero como eximente de responsabilidad civil extracontractual impetrada por esta parte contra las pretensiones de los accionantes.

  1. iv) Declare eximida a la Fiduciaria de Cundinamarca S.A. de toda responsabilidad frente a los sucesos y los daños que son objeto de este proceso.
  2. v) Condénese a la parte demandante en las costas del proceso.
  3. vi) Señale fecha y hora para audiencia de sustentación ante el Tribunal Superior de Bogotá – Sala Civil en los términos del art. 360 del C. de P.C.[liv]

 

De los Honorables Magistrados,

 

 

 

Eddy Fictio

  1. C. No. 1.010.198.508 de Bogotá

T.P. 200914402

Apoderado de la Fiduciaria de Cundinamarca S.A. (Demandada)

Abogado de la firma Rodríguez Solarte y Asociados


 

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[i] Como “El examen debe entregarse marcado únicamente con el código de estudiante”, uso este nombre ficticio inspirado en http://www.taringa.net/post/humor/5368844/Nombres-chistosos.html

[ii] El escrito se presenta siguiendo la estructura y forma de un Alegato de Conclusión en el ficticio pero verídico proceso de responsabilidad civil extracontractual iniciado por ‘Víctimas de El Cortijo’ contra Constructora Solarium S.A., Fiduciaria de Cundinamarca S.A. y “Torres el Mirador del Parque” P.H. Según el rol asignado (No. 4. La firma Rodríguez Solarte y Asociados: Abogados de la Fiduciaria de Cundinamarca) presentó Alegato de Conclusión sobre la reconstrucción de los Hechos Relevantes del Examen de Facultad que “se ha elaborado con base en numerosas fuentes documentales”, lo que supone que ya se ha superado el período de práctica de pruebas, tanto en la primera como en la segunda instancia, del proceso verbal de mayor cuantía (Título XXI modificado por la Ley 1395 de 2010, artículo 20.TRÁMITE DE LOS PROCESOS DECLARATIVOS) y se está en la etapa de los alegatos de conclusión antes del fallo por parte del Tribunal Superior de Bogotá –Sala Civil—el cual alegóricamente designa al “tribunal conformado por profesores de planta o cátedra” que evalúa el Componente Oral del Examen de Facultad.

[iii]Artículo 360.-Modificado por el Decreto 2282 de 1989, Artículo 1. Num. 178. Apelación de sentencias. Ejecutoriado el auto que admite el recurso, o transcurrido el término para practicar pruebas, se dará traslado a las partes para alegar por el término de cinco días a cada una, en la forma indicada para la apelación de autos.

Inciso 2º modificado por la Ley 1395 de 2010, artículo 16. Cuando la segunda instancia se tramite ante un Tribunal Superior o ante la Corte Suprema, de oficio o a petición de parte que hubiere sustentado, formulada dentro del término para alegar, se señalará fecha y hora para audiencia, una vez que el proyecto haya sido repartido a los demás Magistrados de la sala de decisión. Las partes podrán hacer uso de la palabra por una vez y hasta por treinta minutos, en el mismo orden del traslado para alegar y podrán entregar resúmenes escritos de lo alegado. La sala podrá allí mismo dictar la respectiva sentencia.

A la audiencia deberán concurrir todos los Magistrados integrantes de la Sala, so pena de nulidad de la audiencia. http://www.lexbasecolombia.net.ezproxy.uniandes.edu.co:8080/lexbase/codigos/codigo%20de%20procedimiento%20civil/codigo%20de%20procedimiento%20civil.htm

[iv] Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia del 16 de mayo de 2011. Rad. No. 52835-3103-001-2000-00005-01. M.P. William Namén Vargas: Acción ordinaria de responsabilidad civil: “tiene por finalidad la reparación del daño directo y personal causado a uno o varios sujetos determinados o determinables, se dirige contra el agente o los varios autores in solidum (artículo 2344, Código Civil), y salvo disposición legal in contrario, exige demostrar a plenitud todos sus elementos constitutivos, conforme a  su especie, clase y disciplina normativa”. “En síntesis, nada obsta el ejercicio de la acción de responsabilidad civil ordinaria para la reparación del daño inferido a una pluralidad de sujetos, ya en virtud del quebranto directo a su persona, integridad, derechos, bienes, valores e intereses, ora a consecuencia de la lesión al ambiente, desde luego sometida a todas sus exigencias normativas. Al mismo tiempo, el Código Civil consagra las acciones populares en los artículos 1005, 1006 y 2359 y la Ley 99 de 1993 las refiere en su artículo 75.”

[v] Por cuestiones de brevedad, no se transcriben sino que se citan los Hechos Relevantes que están enumerados (1-29) en el caso del Examen de Facultad 2015-1. Coordinador: Mauricio Rengifo Gardeazábal. Facultad de Derecho de la Universidad de los Andes.

[vi] El Profesor Mauricio Rengifo, Coordinador del Examen de Facultad, manifestó en su sesión de resolución de preguntas que sobre los hechos 1-15 no hay ninguna controversia, siendo relevantes los hechos 16 y ss. donde “empiezan las partes un poco oscuras en el manejo (…) que relatan pues todo el problema” (44:47-45:05). Posteriormente dijo: “yo resaltaría del caso como centrales el punto 16 y el punto 21. Así que esos son los dos hechos, digamos, más importantes” (49:32-49:42). No obstante, los parafraseo en cada uno de los problemas jurídicos que van a continuación.

[vii] “Contestada la demanda principal y la de reconvención si la hubiere, o vencido el término de traslado de las excepciones previas y de mérito, el Juez citará a las partes para que comparezcan con o sin apoderado a la audiencia de que trata el artículo 101 del Código de Procedimiento Civil, con el fin de llevar a cabo la audiencia de conciliación, saneamiento, decisión de excepciones previas y fijación del litigio, además de llevarse a cabo el interrogatorio de partes. Siendo precisamente en esta audiencia donde las partes van a fijar el litigio, que no es otra cosa que determinar sobre qué hechos se está o no de acuerdo, y que admitan confesión, haciendo referencia a las excepciones, para proceder a aceptarlas si es el caso, con la finalidad de que el litigio se reduzca al mínimo, o deje de existir motivo para continuarlo.” (Díaz Hernández & Zapata Pereira, 2012)

[viii] Artículo 633 del Código Civil.—Se llama persona jurídica, una persona ficticia, capaz de ejercer derechos y contraer obligaciones civiles, y de ser representada judicial y extrajudicialmente.

[ix] Art. 1226.-La fiducia mercantil es un negocio jurídico en virtud del cual una persona, llamada fiduciante o fideicomitente, transfiere uno o mas bienes especificados a otra, llamada fiduciario, quien se obliga a administrarlos o enajenarlos para cumplir una finalidad determinada por el constituyente, en provecho de éste o de un tercero llamado beneficiario o fideicomisario.

Una persona puede ser al mismo tiempo fiduciante y beneficiario.

Solo los establecimientos de crédito y las sociedades fiduciarias, especialmente autorizados por la Superintendencia Bancaria, podrán tener la calidad de fiduciarios.

http://www.lexbasecolombia.net.ezproxy.uniandes.edu.co:8080/lexbase/codigos/codigo%20de%20comercio/Codigo%20de%20Comercio.htm

[x] “En efecto, concebido el contrato de fiducia en forma global, el fiduciario no está en capacidad de garantizar la obtención del beneficio pretendido por el fideicomitente al contratar. Dada la naturaleza de su gestión existen una serie de áleas que ni siquiera un fiduciario prudente y diligente está en capacidad de eliminar. Así, por ejemplo, si el fiduciario tiene el encargo de invertir una suma de dinero en la compra de acciones o de bienes inmuebles y luego de hecha la inversión, el patrimonio autónomo sufre pérdidas como consecuencia de la inversión, el fiduciario no responde por una obligación de resultado, pues es capaz de impedir el álea de libre juego de la oferta y la demanda de bienes y servicios. Ahora, ello no significa que por existir dicho álea el fiduciario nunca sea responsable. Lo será si no tomó las precauciones propias y esperables de ese tipo de profesionales” (Peña Nossa, 2010, pág. 257).

[xi] Estatuto Orgánico del Sistema Financiero. Art. 29 núm. 3. Prohibición general. Los encargos y contratos fiduciarios que celebren las sociedades fiduciarias no podrán tener por objeto la asunción por éstas de obligaciones de resultado, salvo en aquellos casos en que así lo prevea la ley. http://www.lexbasecolombia.net.ezproxy.uniandes.edu.co:8080/lexbase/normas/decretos/1993/D0663de1993.htm

[xii] “La Corporación de modo reiterado tiene adoptado como criterio hermenéutico el de encuadrar el ejercicio de las actividades peligrosas bajo el alero de la llamada presunción de culpabilidad en cabeza de su ejecutor o del que legalmente es su titular, en condición de guardián jurídico de la cosa, escenario en el que se protege a la víctima relevándola de demostrar quién tuvo la responsabilidad en el hecho causante del daño padecido cuyo resarcimiento reclama por la vía judicial, circunstancia que se explica de la situación que se desprende de la carga que la sociedad le impone a la persona que se beneficia o se lucra de ella y no por el riesgo que se crea con su empleo.”

– Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia del 26 de Agosto de 2010. Rad. No. 4700131030032005-00611-01. M.P. Ruth Marina Díaz Rueda: Actividad peligrosa: “…aunque lícita, es de las que implican riesgos de tal naturaleza que hacen inminente la ocurrencia de daños,…”(G.J. CXLII, pág. 173, reiterada en la CCXVI, pág. 504), o la que “… debido a la manipulación de ciertas cosas o al ejercicio de una conducta específica que lleva inscrito el riesgo de producir una lesión o menoscabo, tiene la aptitud de provocar un desequilibrio o alteración en las fuerzas que –de ordinario- despliega una persona respecto de otra”

-“Debe resaltarse, de conformidad con las súplicas deprecadas, que la que se busca establecer en lo que atañe a la persona jurídica por ser titular de la actividad peligrosa de conducción de energía eléctrica es la denominada “culpa presunta”, en la que el accionante está relevado de probar este elemento, siéndole suficiente establecer los dos restantes, como son el daño y el nexo causal. Por el contrario, la que se ejercita frente a los otros tres codemandados es la que alude a la “culpa probada”, cuyo debate probatorio, además de los dos últimos requisitos, también involucra el primero, es decir, la “culpa”.”

“La exoneración de responsabilidad en tratándose de la “culpa presunta” tiene un escenario restringido que queda circunscrito a la ruptura de la relación de causalidad por ocurrencia de caso fortuito o fuerza mayor o “culpa exclusiva de la víctima”; mientras la que se origina en la “culpa probada” tiene un campo de acción mayor, ya que la demandada tiene a su alcance para liberarse la posibilidad adicional de aducir y comprobar que obró sin negligencia, descuido o incuria”.

[xiii] “La Corte Suprema de Justicia considera igualmente que mientras que la fiducia mercantil implica la transferencia de la propiedad de los bienes que son de su objeto, la constitución de un patrimonio autónomo y su afectación a la finalidad fiduciaria, el encargo fiduciario comporta la transferencia de la mera tenencia. Pero “cuando el encargo fiduciario atañe a cosa de género, fungible y, más concretamente a dinero en cuanto perecen para el que las emplea como tales (CC, art. 663), la naturaleza, características y singularidad normativa de estos bienes presupone la entrega, está la tradición y excluye la transferencia de la mera tenencia”. Por tanto, en sentir de la Corte el encargo fiduciario sobre dinero, “bien genérico, fungible, intercambiable, sustituible y consumible jurídicamente implica su entrega y ésta para quien la hace o utiliza por su simple empleo, la transferencia de su dominio en virtud de las normas que gobiernan las obligaciones de género y fungibles, lo que no empece para distinguirlo de la fiducia mercantil en virtud de la constitución del patrimonio autónomo. Y termina diciendo la Corte, que “por el contrario, en el encargo fiduciario sobre una especie o cuerpo cierto, no se presenta la transferencia del dominio, sino la mera tenencia” (CSJ, Sala de Casación Civil, sent. De 30 Julio 2008, M.P. William Namén Vargas” (Giraldo & Guzmán, 2012, pág. 371)

[xiv][xiv] Fideicomiso de Inversión: “de acuerdo con el numeral 2º del artículo 29 del Estatuto Orgánico del Sistema Financiero se entiende por ‘fideicomiso de inversión’ todo negocio fiduciario con sus clientes, para beneficio de éstos o de los terceros designados por ellos, en el cual se consagre como finalidad principal o se prevea la posibilidad de invertir o cobrar a cualquier título sumas de diner, de conformidad con las instrucciones impartidas por el constituyente, con lo previsto en dicho Estatuto y con las normas reglamentarias aplicables” (CBJ Título V, Capítulo I, Nº 2.9, lit. a).

[xv] “Es el negocio fiduciario que en términos generales, tiene como finalidad la administración de recursos y bienes afectos a un proyecto inmobiliario o a la administración de los recursos asociados al desarrollo y ejecución de dicho proyecto, de acuerdo con las instrucciones señaladas en el contrato”

[xvi] “diligencia y cuidado que los hombres emplean ordinariamente en sus negocios propios”

[xvii] “Es un acto de confianza en virtud del cual, una persona entrega a una Sociedad Fiduciaria uno o más bienes determinados transfiriéndole o no la propiedad, con el propósito de que cumpla con ellos una finalidad específica, bien sea en beneficio del fideicomitente o de un tercero. Es un instrumento ágil y flexible mediante el cual se pueden realizar innumerables finalidades lícitas, por eso, tradicionalmente se ha sostenido que ‘es un traje hecho a la medida’. Las entidades autorizadas en Colombia para desarrollar negocios fiduciarios de carácter comercial, son las sociedades fiduciarias autorizadas por la Superintendencia Financiera de Colombia” (AMV Colombia, 2012)

[xviii] “La delegación, como concepto, está particularmente regulada en el contrato de mandato. Supone, en general, la posibilidad que tiene una persona que ha recibido un encargo de colocar a otra en su lugar para que realice los deberes propios de dicho encargo, tome las decisiones inherentes a las facultades otorgadas y asuma, en principio, las responsabilidades derivadas de las mismas. En esto constituiría una delegación perfecta o propia y, de suponer una sustitución del primer deudor por otro, tendría efectos novatarios, liberando de responsabilidad al delegante y radicándola en cabeza del delegado.

(…) pero volviendo al mandato, también es importante destacar cómo, de no estar expresamente autorizado el mandatario para delegar, “responderá de los hechos del delegado como de los suyos propios”. Igual cosa ocurrirá “aún cuando se le haya conferido expresamente la facultad de delegar, si el mandante no le ha designado la persona y el delegado era notoriamente incapaz o insolvente” (2161 CC)

(…) El problema central tiene que plantearse en torno a lo que es el encargo fundamental porque si bien es concebible, como acabamos de verlo, que ciertas tareas se deleguen, tal posibilidad tiene que entenderse en el sentido de que a través de ella se realicen finalidades complementarias o de soporte, pero no permitiría sostener que cabe delegar en un tercero, bajo ninguna circunstancia, el ejercicio de la totalidad de las facultades del fiduciario, pero sobre todo, de aquellas obligaciones que dicen directa y esesncialmente con la obtención de la finalidad para la cual se celebró el negocio” (Rodríguez Azuero S. , 2005, págs. 284-288)

[xix] “(…) el fiduciario que se encarga de administrar la construcción de un edificio tiene que ejecutar ciertas gestiones tendientes al obtener un resultado positivo para el beneficiario. Por ejemplo, tendrá la obligación de controlar y revisar la ejecución de la obra y del presupuesto. A lo que no se obliga es a que, pese a dicha gestión, el beneficio esperado no se consiga. Es allí donde está el carácter de obligación de medios”. (Peña Nossa, 2010, pág. 258)

[xx] El artículo 1234 del Código de Comercio establece en forma específica como deberes indelegables del fiduciario, los siguientes: «1o) Realizar diligentemente todos los actos necesarios para la consecución de la finalidad de la fiducia; 2o) Mantener los bienes objeto de la fiducia separados de los suyos y de los que correspondan a otros negocios fiduciarios;3o) Invertir los bienes provenientes del negocio fiduciario en la forma y con los requisitos previstos en el acto constitutivo, salvo que se le haya permitido obrar del modo que más conveniente le parezca; 4o) llevar la personería para la protección y defensa de los bienes fideicomitidos contra actos de terceros, del beneficiario y aún del mismo constituyente; 5o) Pedir instrucciones al Superintendente Bancario cuando tenga fundadas dudas acerca de la naturaleza y alcance de sus obligaciones o deba apartarse de las autorizaciones contenidas en el acto constitutivo, cuando así lo exijan las circunstancias. En estos casos el Superintendente citará previamente al fiduciante y al beneficiario; 6o) Procurar el mayor rendimiento de los bienes objeto del negocio fiduciario, para lo cual todo acto de disposición que realice será siempre oneroso y con fines lucrativos, salvo determinación contraria del acto constitutivo; 7o) Transferir los bienes a la persona a quien corresponda conforme al acto constitutivo o a la ley, una vez concluido el negocio fiduciario, y 8o) Rendir cuentas comprobadas de su gestión al beneficiario cada seis meses».

http://www.lexbasecolombia.net.ezproxy.uniandes.edu.co:8080/lexbase/codigos/codigo%20de%20comercio/Codigo%20de%20Comercio.htm

[xxi][xxi] “Para la convocante la delegación que hiciera la fiduciaria, en especial para la construcción del edificio, también se convierte en un factor de incumplimiento. Pero lo que se evidencia en este proceso arbitral es que tanto fideicomitente como fiduciaria convinieron que la sociedad Eduardo Medrano y Cia S. en C., a la sazón uno de los cuatro constituyentes se encargara de la construcción como gerente. Y si eso es así, no puede aceptarse que la fiduciaria transgredió el contrato de fiducia por ese hecho, además, dentro de las herramientas que cuenta una fiducia inmobiliaria está precisamente la de permitir que un tercero profesional en la materia se haga cargo de la construcción. Con mayor razón si se conviene, de común acuerdo entre fideicomitente y fiduciario la persona que ha de cumplir ese cometido y más si recae en uno de los fideicomitentes.

(…) Adicionalmente, a los actos del delegado no se les enrostra ninguna clase de responsabilidad en la construcción del edificio, en los términos fijados en los contratos (…). En todo caso, de existir responsabilidad del llamado contractualmente gerente delegado por los actos realizados, le sería imputable, en principio, a él si proviene de la desatención de los deberes previstos en los contratos de fiducia, pero no a la fiduciaria.” (Construcciones Ampomar Ltda. Y otros vs. Sociedad Fiduciaria Extebandes S.A. – Fidubandes S.A. en liquidación, ago. 9/01. Centro de Arbitraje y Conciliación. Cámara de Comercio de Bogotá).

[xxii] “Es el negocio fiduciario en virtud del cual se transfiere un bien inmueble a la sociedad fiduciaria son perjuicio de la transferencia o no de otros bienes o recursos, para que administre el proyecto inmobiliario, efectúe los pagos asociados a su desarrollo de acuerdo con las instrucciones señaladas en el acto constitutivo y transfiera las unidades construidas a quienes resulten beneficiarios del respectivo contrato.

En desarrollo de este negocio, la sociedad fiduciaria puede asumir la obligación de efectuar la escrituración de las unidades resultantes del proyecto inmobiliario”.

[xxiii] “Un profesional poder ser o actuar como un consumidor frente a otro profesional respecto a la adquisición de bienes o servicios que no hacen parte de su actividad especializada, esto es, no constituyen su negocio propio o si se trata de una sociedad, no fluyen del ejercicio directo de su objeto social aunque contribuyan a lograrlo y, por lo tanto, no hace parte de su expertise” (Rodríguez Azuero S. , 2005, pág. 267)

[xxiv] Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia del 28 de Octubre de 1975. M.P. Humberto Murcia Ballén: “(l)as personas jurídicas, así las privadas como las públicas, se hallan abrazadas por los principios legales regulativos de la responsabilidad Civil, tanto de orden contractual como extracontractual.(…) la Corte por la analogía jurídica, ya desde el siglo pasado advirtió que sin embargo de que el Título XXXIV del Libro 4º del Código Civil no se refiere en forma expresa a la responsabilidad por culpa aquilina de las personas jurídicas, dichas regulaciones si las comprenden implícitamente. Por lo consiguientes, con fundamento en el principio cardinal que domina la materia, consignando en el precepto objetivo de que todo daño imputable a  culpa de una persona debe ser reparado por ésta, y en la regla subjetiva de que  todo el que ha sufrido un daño tiene derecho a ser indemnizado, consagró la responsabilidad Civil extracontractual para los entes morales, tanto de derecho privado como de derecho público.”

Doctrina de la Responsabilidad Indirecta: “…frente a la personas jurídicas de derecho privado y público, a causa de las culpas cometidas en daño de terceros, por sus funcionarios de todo orden o nivel, en ejercicio de sus funciones o con ocasión de ellas, acogió inicialmente la jurisprudencia de la Corte y a la  que se le dio absoluto predominio hasta bien avanzado el presente siglo. Fundada en los conceptos de culpa “in eligendo” e “in vigilando”, estimo la corporación que ora la mala elección o ya la falta de vigilancia del empresario, permitía proyectar en  la persona moral la actividad incuriosa o negligente  de sus dependientes o subordinados.

A la luz de esta doctrina la responsabilidad aquilina de tales entes jurídicos debe gobernarse siempre por la preceptiva legal contenida en los artículos 2347 y 2349 del Código Civil, pues que, en tal supuesto, no es la persona moral que actúa, sino sus empleados o funcionarios “del propio modo que obran los agentes o subordinados de una persona física”.

Consecuencias obvias de esta forma de responsabilidad indirecta son, en primer lugar, que la presunción establecida en contra de la persona moral puede ser infirmada o desvirtuada por ésta demostrando ausencia de culpa; en segundo, que el damnificado puede reclamar la indemnización frente a la persona jurídica o frente a la autor del daño, en caso de exigirla de la primera a éste, le asiste, dado el carácter solidario de la obligación, derecho a ser reembolsada por el último; y finalmente, que la acción indemnizatoria prescribe en plazos diferentes, según sea la una o el otro el sujeto pasivo del proceso correspondientes.”

Doctrina de la Responsabilidad Directa: “la “teoría basada en la culpa ‘in eligendo’ y en la ‘in vigilando’ ha situado esta especie de responsabilidad del Estado por causa de funcionamiento de servicios públicos en el campo de la  responsabilidad por el hecho ajeno; pero en realidad ésta forma de responsabilidad por otro que se presenta en los casos determinado en la ley cuando una persona que está bajo la dependencia o cuidado de otra un daño a un tercero, que no pudo impedir el responsable con la autoridad y cuidado que su respectiva calidad le confiere y prescribe  (artículos 2347, 2348, 2349 C.C.)” Dos modificaciones de la doctrina de la Responsabilidad Directa: “Consistió la primera en la adopción de la tesis llamada “organicista”, según la cual la persona jurídica incurre en responsabilidad directa cuando los actos que realiza o sus omisiones se deben a las personas de sus directores o agentes,  a otras que ejecutan expresamente su voluntad; y en responsabilidad indirecta en los demás casos. Se estableció, pues, en punto de responsabilidad aquilina de los entes jurídicos colectivos, una dualidad, fundada en la relación existente entre la persona moral y al física autora del hecho culposo.” Y “la segunda modalidad de la responsabilidad directa, aplicable exclusivamente  a la personas jurídicas de derecho público, en la tesis conocida con la expresión “fallas del servicio”, según la cual es deber del Estado “reparar los daños que cause a los ciudadanos por el funcionamiento inadecuado de los servicios públicos, con secundaria consideración a la falta imputable  a los agentes encargados legalmente de poner en actividad esos servicios. No se puede  ordinariamente en el análisis de estos casos aislar la culpa del funcionario encargado normalmente de accionar el servicio público de lo que es propiamente su función oficial”.

-“Al amparo de la doctrina  de la responsabilidad directa que por su vigor jurídico la Corte conserva y reitera hoy, procede afirmar, pues, que cuando se demanda  a una persona  moral para el pago de los perjuicios ocasionados por el hecho  culposo de sus subalternos, ejecutado en  ejercicio de sus funciones o con ocasión  de éstas no se demanda al ente jurídico como tercero obligado a responder de los actos de sus dependientes, sino él como directamente responsable del daño.

[xxv] “El daño puede definirse como aquella lesión patrimonial o extrapatrimonial, causada en forma lícita o ilícita, que el perjudicado no está en el deber jurídico de soportar” (Corte Constitucional, 2001, sentencia C-100 )

[xxvi] Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia de Junio 30 de 1962. M.P. José J. Gómez R. Responsabilidad Indirecta: “a. Existe una responsabilidad civil indirecta de la persona moral privada y pública, basada en el hecho dañoso de sus agentes, por los actos ejecutados en ejercicio de sus cargos o con ocasión de los mismos cualesquiera que sea la posición jerárquica de aquéllos y la especie o calidad de sus funciones o tareas; b. Se presume la culpa de la persona moral, porque ésta tiene la obligación de elegir el personal y de vigilarlo diligentemente; c. Dicha presunción puede desvirtuarse probando ausencia de culpa; d. Existe, además una responsabilidad  personal de autor del daño frente a la víctima; e. Responden solidariamente al damnificado la persona jurídica el agente infractor, con el derecho de la primera a ser reembolsada por el último; f. La acción indemnizatoria contra la persona moral prescribe en tres años, contra el autor, si se trata de infracción penal, en el lapso de prescripción de la pena, o en veinte años, si de cuasidelitos, y g. Le sirven de arraigo a esta doctrina, especialmente, los citados artículos 2347 y 2349 del Código Civil, que tratan de la responsabilidad indirecta por los hechos llamados “ajenos”.”

[xxvii] Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia del 8 de Octubre de 1992 M.P. Carlos Esteban Jaramillo Schloss Expediente No. 3446: “… le basta al actor demostrar que el perjuicio se causó por motivo de la generación, transformación, transmisión y distribución de energía eléctrica [actividad peligrosa, 2356 CC] para que el responsable de estos quehaceres –en el concepto del autor, dueño, empresario o explotador—quede bajo el peso de la ameritada presunción legal (..) de cuyo efecto indemnizatorio no puede liberarse del todo sino en tanto pruebe el concurso exclusivo de una causa extraña que podrá consistir en la fuerza mayor, en un caso fortuito o en la intervención de un elemento no imputable al demandado y que haya determinado la consumación del accidente…”

[xxviii] Corte Suprema de Justicia – Sala de Casación Civil. Sentencia del 16 de mayo de 2011. Rad. No. 52835-3103-001-2000-00005-01. M.P. William Namén Vargas: “El nexo de causalidad entre el hecho dañoso y la culpa de los demandados, porque si bien se demostró hasta la saciedad que hubo un daño, y que consistió en la contaminación que generó el derramamiento de petróleo ecuatoriano (…) se acreditó de igual manera “la existencia de unas causas extrañas, rompen de un tajo el nexo causal entre la presunción de culpa que recaía en las entidades demandadas y los supuestos perjuicios que sufrieron las sociedades demandantes”.

[xxix] “Para comprender el tema debemos comenzar por conocer el significado de la expresión responsabilidad. El diccionario de la Real Academia de la Lengua Española la define como: “[…] Capacidad existente en todo sujeto activo de derecho para reconocer y aceptar las consecuencias de un hecho realizado libremente”, u otra de sus acepciones es: “[…] responsabilidad que entra en juego en defecto de la directa y principal de otra persona” (Diccionario Real Academia de la Lengua Española).

Al mismo tiempo, hay que conocer el término de responsabilidad civil, el cual es reparar, por medio de una indemnización pecuniaria, el daño que se ha causado a otros, de manera que ser civilmente responsable significa “estar obligado a reparar por medio de una indemnización, un perjuicio sufrido por otras personas” (Martin, en línea). A ello cabe agregar que la obligación de reparar nace, cuando alguien resulta perjudicado como consecuencia de la violación de un deber jurídico preexistente, pues los individuos están sometidos a un ordenamiento jurídico, con el doble alcance de observar el deber de cumplir las normas o de atenerse a las consecuencias derivadas del incumplimiento, que consiste en este caso, en la indemnización de daños y perjuicios.” (Vallejo Garcés, 2012)

[xxx] “Ahora bien, los empresarios dedicados a la actividad de la construcción incurren en responsabilidad civil en

los términos del artículo 2060 del Código Civil, específicamente cuando el contrato de obra lo hayan celebrado

por un precio único prefijado. Sin embargo, si se trata de arquitectos, de conformidad con lo establecido en el

artículo 2061 de la misma obra, tales profesionales incurrirán en la misma responsabilidad independientemente

de la modalidad contractual en virtud de la cual se hayan obligado. De igual forma, la doctrina y la jurisprudencia

arbitral han considerado que la responsabilidad civil a que se hace alusión puede ser aplicada analógicamente a

los constructores que actúan por administración delegada, en cuanto a su actuación como directores de la obra

(Tamayo Jaramillo y Laudo arbitral de 16 de febrero de 2004 en el caso Conavi vs. Conconcreto)

(…)En este punto es relevante tener presente que la principal obligación del empresario en un contrato de obra es una obligación de resultado, con las consecuencias jurídicas que de allí se derivan en materia de prueba del incumplimiento y en el manejo de las cargas probatorias respecto del factor de imputación y de los mecanismos de exoneración (Cas. Civ. de 2 de junio de 1958 y laudo arbitral de 16 de febrero de 2004 Conavi vs. Conconcreto). Sin perjuicio de lo anterior, debe tenerse en cuenta que si el contrato de obra se ha celebrado por administración delegada, las obligaciones que el constructor haya contraído para con el dueño de la obra y que se refieran a actividades de asesoría o a su intervención como mandatario de éste, son típicas obligaciones de medio, con las consecuencias que igualmente a ellas les son aplicables.” (Solarte Rodríguez, 2014)

[xxxi] “La responsabilidad civil en la construcción puede ser contractual o extracontractual y puede surgir a partir de daños que se causen durante la construcción y en los diez años siguientes a la entrega de la obra o de la edificación. Las instituciones de responsabilidad civil aplicables son diversas, a saber: responsabilidad contractual por incumplimiento de obligaciones de resultado, responsabilidad por actividades peligrosas y responsabilidad por el hecho de las cosas. No obstante lo anterior, la exhaustividad normativa es mínima, situación que facilita la presencia de diferentes asuntos problemáticos, respecto a la realidad actual de la construcción.” (Posada Arango, 2011)

[xxxii] Corte Suprema de Justicia, Sentencia de mayo 3 de 1965: “actividad peligrosa entendida como todas aquellas que el hombre realiza mediante el empleo de cosas o energía susceptible de causar daño a terceros”

[xxxiii]Responsabilidad por el hecho de las cosas inanimadas: Este tipo de responsabilidad ha sido desarrollado a partir de la normatividad referente a la responsabilidad por la ruina de un edificio. El Código Civil establece un régimen especial para aquellos casos en que la ruina de un edificio cause un perjuicio a otro, por haberse omitido las reparaciones necesarias o por vicios en la construcción, materiales o suelo. Como todo tipo de responsabilidad, para que la obligación de indemnizar se configure, es necesaria la existencia de un daño, de un hecho culposo o doloso y de un nexo de causalidad entre los anteriores. Lo excepcional de este régimen está en la presunción de culpa que recae sobre la persona que ejerce la guarda del objeto inanimado que causó el daño. Para determinar quién es el guardián de la actividad, la jurisprudencia ha establecido que es necesario mirar cuáles fueron las causas del daño. De esta forma, para el caso de edificios ruinoso, en principio la presunción recaerá sobre la persona que tiene el derecho real de dominio sobre el edificio. Sin embargo, si el propietario se desprende del derecho de tenencia o uso, o pierde la posesión de la cosa, el responsable será aquella persona que tenga la dirección efectiva sobre el bien que causa el daño. En suma, la presunción de culpa se predica sobre el sujeto que tenga la dirección, control y manejo del objeto y tal presunción sólo podrá ser desvirtuad si se prueba la existencia de causa extraña.” (Facultad de Derecho de la Universidad de los Andes, 2006)

[xxxiv] Licencia: “la autorización previa, expedida por el curador urbano o la autoridad municipal o distrital competente”.

[xxxv] Licencia de urbanismo: “Es la autorización para organizar en un predio los espacios abiertos (públicos o privados y ejecutar las obras de infraestructura necesaria para soportar el conjunto de edificaciones previstas, de conformidad con el plan de ordenamiento territorial del municipio o distrito. Son modalidades de la licencia de urbanismo las autorizaciones concedidas para la parcelación de un predio en suelo rural o de expansión urbana, para el loteo o subdivisión de predios para urbanización o parcelación y el cerramiento temporal durante la ejecución de las obras autorizadas (Ley 400 de 1997, art. 3)

Pueden solicitar licencias de construcción y urbanismo los titulares de derechos reales principales, los poseedores, los propietarios del derecho de dominio a título de fiducia y los fideicomitentes de las mismas fiducias (Ley 400 de 1997, art. 8).

El estudio, trámite y expedición de las licencias de construcción y de urbanismo es competencia de los curadores urbanos (Ley 400 de 1997, art. 6)” (Vallejo García, 2005, pág. 69)

[xxxvi] Licencia de Construcción: “Es la autorización para levantar en un predio construcciones con sujeción a lo previsto en el plan de ordenamiento territorial y las normas urbanísticas del municipio o distrito. Son modalidades de la licencia de construcción las autorizaciones para ampliar, adecuar, modificar, cerrar y demoler construcciones (D. 1052 de 1998, art. 4.).

Toda construcción debe adelantarse conforme a los planos arquitectónicos y estructurales que sirvieron de base para la obtención de la licencia (Ley 400 de 1997, art. 7)” (Vallejo García, 2005, pág. 69)

[xxxvii] Campo de Ejercicio de la ingeniería: (i) Los estudios, la planeación, el diseño, el cálculo, la programación, la asesoría, la consultoría, la interventoría, la construcción, el mantenimiento y la administración de construcciones –incluidas las siguientes: edificios y viviendas de toda índole (…)”. (Vallejo García, 2005, pág. 58)

[xxxviii] “Creemos que por ser esta una obligación de resultado, es claro un supuesto de responsabilidad objetiva; quienes sólo se exoneran probando una causa extraña, no pudiéndose exonerar de responsabilidad mediante la prueba de la no culpa, ni con la culpa de la víctima, ya que el constructor debe aconsejar a su mandante y negarse a seguir sus sugerencias u órdenes cuando representen un peligro cualquiera para la obra, salvo que el mandatario o propietario sea notoriamente experto y se encuentre clasificado por encima del constructor en la jerarquía de las competencias” (Velásquez Moreno, 2005, pág. 306)

[xxxix] “1263. EL mandato comprenderá los actos para los cuales haya sido conferido y aquellos que sean necesarios para su cumplimiento.

El mandato en general no comprenderá los actos que excedan del giro ordinario del negocio, o negocios encomendados, salvo que se haya otorgado autorización expresa y especial”

[xl] “Partes y componentes de una edificación que no hacen parte de la estructura o su cimentación” (Asociación Colombiana de Ingeniería Sísmica, págs. A-93 Capítulo A.13 Definiciones y nomenclatura del Título A)

[xli] Infracción Urbanística: “toda actuación de construcción, ampliación, modificación, adecuación y demolición de edificaciones, de urbanización y parcelación que contravengan los planes de ordenamiento territorial y las normas urbanísticas”.

[xlii] “Precisa la Sala que las especificaciones técnicas descritas en una licencia de construcción deben ser acatadas con precisión y exactitud por quien ejecuta la obra, pues, como en el caso en estudio, su desconocimiento puede acarrear inestabilidad de obra, poniendo en peligro la propia construcción y los derechos a la vida y la propiedad ajenos. Por tal razón la ley 9 de 1989, formada por la 388 de 1999, atribuyen a los alcaldes municipales la vigilancia de la ejecución de las construcciones acorde con la licencia respectiva. En cuanto al hecho de la servidumbre de vista que la actora endilga en su vecino este no es aspecto que quepa ventilar en este proceso sino que conforme con los arts 913 y 915 del C.C., corresponde a un trámite que se debe adelantar ante la jurisdicción civil, o que legitima instaurar tramitar la querella respectiva. En relación con la cuantía de la multa impuesta, cabe anotar que el decreto 1052 de 1998, artículo 86, numeral 3, prevé multas sucesivas entre 50 y 300 salarios mínimos por contravenciones a la licencia de construcción. En este caso, establecido el incumplimiento de los términos de la licencia de construcción concedida, se colocó la mínima sanción prevista” (Lemus Chois & Lemus Chois, 2009, págs. 148. Consejo de Estado. Sección Primera, C.P. Olga Inés Navarrete Barrero, 5 de septiembre de 2002. Rad. Noº 1999-0623-01)

[xliii]  “Artículo 6º. Responsabilidad de los diseñadores. La responsabilidad de los diseños de los diferentes elementos que componen la edificación, así como la adopción de todas las medidas necesarias para el cumplimiento en ellos del objetivo de las normas de esta ley y sus reglamentos, recae en los profesionales bajo cuya dirección se elaboran los diferentes diseños particulares.” Y “Artículo 48. Alcance y contenido mínimo. Los títulos enumerados en el artículo anterior deben contener, como mínimo, el siguiente alcance y contenido científico y técnico: “A) Título A. Requisitos generales de diseño y construcción sismo resistente. Debe contener como mínimo los siguientes temas: “(…) “14. Los requisitos sísmicos que deben cumplir los elementos no estructurales de acuerdo con el grado de desempeño sísmico que se requiera en función del uso de la edificación. (…) “C) Título C. Concreto estructural. Debe contener los requisitos mínimos que se deben cumplir en el diseño y construcción de estructuras de concreto estructural y sus elementos. Debe incluir, como mínimo, los siguientes temas: “(…) “2. Requerimientos mínimos de capacidad de disipación de energía en el rango inelástico de los elementos de concreto estructural, para efectos de su diseño sismo resistente, y su utilización en las diferentes zonas de amenaza sísmica.”

[xliv] Ley 95 de 1890. Artículo 1º.-SE llama Fuerza mayor o caso fortuito, el imprevisto a que no es posible resistir, como un naufragio, un terremoto, el apresamiento de enemigos, los autos de autoridad o ejercidos por un funcionario público, etc.”

“El artículo 64 del Código Civil, subrogado por el artículo 1 de la Ley 95 de 1980, (Sic, LexBase: debe ser Ley 95 de 1890) define “fuerza mayor” o “caso fortuito” como “el imprevisto a que no es posible resistir, como un naufragio, un terremoto, el apresamiento de enemigos, los autos (sic) de autoridad ejercidos por un funcionario público, etc. Es así que las inundaciones causadas por lluvias excesivas parecieran incluirse dentro del listado no taxativo de la norma citada. Si el análisis se redujera a lo dicho, frente a las situaciones que agobian a muchos colombianos desde el segundo semestre de 2010, la respuesta del derecho sería una exoneración de responsabilidad para cualquiera que hubiera podido resultar demandado con ocasión de supuestos de hechos como el descrito. No obstante, las decisiones de la Sala Civil de la Corte Suprema de Justicia admiten una restricción de los conceptos mencionados y, con ellos, la precisión del concepto de obligaciones del sujeto que puede intervenir en la actividad sobre la cual recae el elemento extraño.” (Ariza Fortich, 2011)

[xlv] “El llamamiento en garantía es una de las modalidades de intervención forzosa y se encuentra regulado por el artículo 57 del C. de P. C. así “Quien tenga derecho legal o contractual de exigir de un tercero la indemnización del perjuicio que llegare a sufrir, o el reembolso total o parcial de pago que tuviere que hacer como resultado de la sentencia podrá pedir citación de aquél, para que en el mismo proceso se resuelva sobre tal reclamación

Con base en esta norma, cuando el tercero demanda al asegurado, la aseguradora puede ser llamada en garantía por parte de este último. Ciertamente el asegurado puede, obtener el reembolso hasta concurrencia del importe asegurado y tanto el demandante como el demandado podrían formular tal llamamiento. Pero, como se trata de una facultad y no de una obligación, si no se apela a esta figura no se producen vicios de tipo procesal pero sí pueden derivarse perjuicios para el asegurador quien no podrá intervenir en la defensa de sus intereses solicitando, la práctica de pruebas.

Esta alternativa tiene la ventaja de que por ser independientes todas las actuaciones del llamado en garantía, este no se encuentra limitado por el contenido de las peticiones de quien formula el llamamiento. La sentencia se pronuncia con carácter definitivo sobre las relaciones del llamado y del llamante o sea que tiene efectos de cosa juzgada entre asegurado y asegurador. El llamado debe acudir al proceso porque si se le notifica y no comparece la actuación se puede adelantar con curador ad litem.

Pero el llamamiento en garantía debió haberse instituido, en el caso de las aseguradoras como obligatorio60. Ante el silencio legislativo se ha optado por incorporar en el contrato de seguro, a cargo del asegurado, la obligación de llamar en garantía al asegurador por la vía contractual con el fin de que este pueda hacer valer sus intereses de manera adecuada y solicitar pruebas; también para poder evitar, como lo advierte Hernán Fabio López, que asegurado y víctima adelanten, de común acuerdo, el juicio con el objetivo de acreditar la prueba exigida, por la aseguradora, para efectuar el pago61.

Como lo señala dicho procesalista, al juez le está vedado hacer llamamiento de oficio pues la figura, que se regula en al artículo 58 del C. de P. C., le exige que haya fraude o colusión y compulsar copias para la investigación penal, y la figura de la coadyuvancia no es la más conveniente para el asegurador dadas las limitaciones relacionadas con la posibilidad de formular solicitudes contrarias, a las de la parte a la que se coadyuva62.

La recomendación práctica que surge de todo lo anterior, es que la víctima demande al asegurado y a la aseguradora, pero, como, a favor de aquella no se instituyó un mecanismo que le permita saber de la existencia del contrato de seguro, y, en general los avances jurisprudenciales son desconocidos por parte de los no expertos en seguros, lo más probable es que demande al causante del daño caso en el cual, para la interrupción del término de prescripción se requerirá de la formulación del llamamiento en garantía al asegurador, cuestión que ha sido solucionada por los aseguradores al insertar una cláusula en la que claramente se contempla tal obligatoriedad.

(…) Cabe anotar que, en el articulado de las pólizas colombianas se transcribe, de manera expresa, la posibilidad de ejercer la potestad legal exceptiva a que se refiere el artículo 1044 del Código de Comercio, por virtud de la cual el asegurador puede oponer al beneficiario las mismas excepciones que hubiese podido alegar contra el tomador o el asegurado; no obstante no podemos dejar de advertir que esta es otra de las estipulaciones, de naturaleza claramente semiimperativa, susceptible de modificación, por la vía contractual, a favor del asegurado, beneficiario o tomador, motivo por el cual no se requería de una consagración legal que lo prohibiera como lo hizo el decreto 4828 del año 2008 que regula los términos de la póliza de responsabilidad civil en la contratación estatal.”. (Zornosa Prieto, 2011)

[xlvi] “De acuerdo con los conceptos de la Superintendencia Financiera 95017190-0 y 2007059749-001 del 15 de mayo de 1995 y 28 de diciembre de 2007, respectivamente, “Se entiende por conflictos de interés las situaciones de interferencia entre esferas de interés, en las cuales una persona podría aprovechar para sí o para un tercero las decisiones que él mismo tome frente a distintas alternativas de conducta en razón de la actividad misma que desarrolla y del especial conocimiento que tenga y cuya realidad implicaría la omisión de sus obligaciones legales, contractuales o morales a las cuales se haya sujeto”” (Hernández Limongi, 2011)

[xlvii] “Las sociedades fiduciarias en calidad de administradoras de fondos de inversión, se abstendrán de realizar cualquiera de las actividades mencionadas a continuación: 3. Conceder préstamos a cualquier título con dineros del fondo, salvo tratándose de operaciones de reporto, simultáneas y de transferencia temporal de valores, en los términos del artículo 3.1.4.1.6 del Decreto 2555 de 2010” (…) 12. Utilizar, directa o indirectamente los activos de los fondos para otorgar reciprocidades que faciliten la realización de otras operaciones por parte de la sociedad administradora o de personas vinculadas con esta, ya sea mediante la adquisición o enajenación de valores a cualquier título, la realización de depósitos en establecimientos de crédito, o de cualquier otra forma”.

[xlviii] “La expresión “administradores” incluye a todas aquellas personas que cumplen funciones específicas relacionadas con el patrimonio y los intereses sociales, sin importar la denominación que se les asigne” (Castro de Cifuentes, pág. 137)

[xlix] “En el Título V de la ya citada Circular Externa 007 de 1996, se entenderá que hay conflicto de intereses, entre otros, en las siguientes operaciones: En los negocios celebrados entre fideicomisos administrados por una misma sociedad fiduciaria.

En los negocios celebrados entre la fiduciaria y sus vinculados y los fideicomisos administrados por la sociedad fiduciaria.

En conclusión, salvo los eventos ya referidos, corresponde a la entidad fiduciaria, dada su condición de agente profesional del mercado y, por lo mismo, conocedor de todos los elementos fácticos jurídicos y económicos emanados de su relación con sus clientes (rol que podría asumir el Banco Central para el desarrollo de algunas de sus propias operaciones) determinar, de manera previa a la celebración del negocio, si de una determinada operación y prevención de conflictos de interés se encuentra en cabeza de los administradores de las entidades financieras (Superfinanciera Conc. 2008062493, nov. 4 2008)” (Hernández Limongi, 2011)

[l] Sergio Rodríguez Azuero considera “altamente criticable la posición de la Superintendencia Bancaria (Concepto Nº 97040816-0 de agosto de 1997) que prescribe, por vía general, la posibilidad de que el fiduciario otorgue créditos al fideicomiso, al punto de calificarla como práctica insegura y no autorizada y que solo podría entenderse en sentido restringido, para evitar, quizás, hacer préstamos destinados a realizar inversiones u operaciones de negocios en beneficio del patrimonio autónomo, pero no para impedir la realización de expensas necesarias para la consecución del fin que se le ha encomendado en particular cuando situaciones de extrema delicadeza y gravedad lo imponen” (Rodríguez Azuero S. , 2005, pág. 265)

[li] Artículo 2.5.2.1.1 Derechos y deberes del fiduciario. Los patrimonios autónomos conformados en desarrollo del contrato de fiducia mercantil, aun cuando no son personas jurídicas, se constituyen en receptores de los derechos y obligaciones legales y convencionalmente derivados de los actos y contratos celebrados y ejecutados por el fiduciario en cumplimiento del contrato de fiducia.

El fiduciario, como vocero y administrador del patrimonio autónomo, celebrará y ejecutará diligentemente todos los actos jurídicos necesarios para lograr la finalidad del fideicomiso, comprometiendo al patrimonio autónomo dentro de los términos señalados en el acto constitutivo de la fiducia. Para este efecto, el fiduciario deberá expresar que actúa en calidad de vocero y administrador del respectivo patrimonio autónomo.

En desarrollo de la obligación legal indelegable establecida en el numeral 4 del artículo 1234 del Código de Comercio, el Fiduciario llevará además la personería del patrimonio autónomo en todas las actuaciones procesales de carácter administrativo o jurisdiccional que deban realizarse para proteger y defender los bienes que lo conforman contra actos de terceros, del beneficiario o del constituyente, o para ejercer los derechos y acciones que le correspondan en desarrollo del contrato de fiducia.

Parágrafo. El negocio fiduciario no podrá servir de instrumento para realizar actos o contratos que no pueda celebrar directamente el fideicomitente de acuerdo con las disposiciones legales.

http://www.lexbasecolombia.net.ezproxy.uniandes.edu.co:8080/lexbase/normas/decretos/2010/D2555de2010.htm

[lii] “En consecuencia, no se identifica jurídicamente el fiduciario cuando actúa en su órbita propia como persona jurídica, a cuando lo hace en virtud del encargo que emana de la constitución de la fiducia mercantil, sin perjuicio, claro está, de que eventualmente pueda ser demandado directamente por situaciones en que se le sindique de haber incurrido en extralimitación, por culpa o por dolo en detrimento de los bienes fideicomitidos que se le han confiado, hipótesis en la cual obviamente se le debe llamar a responder por ese indebido proceder por el que en realidad ya no puede resultar comprometido el patrimonio autónomo.

No erró [el a quem], entonces, al verificar la falta de legitimación en la causa por pasiva, bajo el entendimiento de que la fiduciaria obró contractualmente en la condición de fiduciario y de esa misma manera debió demandarse atendidas las explicaciones precedentes que, si bien no coinciden exactamente con las dadas por el ad quem, permiten concluir también que no era dable demandar directamente a la nombrada sociedad fiduciaria, o a quien hoy hace sus veces, para hacer recaer los efectos de la renovación del contrato en sus propios bienes, sino a ella como vinculada a ese patrimonio autónomo en el carácter indicado. De allí que los cargos primero y segundo que por vías distintas pretenden que se acepte la legitimación directa de la sociedad fiduciaria, bajo el argumento de que el patrimonio autónomo no tiene capacidad negocial ni para ser parte de un proceso, no están llamados a prosperar” (CSJ, Cas. Civil. Sent. Ago 3/2005. Exp. 1999. M.P. Silvio Fernando Trejos).

[liii] Teniendo en cuenta la congestión judicial y el vacío que dejan los hechos, para efectos del presente componente escrito del examen de Facultad, se supone que después de varios años se dio trámite a la primera instancia del proceso con un resultado desfavorable a la parte demandante que apeló la sentencia del Juzgado Civil del Circuito de Bogotá –el cual fue competente en la primera instancia del proceso de responsabilidad civil extracontractual de mayor cuantía.

[liv] Por medio de esta pretensión le solicito al profesor evaluador del presente componente escrito del Examen de Facultad que me asigne un puntaje suficiente para aprobarlo, y así poder llevar a cabo la “Defensa oral del producto o concepto del rol asignado al estudiante ante un tribunal conformado por profesores de planta o cátedra” el día 28 de mayo de 2015. De esta forma, asemejo el tribunal conformado por profesores de planta o cátedra de la Facultad de Derecho a los tres Magistrados que conforman la Sala Civil del Tribunal Superior de Bogotá, quienes hipotética y analógicamente, admitirán mi sustentación de los alegatos de conclusión, lo que se reflejará en la sentencia a favor de la Fiduciaria de Cundinamarca S.A.

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Examen de Facultad – Rol 2

Rol. 2. La Comunidad Yuluka

Las personas que asuman la defensa de los intereses de la Comunidad Yuluka deben justificar, tanto teórica como normativamente,  por qué es esta comunidad la llamada a juzgar el comportamiento de Delfino Siagama con base en sus propias normas y procedimientos. En otras palabras, deben justificar por qué la Jurisdicción Especial Indígena (JEI) es la jurisdicción competente para resolver este conflicto. Adicionalmente,  deben indicar cuál sería  el mecanismo procesal adecuado para alcanzar este cometido, teniendo en cuenta el estado de las actuaciones procesales que se narran en los hechos del caso.

En respuesta al concepto jurídico solicitado por la Comunidad Yoluka, se le aconseja a sus Autoridades que soliciten a la Justicia Ordinaria la entrega del proceso para ser conocido por la propia Jurisdicción Especial Indígena (JEI) del pueblo Yoluka de acuerdo con el procedimiento del Adierak en virtud de la presunta violación del deber de honor, reciprocidad y respeto por parte de las conductas realizadas por el Sr. DELFINO SIAGAMA, los cuales son valores fundamentales al orden social, cultural y político del pueblo Yoluka con fundamento en los siguientes,

 

  1. HECHOS RELEVANTES:
  2. La COMUNIDAD YOLUKA se encuentra localizada en un resguardo indígena, territorio ancestral donde sus miembros viven de acuerdo a sus valores fundamentales, entre los que se encuentra la ceremonia y procedimiento del Adierak, por medio del cual ejercen la Jurisdicción Especial sobre los miembros que infringen sus normas, tradiciones y valores fundamentales al orden social de la comunidad.
  3. DELFINO SIAGAMA es un indígena nacido en el territorio ancestral de la Comunidad Yoluka el primero de julio de 1995.
  • Luego de haber terminado su Bachillerato y gracias a su desempeño académico en el programa de etnoeducación en las escuelas interculturales iniciadas con la Constitución de 1991, en diciembre del año 2013 recibe una beca por parte del Ministerio de Educación.
  1. En el barrio Bosa Laureles de Bogotá, JORGE ELIZONDO y otros miembros del CABILDO YOLUKA le dieron la bienvenida honrando el deber de hospedar y acoger al que llega.
  2. En virtud de esta tradición Yoluka, Jorge Elizondo lo acoge en su casa, adyacente a la sede principal del Cabildo, donde convive con sus hermanas, Karina y JUANA ELIZONDO.
  3. Juana Elizondo es una menor yoluka nacida el primero de enero de 2001.
  • Desde marzo de 2014, Delfino Siagama, con 19 años, empezó a cortejar a la menor Juana Elizondo, de 13 años y cinco (5) meses, pidiéndole a ella que guardara el secreto de sus hermanos mayores, Karina y Jorge Elizondo, para evitar ser expulsado de la casa.
  • Desde Junio de 2014, el Sr. Siagama y la menor de trece años y siete meses, iniciaron relaciones sexuales, quedando la menor Elizondo embarazada en el mes de agosto.
  1. El 2 de Agosto, el Sr. Siagama confiesa al Sr. Elizondo la situación y se compromete a buscar un trabajo estable para encargarse del embarazo de la menor.
  2. El mismo día, el Sr. Elizondo agrede verbalmente a Delfino y formula denuncia ante la Fiscalía General de la Nación por el Delito de Acceso Carnal Abusivo.
  3. La Fiscal asignada tomó declaración a la menor Juana Elizondo respecto de su relación desde junio.
  • Con base en la denuncia del Sr. Elizondo y el testimonio de Juana Elizondo, la Fiscal solicita la medida de aseguramiento en establecimiento carcelario contra Delfino Siagama.
  • Encontrando los presupuestos para declarar la medida de aseguramiento en establecimiento carcelario y una vez dada la captura, el Juez de Control de Garantías avaló la imputación por el delito de Acceso Carnal Abusivo Agravado y le decretó medida de aseguramiento con detención preventiva de la libertad en la cárcel Modelo de Bogotá, donde Delfino ingresó el 10 de septiembre de 2014.

 

  1. RESOLUCIÓN DE LOS PROBLEMAS JURÍDICOS DEL CASO
  2. ¿La Jurisdicción Especial Indígena (JEI) de la Comunidad Yoluka es competente para conocer y decidir respecto de los hechos que involucran presuntamente a Delfino Siagama en la presunta violación del deber de honor, reciprocidad y respeto por la familia y el hogar que lo hospedó y lo acogió en una casa adyacente a la sede principal del Cabildo Yoluka ubicado en el Barrio Bosa Laureles de Bogotá?

, la Jurisdicción Especial Indígena de la Comunidad Yoluka es competente para conocer los hechos que presuntamente involucran a Delfino Siagama en la presunta violación del deber de honor, reciprocidad y respeto por la familia y el hogar que lo hospedó y lo acogió en una casa adyacente a la sede principal del Cabildo Yoluka ubicado en el Barrio Bosa Laureles de Bogotá porque se cumplen los elementos del “fuero indígena” que son: Delfino Siagama es un indígena yoluka que embarazó a una mujer de su etnia (elemento personal), el hecho ocurrió dentro del territorio extendido de la Comunidad Yoluka (elemento territorial), presuntamente violó los usos y costumbres de su comunidad (elemento objetivo) y pudiendo ser juzgado y sus castigos ratificados por el Consejo de Mayores de la Comunidad (Elemento Institucional). Estos se explican a continuación después de proponer un breve contexto cultural y normativo de la Jurisdicción Especial Indígena y los conflictos y tensiones a los que se enfrenta en un Estado Social de Derecho como el Colombiano.

A fin de fundamentar esta respuesta, en este caso se nos revela una vez más la tensión entre la unidad de la nación, la diferencia y pluralidad de la misma constitución, que Daniel Bonilla denominó como la “Metáfora del Péndulo Constitucional” (MPC)[1] para ilustrar el movimiento interpretativo entre los valores de la unidad cultural[2] y los valores de la diversidad cultural[3] coexistentes en el articulado de la Carta Política dado que Colombia es un Estado que concentra varios modelos de Estado en uno solo[4] (Estado Liberal, Estado Democrático y Estado Social)[5], donde está presente la convivencia entre sujetos étnica y culturalmente diferenciados, se da lugar a que en casos como el planteado, haya tensiones entre un discurso hegemónico de la nación, como unidad y otro contrahegemónico de nación(es), como diversidad[6].

Para solucionar tales tensiones casi antinómicas, la Corte Constitucional ha utilizado diversas tendencias interpretativas[7] como la ponderación[8] entre el derecho a la diversidad étnica y cultural y otro derecho constitucional fundamental en la jurisprudencia, para constatar si es posible o no el diálogo intercultural[9] entre la jurisdicción ordinaria y la jurisdicción especial indígena.

Uno de los principales ejemplos de esta tensión es la redacción del mismo artículo 246 de la Constitución[10], el cual en primer lugar reconoce a las autoridades indígenas el ejercicio de “funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial, de conformidad con sus propias normas y procedimientos” (Valores de la Diversidad Cultural) siempre y cuando el ejercicio de su propia jurisdicción[11], sus normas y procedimientos “no sean contrarios a la Constitución y leyes de la República.”[12] (Valores de la Unidad Cultural).

En contraposición al principio de la “maximización de la autonomía y de la minimización de las restricciones” que ha ido ganando terreno teórico dentro de la Jurisprudencia de la Corte por cuanto ha ido maximizando el principio de la diversidad étnica frente a otros principios o derechos constitucionales, fomentando así el ‘multiculturalismo legal’ (Gómez & Gnecco, 2008, pág. 19), sigue habiendo una presión para la codificación y la burocratización de los derechos indígenas, haciendo peligrar el mismo pluralismo por intentar adaptarse a las lógicas del derecho estatal dominante[13].

El reconocimiento Constitucional de la autonomía jurisdiccional no es absoluto[14] y ha encontrado su aplicación práctica en la determinación de cuatro requisitos para el fuero penal indígena consistente en el derecho de los miembros de las comunidades indígenas, por el hecho de pertenecer a ellas, a ser juzgados por sus autoridades, de acuerdo con sus normas y costumbres y siempre y cuando se respete la Constitución y la Ley. Según la sentencia C-463-2014, que ordenó “Declarar INEXEQUIBLE el artículo 11 de la Ley 89 de 1890” se recogen de la jurisprudencia las subreglas y criterios relevantes para la definición de la competencia de la jurisdicción especial indígena: a) El elemento personal: “hace referencia a la pertenencia del acusado de un hecho punible o socialmente nocivo a una comunidad indígena.”; b) El elemento territorial: “hace referencia a que los hechos objeto de investigación hayan tenido ocurrencia dentro del ámbito territorial del resguardo.” ; c) Elemento institucional: “(a veces denominado orgánico) se refiere a la existencia de autoridades, usos y costumbres, y procedimientos tradicionales en la comunidad, a partir de los cuales sea posible inferir: (i) cierto poder de coerción social por parte de las autoridades tradicionales; y (ii) un concepto genérico de nocividad social.”; d) Elemento objetivo: “hace referencia a la naturaleza del bien jurídico tutelado. Concretamente, a si se trata de un interés de la comunidad indígena, o de la sociedad mayoritaria.”[15].

 

  1. ¿Son violados los derechos del Sr. Delfino Siagama cuando el Juez de Control de Garantías le dictaminó que la medida de aseguramiento en establecimiento carcelario fuera ejercida en la Cárcel Modelo de Bogotá y no en su territorio indígena? (Elemento Subjetivo)

Sí, porque cuando el Sr. Siagama se autoidentifica como indígena y es reconocido por otros indígenas como miembro de la comunidad Yoluka, el hecho de estar siendo procesado por la jurisdicción ordinaria y no por la jurisdicción especial indígena viola el derecho fundamental a la autonomía de la Comunidad Indígena y el derecho fundamental al fuero especial indígena.

Con el fin de definir si Delfino Siagama pertenece a la comunidad Yoluka, como primer elemento personal para la activación de la jurisdicción indígena, hay que analizar los criterios por los cuales se puede adscribir su identificación como indígena para poder argumentar que el proceso penal por el presunto delito de Acceso Carnal Abusivo Agravado infringe el derecho fundamental de la comunidad yoluka de ejercer su autonomía jurisdiccional frente a sus miembros.

Como no existe una definición precisa de quién es indígena y se habla de “indígenas”, “tribus”, “comunidades”, “grupos”, “pueblos”, etc. en el ordenamiento constitucional colombiano porque mientras el artículo 246 habla de “pueblos indígenas” y los artículos 329 y 330 se refieren a “comunidades indígenas”; el artículo 1º Convenio 169 de la OIT (Ley 21 de 1991) [16] aclara que “los elementos que definen a un pueblo indígena son tanto objetivos como subjetivos; los elementos objetivos incluyen: (i) la continuidad histórica, v.g. se trata de sociedades que descienden de los grupos anteriores a la conquista o colonización; (ii) la conexión territorial, en el sentido de que sus antepasados habitaban el país o la región; y (iii) instituciones sociales, económicas, culturales y políticas distintivas y específicas, que son propias y se retienen en todo o en parte. El elemento subjetivo corresponde a la auto‐identificación colectiva en tanto pueblo indígena”.

Igualmente, hay que tener en cuenta que, aunque lo indígena se asocie con vivir en un territorio, la identidad de un indígena es independiente de la permanencia o no a un espacio determinado[17]. Analizando el caso particular, se puede concluir que el Sr. Siagama es un indígena perteneciente a la Comunidad Yoluka porque i) desciende de un grupo étnico anterior a la conquista; ii) tiene una conexión ancestral con el territorio de la Comunidad Yoluka evidenciado en que preserva sus ritos y los celebra cada semana cuando vuelve allí; y iii) que aún en el Cabildo del Barrio Bosa Laureles, sigue viviendo de acuerdo con sus usos y costumbres y en que la educación etnocultural[18] recibida en virtud de la Constitución Nacional (Art. 67) con el fin de preservar su lengua natal (Art. 10 CN) y su identidad cultural (68 CN). Si esto no parece suficiente, a pesar de no existir una definición precisa de “indígena”, prima  el “criterio de autoidentificación” que es el principal para determinar la condición de indígena, tanto individual como colectivamente en tanto pueblos[19] el cual se hace presente cuando tanto el Sr. Siagama, como el Sr. Elizondo, como el Sr. Mutriku se identifican entre ellos sí como miembros de la misma comunidad.

Por otro lado, desde la solicitud de la captura se desconoció la jurisdicción que tiene la autoridad indígena Yoluka, sin siquiera consultar previamente con estas autoridades sobre la procedencia o pertinencia de la captura de uno de sus miembros, al cual se le impuso la medida de detención preventiva sin cumplirse los presupuestos del artículo 308 del CPP y no se le reconoció su calidad de indígena y su correspondiente derecho fundamental al fuero,[20] ni siquiera para la determinación del lugar del cumplimiento de la detención ni para el establecimiento de condiciones especiales para su ejecución que tuvieran en cuenta su condición de indígena que vele por la no afectación cultural del individuo y por la conservación de sus usos y costumbres. De tal modo que, con la imposición de la medida de aseguramiento privativa de la Libertad en la Cárcel Modelo de Bogotá, al señor Siagama se le está privando del derecho que tiene a tener unas condiciones especiales de reclusión[21] de acuerdo con el artículo 29 de la Ley 65 de 1993[22].

 

iii. ¿Es competente la jurisdicción especial yoluka para conocer de hechos presuntamente ocurridos en la casa adyacente a la sede principal del Cabildo Yoluka ubicado en el Barrio Bosa Laureles de Bogotá cuando la Comunidad Yoluka se encuentra en un resguardo localizado en su “territorio ancestral”? (Elemento territorial)

Para responder este problema jurídico, hace falta primero determinar la naturaleza jurídica tanto del resguardo[23] Yoluka como la naturaleza del Cabildo Yoluka ubicado en el Barrio Bosa Laureles de Bogotá y su influencia en el ‘fuero territorial’ de la Jurisdicción Especial Indígena.

Como anteriormente se ha establecido, el artículo 246 de la Constitución señala cómo las autoridades de los pueblos indígenas, como los Yolukas, tienen la potestad de ejercer funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial correspondiente, en aplicación de sus normas y procedimientos consuetudinarios, en consonancia con su autonomía territorial[24], política (CN 171), cultural (CN 7, 10, 68), económica (CN 63, 287, 330) y jurisdiccional (CN 246). No obstante en este caso nos enfrentamos a la indeterminación del ámbito territorial de aplicación y si este puede incluir la competencia de hechos ocurridos en “una casa adyacente” a un Cabildo Indígena ubicado en el Barrio Bosa Laureles de Bogotá.

Como no sobra reiterarlo, la comunidad Yoluka es un pueblo indígena con su propia especificidad  histórica y cultural, como lo reconoce el Convenio 169 de la OIT. No obstante, esta norma internacional ratificada por Colombia en la Ley 21 de 1991 repite la tensión entre los “Valores de la Diversidad Cultural” y los “Valores de la Unidad Cultural”[25], dejando a las legislaciones internas, de los Estados dominantes, que sean aquellas las que lleven a cabo los “Diálogos interculturales”[26], pero con base en sus propios criterios para alcanzar una especie de “consenso multicultural”[27].

Por su parte, la CIDH ha determinado que la relación entre los pueblos indígenas y sus territorios no se limita a las aldeas o asentamientos específicos; sino que el uso y ocupación territorial por los pueblos indígenas y tribales “va más allá del establecimiento de aldeas específicas e incluye tierras que se utilizan para la agricultura, la caza, la pesca, la recolección, el transporte, la cultura y otros fines”; los derechos de los pueblos indígenas y tribales abarcan el territorio como un todo[28]. Teniendo en cuenta lo anterior, cuando se trata de situaciones o hechos que afectan exclusivamente a indígenas, aunque se realicen fuera del territorio ancestral, la jurisdicción indígena puede intervenir, dado el marco cultural y normativo del mismo sigue rigiendo para tales personas.

Todo esto significa que más allá del estatus territorial del lugar donde ocurrieron los hechos, en el caso particular se está solicitando una extensión territorial de la jurisdicción especial yoluka porque las víctimas fueron la familia yoluka que lo acogió en virtud de una tradición de honor y hospitalidad que él irrespetó y la eventual puesta en peligro de una comunidad que se ve privada del derecho de ejercer jurisdicción de acuerdo con su propio derecho, debidamente reconocido en la Constitución y la ley.

 

  1. ¿El procedimiento del Adierak de la Comunidad Yoluka infringe el derecho constitucional fundamental al debido proceso al no estar “especificados sus castigos en cuerpo normativo alguno”? (Elemento Institucional)

Con el propósito de darle respuesta negativa a este problema jurídico, hace falta analizar en primer lugar cuál es el concepto de Derecho y los debates que se han dado alrededor del monismo y del pluralismo jurídico, para concluir que el Procedimiento del Adierak es un sistema normativo que constituye derecho reconocido por el ordenamiento colombiano y que este es ejercido por unas autoridades tradicionales.

Según el monismo jurídico, en un territorio solamente hay un sistema jurídico y una única norma[29]: la estatal. En oposición a esto, para la jurisdicción indígena la legalidad del delito y de la pena están determinados dentro de un Derecho Consuetudinario que maneja unas lógicas diferentes a las de un único derecho estatal escrito en códigos el cual se establece como un discurso que niega la lengua y el derecho oral del otro que pretende construirlo como un sujeto, homogeneizándolo a los parámetros de la cultura dominante[30].

En el caso que nos atañe, hay que hablar de la posibilidad del pluralismo jurídico que admite varios sistemas normativos en un mismo territorio, así esas normas del derecho no estén escritas como el derecho occidental porque incluso desde un concepto de derecho del positivismo[31] –como sistema institucionalizado y coactivo de normas– es admisible la existencia de un sistema jurídico yoluka al verificar que dentro de la Comunidad existe un sistema institucionalizado y coactivo de normas basadas en tradiciones, deberes y valores fundamentales que son generalmente obedecidas en su territorio ancestral y que son aplicadas por la misma Comunidad y ratificadas por el Consejo de Mayores.

De la admisibilidad o no del pluralismo jurídico depende en este caso la resolución de la tensión existente entre el derecho fundamental a la jurisdicción especial indígena, el fuero especial indígena[32], por un lado; y el debido proceso del accionante no una posible violación del derecho fundamental del debido proceso (Art. 29 CN), por el otro. Como el concepto básico del pluralismo jurídico es “una situación en que dos o más sistemas jurídicos coexisten en un mismo jurídico”[33], es reconocible que las tradiciones y deberes presuntamente infringidos por el Sr. Siagama son una vulneración de normas de derecho preexistentes a su conducta, se cumple el requisito que hace parte del núcleo esencial del debido proceso de juzgar a una persona “conforme leyes preexistentes al acto que se le imputa”, entendido este como procedimientos y normas establecidos previamente por la Comunidad y la verificación de un juez natural, o sea la Jurisdicción Especial Yoluka encabezada por el Consejo de Mayores de la Comunidad.

Este límite del debido proceso[34], aunque sea una garantía de legalidad y de imparcialidad en pro del ciudadano, frente a este debe primar la lógica indígena en la resolución de un conflicto, y más cuando esta lógica implica la preservación de la diversidad de sus cosmovisiones, que como ya hemos visto en el presente caso el sujeto procesado por la Fiscalía es un indígena, cumpliéndose el elemento personal desconocido por la Juez de Control de Garantías, que no está siendo juzgado de acuerdo con los parámetros y el derecho de su comunidad, en irrespeto de los consensos mínimos para el ejercicio de su jurisdicción y con base en un principio de legalidad, entendido no como preexistencia de derecho escrito, sino de previsibilidad de las decisiones de las autoridades indígenas en el procedimiento-ritual del Adierak, como lo ha admitido la Corte en diversa jurisprudencia[35].

 

  1. ¿Serían violados los derechos fundamentales de la menor indígena Juana Elizondo, presunta víctima en el proceso penal contra Delfino Siagama, en el evento de asumir la jurisdicción especial Yoluka la competencia para conocer y juzgar al Sr. Siagama de acuerdo con la ceremonia y procedimiento del Adierak por presuntamente violar valores fundamentales de la comunidad Yoluka? (Elemento Objetivo)

Es aquí donde se encuentra la principal tensión entre un valor de la unidad cual es el de la primacía de los derechos de los niños (Art. 44 CN) frente a la diversidad particular de concepciones de la infancia y sus relaciones dentro de las comunidades étnicas y que da lugar a un trato diferenciado de los mismos hechos por el ordenamiento indígena y el nacional. Mientras que para el ordenamiento hegemónico colombiano la presunta conducta del Sr. Siagama de sostener relaciones sexuales y dejar en estado de embarazo a una menor de 13 años se le imputó como el delito de Acceso Carnal Abusivo (Arts. 208 y 211-6 CP), pudiendo imponérsele en virtud del proceso penal, una pena privativa de la libertad de cuatro (4) a ocho (8) años; para la comunidad Yoluka lo desaprobado es la presunta conducta de “mentir y relacionarse sin permiso y de manera clandestina con una mujer de la familia que da hospedaje, comparte su vivienda, comida y abrigo” como una “violación del deber de honor, reciprocidad y respeto” pudiendo imponérsele, en virtud del adierak, castigos que son el ser forzado a recoger alimentos para preparar la primera comida para la comunidad, pedir perdón y recibir humillaciones públicas, trabajar gratis para la familia, recibir azotes con el fuete ceremonial, ser sirviente entre otros castigos observados dentro de las costumbres y tradiciones y que dependen del caso en concreto, pero que son ratificados o no por el Consejo de Mayores.

No obstante esta tensión que se intenta formular en términos jurídicos, se tiene que abordar en términos socioculturales probados en peritajes antropológicos en cada caso. En el caso en concreto, se tiene por probado en los hechos del caso que una niña de 12 años no es considerada menor de edad para la comunidad yoluka, como pasa con otras etnias en el territorio nacional, y puede tener relaciones sexuales con otro miembro de su comunidad pese a que en el Código Penal una relación con un menor de 14 años, así sea consentida, es considerada un abuso.

Según el principio pro infans, reconocido en la jurisprudencia de la Corte, los derechos de los niños “prevalecen sobre los derechos de los demás”, sin embargo este principio se tiene que conciliar con los principios de identidad étnica y de pertenencia a una comunidad[36]. Así que, según la Corte, en cada caso concreto se tiene que ponderar las circunstancias y los criterios jurídicos relevantes, pero sin evaluar el juez exclusivamente desde una perspectiva occidental de los derechos humanos[37], pretendiendo su universalidad.

El hecho principal que se tiene que ponderar en cuanto al elemento objetivo de la jurisdicción indígena, referido este a la naturaleza del bien jurídico tutelado si se trata de un interés de la comunidad indígena o de la sociedad mayoritaria[38], depende primordialmente de la identificación de la menor Juana Elizondo como indígena o no indígena, para determinar si dentro de estas concepciones ella es “menor de edad” o si es una mujer capaz de dar su consentimiento. No obstante, en la eventualidad de que se le conceda conocimiento a la Jurisdicción Yoluka es un prejuicio que piense que el derecho superior del menor no se va a garantizar cuando el caso lo atienda la justicia indígena.

Como ya se ha examinado en hechos anteriores y se tiene por probado que Delfino Siagama fue acogido en un hogar en Bogotá, adyacente al Cabildo Yoluka del Barrio Bosa Laureles y que Jorge Elizondo es un líder de la comunidad, luego entonces, su hermana menor, que vive en este contexto cultural y bajo estas normas tradicionales se ‘autoidentifica’, también como indígena yoluka y por lo tanto no sería una ‘menor de edad’, sino una mujer capaz de dar su consentimiento para tener sexo, haciendo que haya un error de prohibición invencible de la presunta conducta de Delfino, pero esto no lo eximiría, si se prueba, que violó el deber de honor, reciprocidad y respeto al sostener relaciones sin permiso y de manera clandestina con una mujer de la familia que le da hospedaje. Teniendo en cuenta lo anterior, debido a que las cotidianeidad y la rutina como pareja se desarrollaba siempre dentro del Cabildo de Bosa Laureles, cumpliendo de esta manera con los factores personal y territorial de la jurisdicción especial indígena, debe ejercerse la jurisdicción especial yoluka.

 

  1. ¿Serían violados los derechos fundamentales de Delfino Siagama en la eventualidad de que por el procedimiento-ceremonia del Adierak se le ordene como castigo la imposición del ‘fuete ceremonial’ o que se convierta en ‘siriviente’ para ‘trabajar gratis para la familia ofendida’?

Las sanciones o castigos físicos impuestos legítimamente por la comunidad en virtud del procedimiento del Adierak no violan derechos humanos ni constituyen torturas ni tratos crueles, humanos o degradantes[39], sino que son parte fundamental de la justicia Yoluka.

Si bien la Constitución Nacional en su artículo 12 prohíbe las torturas, las penas crueles, los tratos inhumanos o degradantes, la misma en su artículo 7º trata de los principios fundamentales para el reconocimiento y protección del Estado a la diversidad étnica y cultural de la ‘nación’ colombiana, los castigos impuestos legítimamente por la comunidad yoluka hacen parte de su cosmovisión y de sus propia concepción de la justicia ya que no es de la tradición Yoluka la construcción de cárceles para recluir en ellas a los condenados, porque contraría la concepción de la comunidad acerca de la relación hombre-naturaleza que es fundamento de la cosmovisión Yoluka[40]. Por ejemplo, en la sentencia T-523 de 1997[41] se estimó que la pena de fuete y las humillaciones públicas dentro de su comunidad no son una tortura ni un trato inhumano ni degradante, siempre y cuando estos “dolores o sufrimientos sean consecuencia únicamente de sanciones legítimas, o que sean inherentes o incidentales a estas”[42] y al principio de legalidad, que en estos casos es un análisis de previsibilidad: debe ser la que habitualmente impone la comunidad para ese tipo de delitos (T-349 de 1996) la pena tampoco puede ser desproporcionada (T-811 de 2004).

 

III. PROCEDIMIENTO A SEGUIR POR PARTE DE LA COMUNIDAD YOLUKA PARA ASUMIR LA COMPETENCIA JURISDICCIONAL EN ESTE CASO:

Dado que la jurisdicción especial indígena hace parte de la rama judicial del poder público, pero sin pertenecer a la estructura orgánica de la rama Judicial[43] no se explica cómo esta tiene que dirimir sus conflictos de competencia positivos con autoridades ante el Consejo Superior de la Judicatura como si orgánica y jerárquicamente se encontrara debajo de esta corporación. También vale la pena preguntarse por qué conoce la Jurisdicción Constitucional, en sede de revisión de tutela, de fallos de la Jurisdicción Especial Indígena y en muchos casos pasando por encima de su jurisdicción basada en sus propios usos y costumbres, pero no hay casos en los que la jurisdicción indígena revise los fallos de la jurisdicción ordinaria[44] por poder estos infringir las cosmovisiones propias de sus comunidades[45] o la integridad de las jurisdicciones especiales indígenas[46].

Las comunidades indígenas sí son titulares de la acción de tutela[47] y tienen derecho al respeto por la diversidad étnica y cultural, y al ejercicio de la jurisdicción especial indígena, por lo que tiene que ordenarse la remisión del caso a la Comunidad Yoluka y sus autoridades para conocer del proceso[48] debiendo manifestar su voluntad para que sea procedente el fuero ya que el juez ordinario no está obligado a remitir oficiosamente la causa a la autoridad Yoluka[49].

En ausencia de una ley coordinatoria de las jurisdicciones ordinaria y especial indígena, como también la omisión legislativa, porque no se determinó qué tipo de procedimiento se aplica en el conflicto jurisdiccional de competencias, este vacío se puede llenar por la proposición de una audiencia preliminar ante el Juez de Control de Garantías (Código de Procedimiento Penal, Ley 906 de 2004. art. 39). Procedimiento en virtud del cual que la Comunidad de YULUKA a través del Cabildo, organización social y política, representada legalmente por el Gobernador o Autoridad Tradicional[50], eleve una petición ante el Centro de Servicios del Sistema Penal Acusatorio (Llenando un formulario para petición de audiencia preliminares) para que se fije fecha y hora para una Audiencia Preliminar con base en el artículo 153 CPP, el cual dice: “Las actuaciones, peticiones y decisiones que no deban ordenarse, resolverse o adoptarse en audiencia de formulación de acusación, preparatoria o del juicio oral, se adelantarán, resolverán o decidirán en audiencia preliminar, ante el juez de control de garantías”.

En esta audiencia, el Juez de Control de Garantías remite, de acuerdo los artículos 256.6 de la Constitución Política y el artículo 112 de la Ley 270 de 1996[51], que se formule el Conflicto de Competencia Positivo entre la jurisdicción ordinaria y la jurisdicción especial indígena ante Sala Jurisdiccional Disciplinaria del Consejo Superior de la Judicatura, porque si un juez de la jurisdicción ordinaria decide sobre un conflicto de competencias positivo se configura una vulneración al debido proceso ya que su obligación es remitir el caso al Consejo Superior de la Judicatura para que éste, como órgano competente para ejercer dicha función, dirima el conflicto.

Todo este mecanismo no quita que en varios casos la Corte Constitucional, al haber reconocido los elementos de la jurisdicción especial indígena, haya conocido de las sentencias del Consejo Superior de la Judicatura en sede de revisión de tutela por estimar que se configura vía de hecho por el defecto sustantivo en la interpretación del artículo 246 de la Constitución[52] cuando le da competencia de los asuntos indígenas a la jurisdicción ordinaria.

 

 

Bibliografía

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[1] “I- LA TENSION AL INTERIOR DE LA CONSTITUCIÓN DE 1991: UNIDAD CULTURAL VS. DIVERSIDAD CULTURAL.: Tres conflictos analíticamente distinguibles pero prácticamente entrecruzados componen la tensíon al interior de la constitución. La tensión entre el reconocimiento de los distintos principios morales y políticos de los grupos indígenas y la carta de derechos liberales constituyen el primer conflicto. La tensión entre la declaración de que Colombia es un estado unitario y los poderes judiciales y de autogobierno otorgados a los grupos indígenas componen el segundo conflicto de valores políticos. La tensión entre los derechos judiciales y de autogobierno que la constitución concedió a los grupos indígenas y el sistema político y judicial de la cultura dominante, sus procedimientos y reglas sustantivas, estructuran el tercer y último conflicto de ideales.

Estos tres conflictos muestran claramente que la carta política se mueve como un péndulo entre los valores políticos de la diferencia y la unidad cultural. La constitución reconoce el valor de las diferentes tradiciones morales y políticas que guían la vida de las minorías culturales pero al mismo tiempo promulga una amplia carta de derechos liberal.” (Bonilla, 2003, págs. 7-8)

[2] “Colombia como Estado unitario (Art. 1º CN); Derechos fundamentales que se deben respetar a todos los habitantes del territorio (Tit. I Cap. II); la ley y la constitución limitan el ejercicio de los derechos judiciales y de autogobierno otorgados a los indígenas (Arts. 246 y 330 CN)” (Marrero, 2006, págs. 259-260)

[3] “Colombia como un Estado participativo y pluralista (Art. 1º CN); Reconocimiento de igual dignidad a todas las culturas (art. 70); Reconocimiento estatal de la diversidad étnica y cultural del país (Art. 7º); la obligación de proteger las riquezas culturales de Colombia (art. 8º); el establecimiento de la jurisdicción indígena (Art. 246); el reconocimiento de que los territorios indígenas son entidades territoriales (287,288,289); el reconocimiento de la propiedad colectiva de los territorios indígenas (329); la declaración de que los territorios indígenas son inalienables e inembargables (63); el derecho de los grupos indígenas a autogobernarse a través de sus usos y costumbres (330); la declaración de que la explotación de los recursos naturales al interior de los territorios indígenas debe realizarse sin afectar negativamente la integridad cultural y la vida económica y social de las comunidades (330); la obligación del Estado de promover la participación de las comunidades indígenas en el proceso de toma de decisiones relacionado con la explotación de los recursos naturales al interior de sus territorios (330); la creación de una circunscripción electoral especial para los grupos indígenas (171 y 176); el derecho de las comunidades a una educación bilingüe que respete y desarrolle las minorías culturales (10 y 68)” (Marrero, 2006, págs. 259-260)

[4] Corte Constitucional de Colombia. Sentencia T-406/92 M.P. Ciro Angarita Barón: “La incidencia del Estado social de derecho en la organización sociopolítica puede ser descrita esquemáticamente desde dos puntos de vista: cuantitativo y cualitativo. Lo primero suele tratarse bajo el tema del Estado bienestar (welfare State, stato del benessere, L’Etat Providence) y lo segundo bajo el tema de Estado constitucional democrático. La delimitación entre ambos conceptos no es tajante; cada uno de ellos hace alusión a un aspecto específico de un mismo asunto. Su complementariedad es evidente.

  1. El estado bienestar surgió a principios de siglo en Europa como respuesta a las demandas sociales; el movimiento obrero europeo, las reivindicaciones populares provenientes de las revoluciones Rusa y Mexicana y las innovaciones adoptadas durante la república de Weimar, la época del New Deal en los Estados Unidos, sirvieron para transformar el reducido Estado liberal en un complejo aparato político-administrativo jalonador de toda la dinámica social. Desde este punto de vista el Estado social puede ser definido como el Estado que garantiza estándares mínimos de salario, alimentación, salud, habitación, educación, asegurados para todos los ciudadanos bajo la idea de derecho y no simplemente de caridad (H.L. Wilensky, 1975).
  2. El Estado constitucional democrático ha sido la respuesta jurídico-política derivada de la actividad intervencionista del Estado. Dicha respuesta está fundada en nuevos valores-derechos consagrados por la segunda y tercera generación de derechos humanos y se manifiesta institucionalmente a través de la creación de mecanismos de democracia participativa, de control político y jurídico en el ejercicio del poder y sobre todo, a través de la consagración de un catálogo de principios y de derechos fundamentales que inspiran toda la interpretación y el funcionamiento de la organización política”

[5] “Estado Constitucional de Derecho: Sumisión del Estado a las normas del Derecho en el que la constitución es la norma fundante. (…)

Estado social: se desarrolla en garantizarle a los asociados condiciones de vida digna, constituidos en estándares de calidad mínimos, exigiendo de parte del Estado el movimiento necesario, para contrarrestar las desigualdades sociales existentes, ofreciendo a todas las personas las mismas oportunidades para desarrollar sus aptitudes y para operar los apremios materiales.

Estado democrático: participación de la ciudadanía en la toma de decisiones desarrollando los conceptos básicos que se pueden enmarcar dentro de la fórmula de la democracia representativa y democracia participativa sin olvidar el respeto a las minorías sociales y étnicas que pueden encontrar y desarrollar su pensamiento, costumbres e identidades dentro del territorio” [Negritas son mías] (Bernal Castro, 2006, pág. 245)

[6] “En fin, las discusiones sobre nación tienden a decir, más o menos: ‘no es este tipo de comunidad, sino éste’. Mi punto es que, en primer lugar, no estamos hablando de distintas clases de comunidad, estamos hablando de un discurso y de una categoría que tienen mucha utilidad en el juego del poder. El discurso de nación –el nacionismo, en fin– surgió en un contexto que le prestó al discurso sus rasgos definitivos: soberanía e igualdad. En dicho contexto la soberanía tenía que volverse anónima y la igualdad tenía que emerger como hecho, dada la naturaleza del sistema productivo. (…) El propósito es entender a Colombia en términos de algo diferente de una nación, poniendo en entredicho su naciondad y, por ende, la validez del nacionismo, que por muy atractivo que sea, no se adecúa a las cosas” (Lobo, 2009, págs. 33-34)

[7]Liberalismo puro: las autoridades de las comunidades aborígenes tienen siempre que respetar la carta de derechos y las leyes de orden público que protejan un valor superior al de la diversidad cultural” (Corte Constitucional. Sentencia T-254/94 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz)

Liberalismo multicultural:los únicos límites a los poderes judiciales de los grupos indígenas deben ser aquellos valores que son producto de un acuerdo intercultural” (Corte Constitucional. Sentencia T-349/96 M.P. Carlos Gaviria Díaz)

Interculturalidad radical:sólo excepcionalmente se pueden restringir los derechos de las comunidades indígenas, si es el único medio disponible para evitar la desaparición de la cultura tradicional de la comunidad indígena” (Corte Constitucional. Sentencia T-510/98 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz)” [Negritas son mías] (Marrero, 2006)

[8] Corte Constitucional. Sentencia SU-510/98 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz: “considera la Corte que en aquellos eventos en los cuales resulta fundamental efectuar una ponderación entre el derecho a la diversidad étnica y cultural y algún otro valor, principio o derecho constitucional, se hace necesario entablar una especie de diálogo o interlocución – directa o indirecta[5] -, entre el juez constitucional y la comunidad o comunidades cuya identidad étnica y cultural podría resultar afectada en razón del fallo que debe proferirse. La función de una actividad como la mencionada, persigue la ampliación de la propia realidad cultural del juez y del horizonte constitucional a partir del cual habrá de adoptar su decisión, con el ethos y la cosmovisión propios del grupo o grupos humanos que alegan la eficacia de su derecho a la diversidad étnica y cultural. A juicio de la Corte, sólo mediante una fusión como la mencionada se hace posible la adopción de un fallo constitucional inscrito dentro del verdadero reconocimiento y respeto de las diferencias culturales y, por ende, dentro del valor justicia consagrado en la Constitución Política (C.P., Preámbulo y artículo 1°).” [Negritas son mías]

[9] “En su libro [Constitución multicultural], Daniel Bonilla intenta evaluar de manera crítica tanto la teoría política contemporánea sobre el multiculturalismo, como las sentencias de la Corte Constitucional que se refieren al mismo tema. Para ello, el autor clasifica las distintas sentencias de la Corte Constitucional en ciertas tipologías que reflejan, de algún modo, las mismas limitaciones de la filosofía política sobre el multiculturalismo: reconocer solamente a aquellas comunidades liberales, sin poderlo hacer respecto las comunidades que rechazan los postulados del liberalismo” (Valero López, 2014, pág. 3)

[10] CAPITULO 5. DE LAS JURISDICCIONES ESPECIALES

ARTICULO  246. Las autoridades de los pueblos indígenas podrán ejercer funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial, de conformidad con sus propias normas y procedimientos, siempre que no sean contrarios a la Constitución y leyes de la República. La ley establecerá las formas de coordinación de esta jurisdicción especial con el sistema judicial nacional.

[11] Corte Constitucional. Sentencia C-139/96 M.P. Carlos Gaviria Díaz: “El análisis del artículo 246 muestra los cuatro elementos centrales de la jurisdicción indígena en nuestro ordenamiento constitucional: la posibilidad de que existan autoridades judiciales propias de los pueblos indígenas, la potestad de éstos de establecer normas y procedimientos propios, la sujeción de dichas jurisdicción y normas a la Constitución y la ley, y la competencia del legislador para señalar la forma de coordinación de la jurisdicción indígena con el sistema judicial nacional. Los dos primeros elementos conforman el núcleo de autonomía otorgado a las comunidades indígenas -que se extiende no sólo al ámbito jurisdiccional sino también al legislativo, en cuanto incluye la posibilidad de creación de “normas y procedimientos”-, mientras que los dos segundos constituyen los mecanismos de integración de los ordenamientos jurídicos indígenas dentro del contexto del ordenamiento nacional. En la misma estructura del artículo 246, entonces, está presente el conflicto valorativo entre diversidad y unidad.”

[12] Corte Constitucional. Sentencia de Unificación SU 510/98 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz: “La Corte ha señalado que las limitaciones a que se encuentran sujetos los principios de diversidad étnica y cultural y de autonomía de las comunidades indígenas surgen del propio texto constitucional, el cual determina, por una parte, que Colombia es un Estado unitario con autonomía de sus entidades territoriales y, de otro lado, que la autonomía política y jurídica de las comunidades indígenas, es decir, la capacidad para gobernarse y ejercer funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial, puede ejercerse conforme a sus usos y costumbres, siempre y cuando éstos no sean contrarios a la Constitución y a la ley. Lo anterior determina que, en materia de comunidades indígenas, la Carta Política consagre un régimen de conservación de la diversidad en la unidad. Según la Corte, «sólo con un alto grado de autonomía es posible la supervivencia cultural», afirmación que traduce el hecho de que la diversidad étnica y cultural, como principio general, sólo podrá ser limitada cuando su ejercicio desconozca normas constitucionales o legales de mayor entidad que el principio que se pretende restringir. Según la jurisprudencia, en principio, la efectividad de los derechos de los pueblos indígenas, determina que los límites susceptibles de ser impuestos a la autonomía normativa y jurisdiccional de tales comunidades, sólo sean aquellos que se encuentren referidos «a lo que verdaderamente resulta intolerable por atentar contra los bienes más preciados del hombre.» La Corporación ha aceptado que se produzcan limitaciones a la autonomía de las autoridades indígenas siempre que estas estén dirigidas a evitar la realización o consumación de actos arbitrarios que lesionen gravemente la dignidad humana al afectar el núcleo esencial de los derechos fundamentales de los miembros de la comunidad.”

[13] “La jurisprudencia del Estado multicultural garantiza la legitimidad y la operación de la jurisdicción especial indígena mientras cumpla los siguientes requisitos: (a) que existan autoridades tradicionales que puedan ejercer funciones jurisdiccionales (elemento orgánico); (b) la definición de un elemento territorial donde ejerzan su autoridad (elemento geográfico); (c) la existencia de usos y prácticas tradicionales sobre la materia del caso a juzgar (elemento normativo); y (d) la condición de que tales usos y prácticas no resulten contrarias a la Constitución o a la ley en lo que respecta a los límites mínimos fijados por la jurisprudencia (elemento de congruencia). El examen de esos requisitos requiere preguntas mínimas: ¿los organismos estatales encargados de establecer y desarrollar las políticas públicas sobre la diversidad ética y cultural saben cuáles son las diferentes formas de autoridad indígenas y cómo se concibe y estructura su ejercicio en los 81 pueblos indígenas de Colombia?; ¿conocen las instituciones de las entidades territoriales y el sistema judicial nacional cuál es la concepción de territorio que tiene cada uno de ellos?; ¿cuáles son las normas, procedimientos y sentidos filosóficos de los sistemas o prácticas de justicia indígena?; ¿cuáles son los usos y costumbres potencialmente contrarios a la constitución y a las leyes de la república y por qué? Sorprendentemente existen pocas respuestas a estas preguntas; ni siquiera los indígenas saben o se preocupan por saber la justicia de los pueblos vecinos.” (Gómez & Gnecco, 2008, pág. 22)

[14] Corte Constitucional. Sentencia T-811 de 2004. M.P. Jaime Córdoba Triviño: “El fuero indígena es el derecho del que gozan miembros de las comunidades indígenas, por el hecho de pertenecer a ellas, para ser juzgados por las autoridades indígenas, de acuerdo con sus normas y procedimientos, es decir por un juez diferente del que ordinariamente tiene la competencia para el efecto y cuya finalidad es el juzgamiento acorde con la organización y modo de vida la comunidad. Este reconocimiento se impone dada la imposibilidad de traducción fiel de las normas de los sistemas indígenas al sistema jurídico nacional y viceversa, lo cual se debe en buena medida a la gran diversidad de sistemas de resolución de conflictos, por el amplio número de comunidades indígenas y a que los parámetros de convivencia en dichas comunidades se basen en concepciones distintas”

[15] Corte Constitucional. Sentencia de Constitucionalidad C-463-2014 M.P. Maria Victoria Calle Correa

[16] LEY 21 DE 1991 (Marzo 4) Por medio de la cual se aprueba el Convenio número 169 sobre pueblos indígenas y tribales en países independientes, adoptado por la 76a. reunión de la Conferencia General de la O.I.T., Ginebra 1989. Artículo 1º. 1. El presente Convenio se aplica:

a). A los pueblos tribales en países independientes, cuyas condiciones sociales, culturales y económicas les distingan de otros sectores de la colectividad nacional, y que estén regidos total o parcialmente por sus propias costumbres o tradiciones o por una legislación especial;

b). A los pueblos en países independientes, considerados indígenas por el hecho de descender de poblaciones que habitaban en el país o en una región geográfica a la que pertenece el país en la época de la conquista o la colonización o del establecimiento de las actuales fronteras estatales y que, cualquiera que sea su situación jurídica, conservan todas sus propias instituciones sociales, económicas, culturales y políticas, o parte de ellas.

  1. La conciencia de su identidad indígena o tribal deberá considerarse un criterio fundamental para determinar los grupos a los que se aplican las disposiciones del presente Convenio.
  2. La utilización del término «pueblos» en este Convenio no deberá interpretarse en el sentido de que tenga implicación alguna en lo que atañe a los derechos que pueda conferirse a dicho término en el derecho internacional.

[17] (Sánchez Botero, 2010, pág. 111)

[18] Marco Constitucional de la Etnoeducación:

ARTÍCULO 10. El castellano es el idioma oficial de Colombia. Las lenguas y dialectos de los grupos étnicos son también oficiales en sus territorios. La enseñanza que se imparta en las comunidades con tradiciones lingüísticas propias será bilingüe.

ARTICULO  67. La educación es un derecho de la persona y un servicio público que tiene una función social; con ella se busca el acceso al conocimiento, a la ciencia, a la técnica, y a los demás bienes y valores de la cultura…

ARTICULO 68.  (…) Los integrantes de los grupos étnicos tendrán derecho a una formación que respete y desarrolle su identidad cultural…

ARTICULO   70.  Reglamentado por la Ley 1675 de 2013. El Estado tiene el deber de promover y fomentar el acceso a la cultura de todos los colombianos en igualdad de oportunidades, por medio de la educación permanente y la enseñanza científica, técnica, artística y profesional en todas las etapas del proceso de creación de la identidad nacional.

La cultura en sus diversas manifestaciones es fundamento de la nacionalidad. El Estado reconoce la igualdad y dignidad de todas las que conviven en el país. El Estado promoverá la investigación, la ciencia, el desarrollo y la difusión de los valores culturales de la Nación.

Convenio 169 OIT:

PARTE. VI

EDUCACION Y MEDIOS DE COMUNICACION

ARTICULO 26

Deberán adoptarse medidas para garantizar a los miembros de los pueblos interesados la posibilidad de adquirir una educación a todos los niveles, por lo menos en pie de igualdad con el resto de la comunidad nacional.

ARTICULO 27

  1. Los programas y los servicios de educación destinados a los pueblos interesados deberán desarrollarse y aplicarse en cooperación con éstos a fin de responder a sus necesidades particulares, y deberán abarcar su historia, sus conocimientos y técnicas, sus sistemas de valores y todas sus demás aspiraciones sociales, económicas y culturales.
  2. La autoridad competente deberá asegurar la formación de miembros de estos pueblos y su participación en la formulación y ejecución de programas de educación, con miras a transferir progresivamente a dichos pueblos la responsabilidad de la realización de esos programas, cuando haya lugar.
  3. Además, los gobiernos deberán reconocer el derecho de esos pueblos a crear sus propias instituciones y medios de educación, siempre que tales instituciones satisfagan las normas mínimas establecidas por la autoridad competente en consulta con esos pueblos. Deberán facilitárseles recursos apropiados con tal fin.

[19] CIDH, Acceso a la Justicia e Inclusión Social: El camino hacia el fortalecimiento de la Democracia en Bolivia. Doc. OEA/Ser.L/V/II, Doc. 34, 28 de junio de 2007, párr. 216.

[20] Corte Constitucional. Sentencia T-097/12 M.P. Mauricio González Cuervo:“El fuero indígena ha sido definido como un derecho de los miembros de las comunidades indígenas que se adquiere por el hecho de pertenecer a las mismas, y que consiste en la posibilidad de ser juzgados por las autoridades indígenas, con arreglo a sus normas y procedimientos, y cuyo objeto es el juzgamiento acorde con los usos y costumbres de dichas comunidades.

[21] Corte Constitucional. Sentencia de Constitucionalidad C-394 de 1995“En cuanto a los indígenas debe señalarse que esta expresión no es genérica, es decir referida a quienes, como es el caso de un alto porcentaje de la población colombiana, tengan ancestros aborígenes, sino que se refiere exclusivamente a aquellos individuos pertenecientes en la actualidad a núcleos indígenas autóctonos, cuya cultural, tradiciones y costumbres deben ser respetadas y garantizadas, en tanto no vulneren la Constitución y ley. Es claro que la reclusión de indígenas en establecimientos penitenciarios corrientes, implicaría una amenaza contra dichos valores, que gozan de reconocimiento constitucional; de ahí que se justifique su reclusión en establecimientos especiales.”

[22] “ARTICULO 29. RECLUSION EN CASOS ESPECIALES. Cuando el hecho punible haya sido cometido por personal del Instituto Nacional Penitenciario y Carcelario, funcionarios y empleados de la Justicia Penal, cuerdo de Policía inicial y del Ministerio Público, servidores públicos de elección popular, por funcionarios que gocen de fuero legal o constitucional, ancianos o indígenas, la detención preventiva se llevará a cabo en establecimientos especiales o en instalaciones proporcionadas por el Estado. Esta situación se extiende a los exservidores públicos respectivos.”

[23] Corte Constitucional. Sentencia de Tutela T-257/93 M.P. Alejandro Martínez Caballero: “Según la Constitución Política los territorios indígenas son, en orden ascendente, de tres clases: resguardos ordinarios o simplemente resguardos (art. 329), resguardos con rango de municipio para efectos fiscales (art. 357) y las entidades territoriales indígenas (art. 287).

Las entidades territoriales indígenas, como toda entidad territorial, gozan de plena autonomía para la administración de sus asuntos. Aquí incluso la autonomía es mayor, pues a las consideraciones generales sobre autogobierno del artículo 287 de la Carta se añaden las prerrogativas específicas en materia de costumbres de gobierno, lengua, justicia y elecciones, consagradas en los artículos 330, 10º, 246 y 171, respectivamente5 .

El Resguardo Indígena está definido en el artículo 2º del Decreto número 2001 de 1.988, que establece:

Es una institución legal y sociopolítica de carácter especial, conformada por una comunidad o parcialidad indígena, que con un título de propiedad comunitaria, posee su territorio y se rige para el manejo de éste y de su vida interna por una organización ajustada al fuero indígena o a sus pautas y tradiciones culturales.6

En otras palabras un resguardo no es una entidad territorial sino una forma de propiedad colectiva de la tierra.”

[24] Corte Constitucional, sentencia T-257 de 1993 M.P. Alejandro Martínez Caballero: “Las entidades territoriales indígenas, como toda entidad territorial, gozan de plena autonomía para la administración de sus asuntos. Aquí incluso la autonomía es mayor, pues a las consideraciones generales sobre autogobierno del artículo 287 de la Carta se añaden las prerrogativas específicas en materia de costumbres de gobierno, lengua, justicia y elección, consagradas en los artículos 330, 10, 246 y 171, respectivamente”.

[25] Convenio 169 de la OIT, Artículo 8:

  1. Al aplicar la legislación nacional a los pueblos interesados deberán tomarse debidamente en consideración sus costumbres o su derecho consuetudinario.
  2. Dichos pueblos deberán tener el derecho de conservar sus costumbres e instituciones propias, siempre que éstas no sean incompatibles con los derechos fundamentales definidos por el sistema jurídico nacional ni con los derechos humanos internacionalmente reconocidos. Siempre que sea necesario, deberán establecer procedimientos para solucionar los conflictos que puedan surgir en la aplicación de este principio.
  3. La aplicación de los párrafos 1 y 2 de este artículo no deberá impedir a los miembros de dichos pueblos ejercer los derechos reconocidos a todos los ciudadanos del país y asumir las obligaciones correspondientes.

[26] “Los diálogos interculturales que adelantan los jueces constitucionales son diálogos argumentativos de negociación que buscan acuerdos integrativos. Esto se demuestra al constatar que los  jueces constitucionales, al pertenecer a la sociedad mayoritaria y al ser representantes del Estado, tienen una escala de valores propia que entrará en negociación con la escala de valores de las comunidades indígenas. La finalidad será generar un acuerdo entre estas escalas de valores que permita realizar una interpretación adecuada de las tensiones constitucionales” (Marrero, 2006, pág. 268)

[27] T-349/96

[28] CIDH, Informe No. 40/04, Caso 12.053, Comunidades Indígenas Mayas del Distrito de Toledo (Belice), 12 de octubre de 2004, párr. 129.  Citado en pie de página #87 del  Informe de la CIDH “DERECHOS DE LOS PUEBLOS INDÍGENAS Y TRIBALES SOBRE SUS TIERRAS ANCESTRALES Y RECURSOS NATURALES Normas y jurisprudencia del Sistema Interamericano de Derechos Humanos” OEA/Ser.L/V/II. Doc. 56/09 30 diciembre 2009 Original:  Español Disponible en http://cidh.org/countryrep/TierrasIndigenas2009/Tierras-Ancestrales.ESP.pdf

[29] “La norma no es solamente un enunciado categórico proveniente del legislador, por lo tanto la norma jurídica cualquiera que ella sea, no se opone única y exclusivamente del precepto y la sanción, si fuere el caso, sino que ella tiene que mirarse bajo la óptica de lo que dice la jurisprudencia y la unión entre la argumentación del operador jurídico y la ley, en conjunto con los parámetros constitucionales es lo que llamaríamos norma” (Dworkin, 1997)

[30] “El derecho escrito funda su existencia en una negación, la inexistencia de la lengua del otro, abolida en razón del uso obligatorio, por razones de igualdad, de la lengua de la ley. La asimilación arbitraria de las lenguas como expresiones culturales por excelencia, opera como un puro reduccionismo sociocéntrico. La ley impone su gramática. El derecho escrito parte de un supuesto erróneo: el uso de la lengua común. El derecho escrito opera con un mecanismo oculto: el a priori de la tipificación de las prácticas culturales como condición necesaria de la igualdad jurídica. La punición de una conducta no es simplemente la imposición de un discurso a un sujeto transgresor de la ley, sino, radicalmente, la abolición en el sujeto de sus prácticas discursivas a través de la imposición despótica de una lengua extraña. La invención jurídica se realiza sobre la cultura del sujeto. La historia y el derecho se han realizado sobre el despotismo de una exigencia: la negación de nuestra lengua. Las instituciones jurídicas se han erigido frente a nosotros esgrimiendo una afirmación perversa: la incapacidad de nuestra lengua para contar nuestra historia: El discurso jurídico presume ser discurso que nos dota de una naturaleza. El discurso jurídico opera así sobre la cultura violada del otro. Producir un sujeto es el objetivo de aplicación de la norma. El discurso jurídico es el conjunto de principios que regulan el proceso de producción de ese sujeto universal que el mismo discurso impone. Las prácticas que el derecho tipifica como delito, son las prácticas culturales y su universo simbólico” (Piñacué, 1997, pág. 49)

[31] “Sistema institucionalizado y coactivo de normas generalmente obedecidas en un territorio cuya validez está siempre referida a un criterio supremo (que no tiene ninguna conexión conceptual necesaria por la justicia) que las unifica, permite a los funcionarios del sistema identificar las normas que deben aplicar y que provee a sus individuos seguridad colectiva” (Castro, 2011, pág. 302)

[32] Corte Constitucional de Colombia. Sentencia C-463/14 M.P. Maria Victoria Calle Correa: “En las sentencias T-496 de 1996 y T-728 de 2002, la Corte se refirió al fuero indígena, destacando su doble dimensión, en tanto derecho de las personas que reclaman una identidad étnica indígena a ser juzgadas de acuerdo con los sistemas de regulación de las propias comunidades, y garantía institucional de la autonomía indígena, en los siguientes términos: “(…) del reconocimiento constitucional de las jurisdicciones especiales se deriva el derecho de los miembros de las comunidades indígenas a un fuero. En efecto, se concede el derecho a ser juzgado por sus propias autoridades, conforme a sus normas y procedimientos, dentro de su ámbito territorial, en aras de garantizar el respeto por  la particular cosmovisión del individuo”, aspecto que fue reiterado y precisado en la sentencia T-728 de 2002, así: “El fuero indígena es el derecho del que gozan los miembros de las comunidades indígenas, por el hecho de pertenecer a ellas, para ser juzgados por las autoridades indígenas, de acuerdo con sus normas y procedimientos, es decir por un juez diferente del que ordinariamente tiene la competencia para el efecto y cuya finalidad es el juzgamiento acorde con la organización y modo de vida la comunidad. Este reconocimiento se impone dada la imposibilidad de traducción fiel de las normas de los sistemas indígenas al sistema jurídico nacional y viceversa (…)”.

La Corte señaló, además, que para la configuración del fuero indígena no era suficiente la identidad étnica indígena del procesado, sino que debían acreditarse un elemento personal, de acuerdo con el cual “el individuo debe ser juzgado de acuerdo con las normas de su comunidad”; y uno geográfico o territorial“que permite a las comunidades indígenas juzgar conductas cometidas en su ámbito territorial, de conformidad con sus propias normas”.

La concurrencia de tales elementos daría lugar al juzgamiento del  indígena por parte de las autoridades de su comunidad. Sin embargo, en ausencia de uno de esos factores, el juez encargado de dirimir el conflicto debería tomar en cuenta criterios como el grado de aculturación del sujeto o el nivel de aislamiento de la comunidad para definir a qué jurisdicción asignar la competencia, bajo parámetros de equidad y razonabilidad.”

[33] “En síntesis, y teniendo en cuenta lo anterior podría decirse que los elementos del pluralismo jurídico son: a) no es esencial al derecho que sea creado por el Estado (…); b) la realidad  evidencia la coexistencia de sistemas jurídicos estatales con otros sistemas jurídicos informales; c) la multiplicidad de prácticas jurídicas se origina en las necesidades existenciales, materiales y culturales; d) sospecha de la arraigada e influyente tradición del monismo jurídico que ha fundado los conceptos de derecho. En otras palabras: en opinión de un pluralista, ‘el derecho es la autorregulación de un campo social semiautónomo’, (…) y el pluralismo jurídico se define como ‘una situación en la cual dos o más sistemas jurídicos coexisten en el mismo campo social’. De este modo, un pluralista jurídico afirma que el derecho estatal es solo una forma de derecho; no exclusiva.” (Perafán Liévano, 2011, pág. 58)

[34] Corte Constitucional. Sentencia T-254/94 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz: “El derecho fundamental al debido proceso constituye un límite jurídico-material de la jurisdicción especial que ejercen las autoridades de los pueblos indígenas que la realizan según «sus propias normas y procedimientos, siempre y cuando no sean contrarios a la Constitución y a la ley» (CP art. 246). Cualquiera sea el contenido de las disposiciones jurídicas internas de las comunidades indígenas, estás deben respetar los derechos y principios contenidos en el núcleo esencial del derecho consagrado en el artículo 29 de la Carta. En efecto, el derecho fundamental al debido proceso garantiza los principios de legalidad, de imparcialidad, de juez competente, de publicidad, de presunción de inocencia y de proporcionalidad de la conducta típica y de la sanción, así como los derechos de defensa y contradicción. El desconocimiento del mínimo de garantías constitucionales para el juzgamiento y sanción equivale a  vulnerar el derecho fundamental al debido proceso.”

[35] Corte Constitucional. Sentencia T-903/09 M.P. Luis Ernesto Vargas Silva: “Sobre el principio de legalidad, la Corte ha establecido que se proyecta en dos direcciones: por una parte, se refiere a la existencia de instituciones que permitan conocer a los miembros de las comunidades el carácter socialmente nocivo de algunas actuaciones, o de soluciones a determinados conflictos; por otra, se relaciona con la preexistencia de las formas en que se aplican esas soluciones o se castigan esas conductas. Es decir, al procedimiento.

El respeto por el derecho fundamental al debido proceso y al principio de legalidad se concreta en la previsibilidad de las actuaciones de las autoridades tradicionales de la comunidad.”

[36] Corte Constitucional. Sentencia T-001/12: “Con relación al interés superior del niño indígena, el principio pro infans se ha venido reconociendo y tutelando de manera que la prevalencia del interés superior del niño o niña se establezca teniendo en cuenta las especificidades y el enfoque diferencial de los menores de edad que pertenecen a una comunidad indígena. Esta prevalencia especial concilia los derechos de los niños y su interés superior con los principios de identidad étnica y cultural y la pertenencia a una comunidad determinada”

[37] “¿Hay derechos humanos universales? Si miráramos los presupuestos filosóficos de los derechos humanos, concluimos fácilmente que los derechos humanos son típicamente occidentales, no tienen nada de universal (…)

Consideremos en detalle el primer presupuesto de los derechos humanos: la naturaleza humana es individual y puede ser conocida por medios racionales. Segundo: es diferente la naturaleza humana, es diferente y superior a toda la otra naturaleza. Tercero: su dignidad es anterior a la sociedad y al Estado, lo que obliga a una organización no jerárquica de aquella. (…) Todas las culturas tienen concepciones de dignidad humana, pero no todas las formulan en términos de derechos humanos.(…) Todas las culturas tienen valores o principios últimos o máximos, pero solamente la cultura occidental los concibe como universales” (De Sousa Santos, 1997, pág. 203)

[38] T-617 de 2010: “Con el fin de precisar ese criterio, resulta útil tomar en cuenta algunas formulaciones propuestas por el Consejo Superior de la Judicatura en las que explica que ese elemento hace referencia a la pertenencia de la comunidad indígena del sujeto pasivo o el objeto material objeto de la conducta; o en otros términos, del bien jurídico afectado. Puede, entonces, definirse el elemento objetivo como la condición de indígena del sujeto afectado, o del titular del bien jurídico ofendido; o, la naturaleza cultural del bien jurídico afectado. A pesar de la precisión obtenida a partir de las consideraciones de la autoridad judicial citada, una revisión somera de su jurisprudencia permite concluir que del elemento objetivo han surgido más inquietudes que certezas. || Así, en algunos fallos proferidos por el Consejo Superior de la Judicatura en el escenario que nos ocupa, la competencia se definió exclusivamente con base en los factores personal y territorial; en otras sentencias, la pertenencia de la víctima al resguardo se estableció como requisito de procedencia del fuero, en atención al elemento objetivo; en algunos pronunciamientos, la Corporación sostuvo una posición un poco más débil, señalando que si bien es relevante determinar la pertenencia de la víctima a la comunidad, de ahí no se deriva una regla definitiva de exclusión de la competencia de la jurisdicción especial indígena; lo anterior, dejando de lado que la identidad étnica de la víctima en ocasiones se ha ubicado como parte del elemento personal.”

[39] “Las sanciones o castigos corporales no violan los derechos humanos o tratos crueles, inhumanos o degradantes: son ejercicios autonómicos de nuestra justicia particular desde una visión del derecho sin importar el posible cuestionamiento al origen del cepo o fuete, por ejemplo. (…) La Convención contra la Tortura –Ley 70 de 1986– establece en el artículo 1º numeral 1º en su parte final que ‘No se considerarán torturas los dolores o sufrimientos que sean consecuencia únicamente de sanciones legítimas, o que sean inherentes o incidentales a éstas’” [Negritas son mías]. (Piñacué, 1997, pág. 50)

[40] “Los castigos corporales han sido parte fundamental de nuestra justicia, son el instrumento que permite restablecer el equilibrio y sostener la armonía. No pertenece a nuestra tradición, usos y costumbres construir cárceles para recluir en ellas a los condenados; este hecho contraría nuestra concepción de la relación hombre-naturaleza, fundamento de nuestra cosmovisión” (Piñacué, 1997, pág. 51)

[41] Corte Constitucional T-523-97: “El fuete consiste en la flagelación con “perrero de arriar ganado”, que en este caso se ejecuta en la parte inferior de la pierna.  Este castigo, que se considera de menor entidad que el cepo, es una de las sanciones que más utilizan los paeces. Aunque indudablemente produce aflicción, su finalidad no es causar un sufrimiento excesivo, sino representar el elemento que servirá para purificar al individuo, el rayo. Es pues, una figura simbólica o, en otras palabras, un ritual que utiliza la comunidad para sancionar al individuo y devolver la armonía. En este caso, y al margen de su significado simbólico, la Corte estima que el sufrimiento que esta pena podría causar al actor, no reviste los niveles de gravedad requeridos para que pueda considerarse como  tortura, pues el daño corporal que produce es mínimo. Tampoco podría considerarse como una pena degradante que “humille al individuo groseramente delante de otro o en su mismo fuero interno”, porque de acuerdo con los elementos del  caso, esta es una práctica que se utiliza normalmente entre los paeces y cuyo fin no es exponer al individuo al “escarmiento” público, sino buscar que recupere su lugar en la comunidad.

[42] Corte Constitucional T-523-97: “La Convención contra la Tortura y otros tratos o Penas Crueles, Inhumanas o Degradantes, aprobada por Colombia por la ley 78 del 15 de diciembre de 1986, define la tortura como: “(…) todo acto por el cual se inflinja intencionalmente a una persona dolores o sufrimientos graves, ya sean físicos o mentales, con el fin de obtener de ella o de un tercero información o una confesión, de castigarla por un acto que haya omitido, o se sospeche que ha cometido, o de intimidar o coaccionar a esa persona, o a otras, o por cualquier razón basada en cualquier tipo de discriminación, cuando dichos dolores o sufrimientos sean infligidos por un funcionarios público u otra persona en el ejercicio de funciones públicas, a instigación suya, o con su consentimiento o aquiescencia. No se consideran torturas los dolores o sufrimientos que sean consecuencia únicamente de sanciones legítimas, o que sean inherentes o incidentales a estas”. La misma norma internacional establece, además, que esta noción de tortura debe entenderse sin perjuicio de instrumentos internacionales o legislaciones nacionales que contengan disposiciones de mayor alcance, como en efecto lo ha hecho la Constitución Nacional, que extiende la prohibición a los casos en que el torturador es un particular.

La prohibición de la tortura busca, por lo tanto, proteger el derecho a la integridad personal y la dignidad del individuo, que pueden ser violados por el uso arbitrario de la fuerza. Claro está, entendiendo que no todas las sanciones que producen sufrimientos alcanzan esta categoría. Al respecto, la Corte Europea de Derechos Humanos, en diferentes decisiones ha establecido que no todas las penas corporales constituyen tortura y que para que adquieran tal entidad los sufrimientos producidos deben ser graves y crueles. La intensidad, entonces, deberá ser analizada a la luz de las circunstancias del caso, como la duración de la condena, sus efectos en la integridad física y moral del condenado, su sexo, edad o condiciones de salud, e incluso el contexto socio-político en el que se practica. Estos criterios, también son relevantes para determinar, una vez descartada la tortura, si se trata de un comportamiento inhumano o degradante.”

[43] Corte Constitucional de Colombia. Sentencia C-713 de 2008 M.P. Clara Inés Vargas Hernández: “Desde el punto de vista funcional la jurisdicción indígena hace parte de la rama judicial; por ello no sólo es razonable sino jurídicamente exigible que el Consejo Superior de la Judicatura promueva labores de divulgación y sistematización de asuntos relativos a la jurisdicción indígena. Sin embargo, la Corte considera necesario precisar que las autoridades indígenas no pertenecen a la estructura orgánica de la Rama Judicial del poder público, como en repetidas oportunidades lo ha puesto de presente la jurisprudencia de esta Corporación” [Negritas son mías].

[44] C-187 de 2006: “Respecto de la jurisdicción indígena, creada para permitir a las autoridades de los pueblos indígenas ejercer funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial, considera la Corte que la decisión legislativa de no conferir a esta jurisdicción competencia para conocer de la petición de hábeas corpus, se ajusta al texto de la Constitución Política. Según el proyecto, serán competentes los jueces y tribunales de la rama judicial del poder público y de ésta, según el artículo 116 de la Carta Política, no hacen parte  las autoridades mencionadas en el artículo 246 superior.

Para la Sala, la naturaleza excepcional de la jurisdicción indígena hace que el legislador estatutario atribuya de manera expresa esta competencia en las autoridades mencionadas por el artículo 246 de la Constitución, más aún cuando el constituyente ha condicionado a la expedición de una ley las formas de coordinación de esta jurisdicción con el sistema judicial nacional”

[45] Corte Constitucional. Sentencia T-188/93 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz: “La Constitución Política de 1991 reconoce la diversidad étnica y cultural de la Nación Colombiana (CP art. 7). Lejos de ser una declaración puramente retórica, el principio fundamental de diversidad étnica y cultural proyecta en el plano jurídico el carácter democrático, participativo y pluralista de nuestra República. Las comunidades indígenas – conjuntos de familias de ascendencia amerindia que comparten sentimientos de identificación con su pasado aborigen y mantienen rasgos y valores propios de su cultura tradicional, formas de gobierno y control social internos que las diferencian de otras comunidades rurales (D.2001 de 1988, art. 2º) -, gozan de un status constitucional especial. Ellas forman una circunscripción especial para la elección de Senadores y Representantes (CP arts. 171 y 176), ejercen funciones jurisdiccionales dentro de su ámbito territorial de acuerdo con sus propias normas y procedimientos, siempre que no sean contrarios a la Constitución o a las leyes (CP art. 246), se gobiernan por consejos indígenas según sus usos y costumbres de conformidad con la Constitución y la ley (CP art. 33O) y sus territorios o resguardos son de propiedad colectiva y de naturaleza inenajenable, inalienable, imprescriptible e inembargable (CP arts. 63 y 329).” [Negritas son mías].

[46] Corte Constitucional Auto A-228 de 2007 M.P. Rodrigo Escobar Gil: De la simple lectura del Decreto 2591 de 1991 y del 1382 de 2000 se puede observar que no se encuentra asignada competencia a las autoridades de la jurisdicción especial indígena para el conocimiento de las acciones de tutela  (…) En otros términos, pese a que la Constitución ha otorgado jurisdicción especial a las autoridades indígenas, no implica ello el otorgamiento de competencia en trámites especiales, tales como las acciones de tutela, puesto que en esta específica materia, la competencia se encuentra regulada por la Constitución y los Decretos 2591 de 1991 y 1382 de 2000.”

[47] T-380/93 M.P. Eduardo Cifuentes Muñoz

[48] Corte Constitucional. Sentencia T-617/10 M.P. Luis Ernesto Vargas Silva: “”

[49] Corte Constitucional. Sentencia T-1238 de 2004 M.P. Rodrigo Escobar Gil: “La autoridad indígena debe exteriorizar su decisión de adelantar el juzgamiento. Ello puede ocurrir cuando reclama para si el juzgamiento ante la respectiva autoridad judicial, o cuando de manera previa o simultánea ha asumido el conocimiento de los hechos de acuerdo con sus usos tradicionales. Cabría preguntar, sin embargo, si el juez debe iniciar oficiosamente la actuación orientada a establecer si en un determinado proceso se está en presencia de los supuestos que dan lugar al fuero indígena. La respuesta a este interrogante es, en principio, negativa, por cuanto el fuero sólo se materializa cuando la autoridad indígena exterioriza su voluntad de asumir el conocimiento de una determinada causa. Si en un proceso penal el sindicado considera que está amparado por el fuero especial indígena, debe dirigirse a la autoridad tradicional que en su criterio es competente, para que ella presente la solicitud al juez del conocimiento.”

[50]T-601 de 2011. El Gobierno del Resguardo lo ejerce el Cabildo Central, que reúne la Junta Directiva (presidida por el Gobernador), el Consejo del Gobierno (que reúne los ex gobernadores) y los 21 cabildantes delegados de las comunidades. El Cabildo ejerce las funciones que le asigna la Ley 89 de 1890, y cuenta además con una Consejería y la Guardia Indígena para ejercer la justicia propia y el control territorial y social, y con una escuela de médicos tradicionales.

[51] Cita a pie de página en la Sentencia T-002 de 2012: “Esto con base en lo dispuesto por el artículo 256.6 de la Constitución Política y 112.2 de la Ley Estatutaria de la Administración de Justicia.: Constitución Política. Artículo 256. “Corresponden al Consejo Superior de la Judicatura o a los Consejos Seccionales, según el caso y de acuerdo a la ley, las siguientes atribuciones: (…) 6. Dirimir los conflictos de competencia que ocurran entre las distintas jurisdicciones”. Ley 270 de 1996, modificada por la ley 1258 de 2009, artículo 112: “Funciones de la sala jurisdiccional disciplinaria del consejo superior de la judicatura. Corresponde a la sala jurisdiccional disciplinaria del consejo superior de la judicatura: 2. Dirimir los conflictos de competencia que ocurran entre las distintas jurisdicciones, y entre éstas y las autoridades administrativas a las cuales la ley les haya atribuido funciones jurisdiccionales, salvo los que se prevén en el artículo 114, numeral tercero, de esta Ley y entre los Consejos Seccionales o entre dos salas de un mismo Consejo Seccional”.”

[52] Corte Constitucional. Sentencia T-002/12 M.P. Juan Carlos Henao Pérez: “De la ausencia de una explicación razonable sobre las circunstancias exactas en las cuales los derechos de la menor “Ángela” peligran si las autoridades tradicionales del resguardo Los Guayabos asumen la competencia del asunto, se desprende que el Consejo Superior de la Judicatura incurrió en defecto sustantivo al interpretar erróneamente el artículo 246 de la Constitución. Esta interpretación errónea consiste en suponer que el fin último de la jurisdicción instituida por este artículo es proteger al indígena infractor, de manera que –parece suponer la entidad accionada-la adopción de una actitud condescendiente con los adultos que han atentado contra la integridad sexual de los menores es connatural al ejercicio de la jurisdicción especial indígena.”

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